Attention : le texte en italique révèle l'intrigue ou une partie de celle-ci, soyez vigilant si vous n'avez pas encore vu le film.
Il est devenu de bon ton de considérer l’Eglise comme collaborationniste, et la continence des prêtres impossible à tenir. Quel est le rôle d’un film montrant un prêtre irréprochable sur ces deux thèmes ?
C’est simplement un film tiré d’une histoire vraie, celle de Béatrice Beck, qui était la secrétaire d’André Gide, et qui pendant la seconde guerre mondiale a rencontré, effectivement, un prêtre irréprochable. Il était d’ailleurs impliqué dans la Résistance, comme beaucoup de prêtres à l’époque. Il faut dire aussi que beaucoup d’hommes, qu’ils soient prêtres ou non, savent respecter l’engagement qu’ils ont pris, soit quand ils ont décidé de devenir prêtre, soit quand ils ont décidé de se marier.
Evocation de l’ancien prêtre aux pratiques douteuses, petit chantage et flirt avec la collaboration des collègues ouvertement catholiques, cantique chanté faux pendant une célébration… Présenter ainsi certains catholiques est-il une manière d’éviter l’accusation de prosélytisme ?
L’évocation du prédécesseur de Léon Morin est plutôt un moyen scénaristique de faire ressortir la pureté de l’abbé Morin : il s’agit d’accentuer le côté sombre des « méchants » pour faire ressortir ceux qui sont bons. Après, encore une fois, c’est une histoire vraie, il y a sûrement des catholiques qui se sont bien comporté, d’autres qui se sont moins bien comporté pendant la guerre, il y a aussi de gens athées qui se sont bien comporté, d’autres qui se sont moins bien comporté, c’est la vie, et c’est ce que raconte l’histoire ; nous n’avons pas essayé de faire de prosélytisme en faisant ce film, nous voulions juste raconter ce qui est vrai ; ensuite, ce qui également certain, c’est que beaucoup de prêtres ont eu une action héroïque pendant la Résistance, dans les camps de concentration, énormément de juifs ont été cachés par des prêtres pendant la seconde Guerre mondiale, ce n’est que la vérité.
Certes les Allemands du film oppressent la population villageoise, mais deux d’entre eux aident aussi l’héroïne à porter sa bicyclette crevée : le film nous dit-il que Dieu n’a pas de drapeau ? Est-ce qu’un homme d’Église comme Léon Morin peut se permettre de ne pas choisir de camp ?
Je ne pense pas que le film cherche à montrer quelque chose là-dessus, mais je pense aussi que Dieu n’a pas de drapeau !
Pour prendre un exemple concret, dans l’adaptation Léon Morin, prêtre, avec Jean-Paul Belmondo, le prêtre cache des juifs chez lui ; or dans La Confession, c’est l’héroïne, Barny, qui en cache, et non plus le prêtre : pourquoi cette différence ?
Dans le premier montage, nous avions filmé cette scène où effectivement, l’abbé Morin cache une personne juive, mais nous avons coupé cette scène au montage, car le film faisait alors deux heures et demie, il fallait le raccourcir ; c’est donc un choix de montage, on ne peut malheureusement pas tout montrer ; il y avait aussi la libération du village (présente dans Léon Morin, prêtre, ndlr), que finalement nous n’avons pas montrée, où l’on voyait Barny triste au milieu de la foule joyeuse, mais nous n’avons pas pu la laisser pour accélérer, pour que le récit soit plus efficace.
D’après les propos de son réalisateur, La Confession n’est pas comme Léon Morin, prêtre, un portrait d’homme, mais un portrait de femme. Que dire donc des sentiments de Barny notre héroïne, voit-elle dans le prêtre un amant inaccessible, ou un autre Christ, un alter Christus ? En un mot, son amour est-il impossible ?
Elle découvre tout de même qui est Dieu grâce à l’abbé Morin ; de plus, l’autre jeune prêtre lui dit que dire que Dieu existe est comparable à dire que « x égale x », comme elle le disait à l’abbé Morin, pour affirmer que rien ne prouve vraiment l’existence de Dieu ; en fin de compte, Barny reconnaît l’existence de Dieu. Elle éprouve vis-vis de l’abbé Morin de très fortes tentations, elle est tombée sous le charme et peut-être, est-elle tombée amoureuse, je ne sais pas, on ne peut lire précisément le secret des cœurs ; finalement, elle décide de privilégier son mari ; l’abbé, lui, privilégie son sacerdoce ; la différence est qu’elle est tombée sous son charme, alors que l’abbé Morin lui ne s’en est pas rendu compte, il reconnaît d’ailleurs « ce n’est pas entièrement votre faute, il m’arrive d’être imprudent ». Lui n’est jamais tombé amoureux d’elle ; cependant, quand il la quitte, il sait que c’est un choix brutal parce qu’il n’aurait pas voulu que leur relation s’arrête, mais il risque aussi d’être tenté par le charme de Barny. Mais à aucun moment, l’abbé n’abandonne son sacerdoce ; quand il s’aperçoit qu’elle est subjuguée par lui, il décide qu’il est plus prudent de partir ; de la même façon qu’un homme marié, rencontrant une femme charmante avec qui il s’entend bien dans un cadre professionnel ou autre et qu’il pourrait se passer quelque chose, peut lui signifier qu’il serait mieux de ne plus se voir ; certes cet homme n’est pas prêtre mais à un moment donné c’est la même chose, il faut savoir trouver un distance… Bref, l’amour de Barny pour Dieu n’est donc pas impossible.