47 Ronin

Film : 47 Ronin (2013)

Réalisateur : Carl Erik Rinsch

Acteurs : Keanu Reeves (Kaï), Hiroyuki Sanada (Kuranosuke Oïshi), Kô Shibasaki (Mika), Tadanobu Asano (Lord Kira)

Durée : 01:59:00


Alors que le premier film de Kenu Reeves en tant que réalisateur, L'Homme du Tai Chi, devrait sortir sur les écrans français le 30 avril prochain, le public impatient pourra déjà tromper sa faim avec 47 ronins. Basée sur une histoire vraie enveloppée de légende, cette histoire japonaise témoigne une nouvelle fois de la très grande amitié de l'acteur pour les spiritualités orientales (on ne sait pas si cette proximité le rapproche de Richard Gere).

Du point de vue de la réalisation le film est un sans faute. Le cinéma hollywodien a décidément entériné l'utilisation des travellings, des ralentis et des effets spéciaux léchés, accouchant de films efficaces et distrayants. Cette gestion caractéristique de l'espace filmique prend un sens tout particulier dans les films de contes et légendes comme celui-ci, où les sorcières partent en fumée et les combats tiennent une place prépondérante. Du point de vue des costumes, des décors et des acteurs, rien à redire. Le jeu est bon, même si le flegme japonais est toujours déroutant pour les néophytes, et Kenu Reeves tient toujours aussi bien son rôle de petit brun mystérieux et ténébreux.

Sur le fond, le film pose une nouvelle fois la question du bushido japonais, code très strict décrit dans le Hagakure de Yamamoto Tsunetomo (1716) et qui exigeait du samouraï sept vertus : le sens de la justice et de l'honnêteté, le courage et le mépris de la mort, la sympathie envers tous, la politesse et le respect de l'étiquette, la sincérité et le respect de la parole donnée, la loyauté absolue envers les supérieurs, et la défense de l'honneur et du clan.

Dans le film, la première vertu est caractérisée par la reconquête de Ako, une ville ravie à son souverain par fourberie ; mais ce qui pose véritablement problème, c'est surtout la loyauté au souverain. Car celui-ci ayant précisément interdit aux samouraï ayant-droits de reconquérir la ville, la tragédie est donc toute dessinée : justice est faite (Ako est reprise), mais il y a eu désobéissance (et donc entorse au bushido).

Le Shogun n'étant pas vraiment le roi de la blague carambar, son attitude ne sera pas maganime mais rigoriste : les samouraïs doivent se suicider. Pour m'appliquer cette sentence excessive et contraire à la justice, puisque l'ordre du shogun était pris sur des informations inexactes, il aurait fallu courir plus vite que moi. Mais les 47 ronins décident contre tout bon sens de se faire seppuku tous en coeur.

Le film essaie de faire croire que c'est une jolie question d'honneur. Or l'honneur du bushido est une valeur purement collective : il s'agit simplement de réputation c'est-à-dire, en fait, de "qu'en dira-t-on ?" Se suicider pour remonter dans l'estime des autres, n'est-ce pas la preuve évidente d'une manque de force et de caractère là où, précisément, on tente de le faire passer pour du courage ? Quand l'opinion d'autrui commande, l'homme ne devient-il pas l'esclave de son propre orgueil ?

Et dès lors, même la vertu de courage s'effondre, puisque le courage, à l'inverse de la témérité, s'exerce en considération d'un idéal de haute noblesse !

Si, moins intéressante, la romance est traitée plus ordinairement, celle de la vengeance n'est pas très claire : Oïchi agit-il dans un esprit de vengeance ou de justice ?

Reste une oeuvre équilibrée et bien réalisée, qui ravira les amateurs du genre.