Cristeros

Film : Cristeros (2011)

Réalisateur : Dean Wright

Acteurs : Oscar Isaac (Victoriano 'El Catorce' Ramirez), Andy Garcia (Enrique Gorostieta Velarde), Eva Longoria (Tulita), Peter O'Toole (Father Christopher)

Durée : 02:22:00


L’histoire trop méconnue des Cristeros trouve enfin son film, et la France le censure. Censuré ? vraiment ? Voici pourquoi :

Réveillant des lois mexicaines liberticides dans le coma depuis leur promulgation en 1917, Calles, élu en 1924, soulève le peuple catholique du Mexique. Après avoir tenté la carte du pacifisme, environ vingt mille d’entre eux s’arment face au gouvernement qui applique une véritable Terreur anticatholique, avec à leur tête le général Enrique Gorostieta Velarde (charismatique Andy Garcia). Lever un tel mouvement a nécessairement posé de nombreuses questions graves : peut-on prendre les armes au nom de Dieu ? Certains s’y refusent au nom d’un pacifisme qui, au final, laisse faire le sale boulot aux autres … Et si on le peut, doit-on le faire ? Deux réactions répondent à cela : le martyre, ou la guerre ; le film n’ira pas non plus chercher St Thomas d’Aquin pour dénouer ces questions. Nous voyons les faits, et sommes juges, mais l’hagiographie n’est pas masquée pour autant. Le prêtre militaire, les enfants engagés dans les Cristeros … Tout dépend évidemment de la fin recherchée. Et cette fin, loin de la vengeance, loin des traumatismes, le général la définit : la liberté. Le flou demeure quant à savoir laquelle. Celle des libéraux, ou celle que Dieu donne ? Le haut gradé, manifestement, penche pour la première, mais il ne faut pas tout exiger d’un coup  d’un homme qui a connu la gloire, et qui par cet engagement inattendu retrouve le désir de croire. Le prêtre est d’ailleurs là pour réaffirmer la seconde. Enfin, devant tant de désastres souvent monstrueux (une rangée de pendus le long d’une ligne télégraphique, fidèle adaptation de véritables clichés), l’homme sans foi ne comprend pas que Dieu laisse faire cela. Mais le prêtre est encore là pour expliquer.

Les qualités ne sont pas que scénaristiques ; For Greater Glory : The True Story of Cristiadaallieà cette magnificence des événements une immersion graduelle : un regard éloigné, rigoureux, point de vue des principaux acteurs des événements (le général, le commandement des Cristeros, et Calles), auquel se confond une vue complexe des personnages aux caractères marqués et nuancés. S'ajoute une immersion au plus près de l'émotion, des frustrations, des questionnements intérieurs, des relations profondes qui peuvent se nouer, donnant au final une œuvre bien plus proche du drame que du documentaire historique, et par là bien plus … cinématographique, intense et vivante. Impossible de ne pas être remué, pour ne pas dire bouleversé, par la force et la flamme des Cristeros : au final, vous aurez peut-être l'impression d'avoir combattu à leurs côtés.


Donner la parole à la foi, aux faits historiques vite enterrés, dans un film bien à contre-courant de la pensée unique : il fallait un sacré courage. Montrant la cruauté dans toute son horreur face à l’héroïsme de gens ordinaires, ce film méprise le complexe contemporain pour parler de la vérité historique. Animé de la force de l’exemple, celle du Calvaire des Cristeros, comparé à juste titre à la Croix, ce témoignage fait sans doute partie de ces quelques chefs-d’œuvres qui peuvent marquer à vie.