Dernier train pour Busan

Film : Dernier train pour Busan (2016)

Réalisateur : Yeon Sang-ho

Acteurs : Gong Yoo (Seok-woo), Jeong Yu-mi (Seong-kyeong), Ma Dong-seok (Sang-hwa), Choi Woo-sik (Yeong-gook), Ahn So-hee (Jin-hee), Kim Ee-seong (Yong-seok), Kim Soo-an (Soo-an)

Durée : 01:58:00


Depuis longtemps passés maîtres dans l'art du suspense, les coréens remettent le couvert dans ce film dont on a tout à craindre, puisque sélectionné au festival de Cannes 2016. Cette suite du film d'animation Seoul Station (du même réalisateur) saura pourtant captiver le spectateur tout en questionnant son humanité profonde dans une tempête où les âmes livrées à elles-mêmes n'ont plus qu'une préoccupation : la survie.
Quoi de mieux en effet qu'un bon film de survie pour faire émerger la nature profonde des protagonistes ? Certes. Mais n'oublions pas que l'oeuvre d'art présente l'insigne caractéristique de porter au premier chef la vision de l'artiste. Les comportements humains ne sont pas réels, ils sont peints, décidés par le scénario, en l'occurrence. C'est là ce qui fait toute la différence, c'est là aussi que le bât blesse.
Confrontés à un contexte de survie, l'homme déploie ses tendances primaires. La peur casse les barrières de la civilisation. Vices et vertus s'échappent comme d'une boîte de Pandore. Le film met ainsi en interactions plusieurs portraits-type : Sang-Hwa, le costaud au grand coeur, Seok-woo, le financier égoïste, Su-an, la petite fille altruiste, Young-suk, le chef d'entreprise pragmatique... Voilà pour les caractères. Pour que le spectateur vibre au rythme de ceux-ci, le film galbe le tout dans la panoplie habituelle des films d'horreur : la petite fille vulnérable, la femme enceinte fragile, le traître, l'éternel apeuré... Mais le grand problème des "types" est de basculer le plus souvent dans les caricatures. La plus manifeste d'entre elles porte sur les dirigeants de ce monde. La patrie de Samsung se commet en effet en tombant dans les clichés ridicules comme celui du financier disant textuellement à sa fille qu'elle ne doit penser qu'à elle, ou du chef d'entreprise sans aucune humanité qui fournit ses compagnons aux zombies pour les occuper pendant sa fuite, etc. Le film devient alors pour Seok-woo un parcours initiatique. Coincé dans un train contaminé (excellente idée déjà exploitée dans Le Transperceneige), lui qui était égoïste découvre qu'il doit sa vie à ceux qui l'aident, lui qui négligeait sa petite fille réalise combien elle compte pour lui. Faut-il être confronté à des zombies pour comprendre ces choses là ? Selon le film, pour un spécialiste de la finance, oui. Il faut donc croire que cette race de gens a la feuille particulièrement dure, et qu'ils sont plus stupides qu'un scénariste de film qui, lui, est bien entendu imprégné d'humanisme (comme si son job n'était pas porté par les financiers qu'il dénonce, quand on pense au budget d'un film, chiffré en millions !..).
Le reste du film est une divine surprise. Le scénario est bien construit et exploite avec finesse ce vase clos qu'est le train. Les acteurs sont par ailleurs authentiques et la musique appropriée (ce qui n'est franchement pas le cas dans tous les thrillers malheureusement). On pourra déplorer que tout soit un peu trop prévisible, malgré quelques surprises intéressantes qu'on ne dévoilera pas ici. En outre, l'imaginaire collectif étant frappé surtout par la Corée du Nord, la pellicule se fait donc ici ambassadrice de sa petite soeur du sud. Le film montre une Corée jeune, dynamique et ultra-moderne.
Autre avantage : les asiatiques ne ressentent pas dans leurs films la nécessité de montrer des histoires de fesses pour avoir l'air libres et décomplexés...