Divergente 2 : l’insurrection

Film : Divergente 2 : l’insurrection (2015)

Réalisateur : Robert Schwentke

Acteurs : Shailene Woodley (Beatrice 'Tris' Prior), Theo James (Four), Octavia Spencer (Johanna), Jai Courtney (Eric)

Durée : 01:59:00


Un film intéressant et ludique techniquement, qui réussit à s’extraire d’une histoire d’ados pour se faire une place au milieu des nouveautés de la science-fiction. Quelque peu subversif d’un point de vue éthique.

 

Voyager dans un monde post-apocalyptique dominé par un pouvoir à tendance totalitaire n’est pas une expérience nouvelle dans la fiction littéraire et cinématographique. De même que suivre le cheminement d’une jeune adolescente en quête de soi n’a rien d’extraordinaire scénaristiquement. Ajouter à cela que l’on assistait au deuxième épisode d’une histoire où l’action avait été largement exploitée dans le premier opus, il y avait finalement peu de chances pour que Divergente 2 évite les gros écueils de la redite, du mauvais remake, du mauvais polar d’ados rebelles, bref de l’ennui.

Et pourtant, le film du réalisateur allemand Robert Schwentke s’en sort bien et frise même la perfection d’un point de vue technique (photographie et effets spéciaux impressionnants). L’adaptation à l’écran du volet « Insurrection » de la trilogie Divergente, écrite par Veronica Roth, jeune romancière américaine de 26 ans, séduit. Elle met en scène le duel entre l’intrépide Tris (Shailene Woodley), jeune fille « divergente » n’appartenant à aucune des factions humaines existantes (Audacieux, Erudits, Fraternels, Altruistes et Sincères), et la méchante Jeanine (Kate Winslet, méconnaissable dans ce rôle autoritaire), déterminée à éradiquer tous les « divergents ».

Malgré un premier tiers un peu long où le film tente de masquer sa quête d’un rebond à l’histoire avec des scènes quelquefois hasardeuses, des dialogues convenus, une musique exagérément rythmée et l’apparition étonnante de Naomi Watts (Mulholland Drive, Diana) dans un 3ème rôle, belle mais très peu convaincante avec son fusil d’assaut plus grand qu’elle, le film décolle vraiment à l’approche du duel entre les deux actrices principales, avec une série de rebondissements pas toujours prévisibles et quelques pointes d’humour bien placées. Les acteurs jouent juste.

La recette du scénario ‒ ambitieux ‒ est simple : elle mixe les ingrédients à succès de nombreux chefs-d’œuvre de science-fiction. Jeu d’allers-retours comiques entre le réel et le rêve (Edge of Tomorrow), défragmentation numérique de personnages imaginés (Transcendance, Lucy), rivalités et alliances entre factions pour renverser le pouvoir d’une élite intellectuelle – les Erudits en l’occurrence – (série Game of Thrones), univers totalitaire duquel s’échappent deux individus amoureux (1984, The Island), découverte progressive des pouvoirs inégalables d’un « élu » (Matrix, Hunger Games) et manipulation psychologique (Inception), sont au programme !

Le film pose en revanche de sérieuses questions éthiques, de façon plus ou moins explicite. A l’heure des singuliers progrès de l’optogénétique (stimulation de neurones par la lumière), il pose de bonne façon la question des dérives potentielles de cette science par les manipulations psychologiques pouvant être opérées sur des patients. Mais dans un autre registre, à force de vouloir égaler l’homme et la femme jusque dans le domaine de la lutte physique, il banalise la violence faite aux femmes et la violence par les femmes. Tris, avec sa nouvelle coupe garçonne, prend régulièrement des coups de poing en pleine figure. Le film a également tendance à banaliser le suicide, le présentant comme une alternative possible pour échapper à la grande simulation mise en place. Enfin il s’achève sur un message se voulant clair, une sorte de critique des corps intermédiaires de la société (les factions ici), mais qui semble justifier tous les crimes qui ont été commis au nom de l’idéal émancipateur victorieux. Selon la bonne doctrine américaine de la guerre préventive et nécessaire.