Divergente 3 : au-delà du mur

Film : Divergente 3 : au-delà du mur (2016)

Réalisateur : Robert Schwentke

Acteurs : Shailene Woodley (Beatrice "Tris" Prior), Theo James (Quatre), Jeff Daniels (David), Miles Teller (Peter)

Durée : 02:01:00


Êtres imparfaits versus visionnaires mégalos et eugénistes, le duel se prolonge sur un troisième volet. Bis repetita, en changeant simplement les méchants, en flinguant un ou deux gentils (après quinze minutes) pour en mettre d’autres. Comme une série TV, en fait.

Divergente troisième du nom soulève de hautes questions : que faire de la manipulation du génome ? Céder à la tentation de l’être parfait, de l’humain 2.0 ? Eh bien non. Si ce n’est pas ici que vous verrez qui que ce soit soutenir le transhumanisme (car indirectement, le film y touche), il n’empêche qu’on ne peut que déplorer la pauvreté de la réponse apportée. Mais Divergente n’est pas pensé dans ce sens. Ce n’est pas un scénariste qui s’est demandé : « que deviendrait dans le futur le combat entre les progressistes de la manipulation du génome, et ceux qui refusent la science sans conscience ? » ; non. Avec mon habituelle bonne foi, voilà comment je sens que Divergente a été pensé :

« Je m’appelle Praline (même si je préfère qu’on m’appelle Eglantine, ou Sabine), j’ai seize ans, je me trouve un peu moche même si ma mère me dit le contraire, et le lycée, la télé, les copines, le chien, même s’il est mignon, tout cela est chiant. »
Après une engueulade paternelle, enfermée dans sa chambre, Praline rêve alors, pour s’évader un peu, d’un livre, ou d’un film, dont elle serait l’héroïne :
« Et si j’étais l’élue ? L’élue de quoi ? on verra plus tard. On viendrait me voir en m’expliquant que je suis l’élue, comme dans Matrix. Que je suis exceptionnelle. Dans un monde post-apocalyptique avec des factions, comme les classes au lycée, je serais différente de tout le monde, un peu mieux que tous les autres, même si je le renierais avec modestie. Je serais … Différente. Non, ça ne sonne pas bien ça. Dilettante … nan, et puis je ne sais plus ce que ça veut dire. Divergente … ouais c’est bien ça. Je divergerai. »
« Bon, il faut des méchants, et des gentils à sauver. A la tête des méchants, un vieux tyran, comme mon père. Ce sera le seul vieux, tous les autres auront maximum trente ans, pour que je puisse imaginer tous mes potes. Y aura ma mère, qui sera tantôt méchante, tantôt gentille, un peu comme en vrai. Mais en jeune aussi, c’est plus cool. Y'aura Bryan aussi … (Bryan est le mec du casier numéro 4 – d’où son imaginatif nom - qui lui a dit « déso » en la bousculant dans le couloir vendredi dernier, elle s’en souviendra à jamais, ndlr). Ce sera mon mec, même si je suis pas vulgaire comme la blondasse Lætitia (casier 5, qui fera la méchante, merci à Kate Winslet, ndlr), et il fera tout bien, il se battra contre le mal, sera beau, musclé (comme Bryan, pas premier en basket pour rien), éliminera tous ses ennemis pour me protéger (c’était le meilleur au laser quest aussi !), et puis, comme c’est mon petit côté mec qui ressort, moi aussi, je me battrai pour le protéger, après tout, je suis l’élue, hé. On est au XXIe siècle, zut quoi, les filles savent se battre comme les mecs maintenant. »
Et pour finir :
« Je serai blonde, j’aurai enfin le droit de me teindre. Je porterai des longs pantalons blancs, comme ceux de Gucci, j’adore ! Comme c’est dans le futur, on mettra des immeubles comme sur les dessins que fait Bryan – il dessine trop bien ! – et des vaisseaux comme dans le jeu de mon crétin de frère (qui sera donc un méchant au début, gentil à la fin, on se réconcilie après disputes), Halo je crois, et puis Oblivion aussi, avec Tom Cruise. Y aura la même musique que dans Batman, celle de Zimmer, que j’aime trop depuis que j’ai vu Le Roi Lion ! Et puis tiens, puisqu’on parle de Batman, les méchants essaieront de gazer tout le monde. Comme les nazis, et comme le méchant de Batman Begins. Ce sera pas Gotham City, faut pas trop copier. Mettons … Chicago (c’est là qu’ils ont tourné le 2e Batman). Je crois que je tiens un truc, faut que j’écrive ça ! Après tout, je pourrais gagner de l’argent avec, ça vaut bien Harry Potter ! »

Dialogues prévisibles souvent, grotesques parfois (« - Vous me demandez la Lune » « - Je sais » « - Alors je peux le faire » ; d’ailleurs, espérance de vie du personnage mytho : dix minutes, foudroyé par le scénariste), suspenses dont on devine à chaque fois l’issue (comptes à rebours, balles qui ne tuent pas, blessures aggravées qui ne tuent pas plus, etc), musique sympathique mais plagiée sur celle de The Dark Knight, héroïne Barbie pas très jolie, aussi banale de caractère qu’elle est censée incarner la perfection, petit copain dans le rôle d’Action Man, blablas incessants (peu d’action, en fin de compte), et une cascade de petites incohérences scénaristiques et visuelles (M. méchant surveille Barbie depuis sa naissance, par caméras du futur de « ouf, » mais il ne peut l’entendre à trois mètres comploter contre lui avec un des hommes ; brushing sec d’Action Man qui reste impeccable après douche et crash de vaisseau) … Le spectacle se fait long. Le design inventif ne suffit pas à faire passer la pilule. Avec ça, seule Naomi Watts parvient à transmettre une seconde d’émotion, tandis que Miles Teller, révélation de Wiplash, essaie vainement de faire le clown.
Quant au discours, il peut se résumer en ces termes « Ok, l’eugénisme c’est mal, mais pourquoi ? » « - Parce que !  Ben parce que déjà, ça marche pas, si on te fait matheux, tu peux pas écrire de romans ! » « - Euh … Et que faire, maintenant ? » « - Arrêtez de diviser les gens en catégories, tous se retrouver égaux, semblables et libres dans la grande foule anonyme et sans Histoire de l’Humanité en paix ! ». Générique.