Fast and Furious 5

Film : Fast and Furious 5 (2011)

Réalisateur : Justin Li

Acteurs : Vin Diesel (Dom Toretto), Paul Walker (Brian O'Conner), Dwayne Johnson (Luke Hobbs), Jordana Brewster (Mia Toretto), Tyrese Gibson (Roman Pearce), Gal Gadot (Gisele Harabo), Elsa Pataky (Elena...

Durée : 02:10:00


Un film de bourrins pour bourrins, qui occulte entre les impressionnantes cascades la malice de ceux qui passent pour des héros.
Des gros bras et des grosses voitures, des filles, des filles dans des grosses voitures avec des armes... Bref le fantasme masculin cajolé, passé et repassé, dans la lignée des précédents. On notera d'ailleurs à la fin du générique le clin d'oeil au 2 fast 2 furious par l'apparition d'Eva Mendes, héroïne du deuxième opus. Justin Li, déjà réalisateur de Fast & Furious : Tokyo Drift (2006), Fast and Furious 4 (2009) et réalisateur du prochain Fast and Furious 6 remet le couvert avec Vin Diesel, routier de la série.

Les cascades, totalement irréalistes, sont très musclées,
et la quantité de tôle froissée est absolument astronomique. Quelques images de synthèse parfois particulièrement ratées viennent rendre possible ce qui, dans la réalité, tuerait l'homme le plus musclé en un instant. Les dialogues ont été manifestement conçus par le Yéti en partenariat avec un homme de Néanderthal, à destination de l'adolescent en mal de toute-puissance virile.


Sur le fond quelques sentiments nobles viennent agrémenter ce dernier opus. Mia, la sœur de Dominique est enceinte d'un bébé devant lequel tous les gros bras s'attendrissent, et un sentiment vaguement familial s'empare du groupe, bien moindre que ce qui est revendiqué par Justin Lin dans le dossier de presse : « La famille en est le
thème principal. Dans le quatrième volet, nous avons exploré la notion de sacrifice au sein d'une famille. Dans ce cinquième film, il est question de famille et de liberté. » Mais Dominique laisse quand même gagner son beau-frère dans une course parce qu'il est papa, ce qui semble être le sacrifice suprême pour un « appuyeur » de champignon !

Le personnage de Dwayne Johnson (Luke Hobbs) est également intéressant. Agent fédéral, il a une éthique personnelle très louable qui le conduit à continuer à traquer Dominique même si celui-ci lui a sauvé la vie. Ce sens du devoir en granit, qu'il est nécessairement plus raisonnable de suivre plutôt que les sentiments dont la fugacité est traîtresse, méritait donc d'être remarqué, d'autant plus qu'il s'agit d'une bande de voleurs criminels qu'on fait passer pour sympathiques. Ils ne cachent pas leur
détestation des policiers (« c'est tout ce qu'on déteste ! »), qu'ils tuent en masse pendant leurs courses-poursuites effrénées, mettent très gravement en danger les passants en faisant des courses pour un oui ou un non, volent comme si la méchanceté de leurs victimes étaient une excuse, etc. Le film a beau mettre en garde (à la fin du générique donc quand tout le monde est bien sorti de la salle) en signalant que les scènes du film ont été réalisées par des professionnels sur circuit et qu'il ne faut pas les reproduire, on sait combien la prudence des jeunes adultes est volatile.

Le producteur Neal H. Moritz fait pourtant une découverte. Il existe « un code moral et éthique très spécifique auquel ils se conforment sans déroger, que ce soit d'un côté ou de l'autre de la loi. » Il certes fréquent de confondre la morale et la loi. Peut-être
serait-il bon de rappeler aux chères têtes blondes la différence entre la loi positive et la loi naturelle. Cette dernière est inscrite dans les choses. Comme il est dans la nature du pommier de produire des pommes, il est dans la nature de l'homme d'avoir des sentiments : c'est la loi naturelle. La loi positive, quant à elle, est un corps de règles édicté par l'homme pour régir les rapports sociaux. Elle est cette loi à laquelle notre producteur fait allusion. Faut-il concevoir la morale comme issue d'abord de la loi positive, ou de la loi naturelle ? Autrement dit la loi positive définit-elle la morale (auquel cas par exemple un Parlement pourrait rendre le meurtre immoral ou non), ou cette dernière résulte-t-elle de la loi naturelle ? La confiance et la loyauté sont inscrites dans la nature de l'homme. Non que tout homme soit honnête et loyal, mais aucune société humaine ne peut prospérer sans la confiance, c'est une loi naturelle. Que la loi positive l'accepte ou non importe peu, cest un fait. Il est donc parfaitement logique, comme l'affirme notre réalisateur, qu'il existe une morale en dehors de la loi positive. Pour autant, la loi positive n'est pas mauvaise. Il est normal qu'elle protège cette loi naturelle en interdisant le vol par exemple, appropriation injustifiée qui met sérieusement à mal la confiance entre les individus. Et c'est là que le bât blesse car le groupe, s'il respecte un certain code moral, enfreint la loi positive de façon inadmissible.

Le film essaie d'excuser les méfaits de nos compères en mettant face à eux des personnes très vilaines, certes moins vilaines que les méchants des précédents opus, qui rivalisaient de sadisme, mais de gros affreux quand même, qui méritent ce qu'ils subissent. Les policiers sont donc véreux, la cible du casse est LE gros vilain de Rio, et les guérilleros massacrés par dizaines dans la
bataille ne sont pas d'angéliques enfants de coeur.

Pour autant est-ce suffisant ? Le vol est un vol, puisque cet argent ne leur appartient pas. On n'est même pas sûr que le caïd de la pègre l'ait volé. On sait juste qu'il l'utilise mal (corruption de la police), mais si l'on devait voler l'argent de tous ceux qui l'utilisent mal, ce serait bien vite le chaos !

Les tueries sont bel et bien des meurtres, et derrière chaque homme qui tombe c'est un mari, un père, un frère ou un fils qui disparaît.

Les courses-poursuites sont des mises en danger hallucinantes du reste de la
population, dommages collatéraux d'une bataille injuste menée par des meurtriers contre des corrompus pour l'amour des billets.

Cet appât du gain, qui semble être le seul leitmotiv de l'équipe (malgré une tirade ridicule de Vin Diesel qui explique que « le blé ça va, ça vient » mais que l'important, c'est tous ceux qui sont autour de lui), est d'ailleurs minutieusement décortiqué puisque non seulement les lascars vont réussir leur casse, mais le film s'appesantit aussi sur l'utilisation qu'ils font de leur trésor : des grosses voitures, des filles, des filles dans des grosses voitures... On en revient toujours là...


face="Cambo,arial,helvetica,sans-serif" size="2">Raphaël Jodeau