Harry Potter et les reliques de la mort - partie 2

Film : Harry Potter et les reliques de la mort - partie 2 (2010)

Réalisateur : David Yates

Acteurs : Daniel Radcliffe (Harry Potter), Rupert Grint (Ron Weasley), Emma Watson (Hermione Granger), Ralph Fiennes (Lord Voldemort), Alan Rickman (Severus Rogue), Tom Felton (Drago Malefoy) .

Durée : 02:10:00


une fin ton sur ton pour la saga des Harry Potter glauque et remarquablement réalisée.
Ça y est, la saga des Harry Potter est terminée ! Deux épisodes visant à faire durer le plaisir, et surtout les rentrées d'argent, avec un dernier opus
qui clos la saga Potter. Les fans en seront pour leurs frais : fini le beau lunetteux bien plus malin que tous les adultes réunis, choisi par le destin pour sauver l'humanité et le reste ! Cet enfant extraordinaire, dont la vie publique aura été si riche, qui aura porté le poids du mal sur ses épaules jusqu'au sacrifice suprême de sa vie, après avoir été consolé par des esprits dans un endroit reculé, avant de vaincre la mort pour sauver les pauvres mortels (dites-donc, ça vous rappelle rien ?), cet enfant extraordinaire là, vous dis-je, tire sa révérence et désertera les écrans de cinéma sous peu. Finis les sorciers, les serpents, les rituels, les formules, la magie noire, blanche, rouge, verte à pois roses, la grande école de sorcellerie, les coups tordus, les torrents d'hémoglobine, les flashs monstrueux aux hurlements de dinosaures torturés, les jetées éperdues aux coeurs des situations les plus dangereuses imaginables avec le moins de garanties possible, les gros méchants verts sans nez
aux dents entartrées et aux animaux de compagnie suspects, les séances de spiritisme, les gentils qui ont l'air méchants... Ron et Hermione pointent aux assedics.

On avait pris l'habitude de les voir souffrir, nos trois héros, bien installés dans nos fauteuils, la bouche armée de maïs croustillants. Et plus ils en prenaient, dans leur bocal où la lumière n'est qu'un accident, plus on en redemandait. C'était... magique !

Que dire, donc, de ce dernier film ? Que les décors sont d'une plastique invariablement glaciale ? Que les effets spéciaux sont absolument spectaculaires ? Que les acteurs sont remarquables ? Au bout du huitième épisode, le constat serait redondant.

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Mais cet épisode a le mérite (insigne !) de clore l'épopée. Comme dans le livre afférent, il s'agissait donc d'abord de régler les affaires amoureuses. Comme l'affirme J.K. Rowling, « le pouvoir de l’amour est un thème fort qu’on retrouve dans les livres et les films. » Pour ne pas déflorer l'intrigue (faute impardonnable!), on ne révélera donc pas que Ron et Hermione se font des bécots en se tenant la main, et que Harry et Ginny accompagnent leurs mignons petits sorciers à l'école. Sauf si vous êtes un veau qui va au cinéma sans jamais réfléchir (ce qui est formellement impossible puisque vous lisez régulièrement L'écran !),
vous vous êtes forcément demandé si le fait d'embrasser à la pelle de jolis partenaires du sexe opposé sous couvert d'interprétation cinématographique était un comportement si normal. Hé bien pas du tout ! Pour Rupert Grint, en effet, « Emma et moi nous nous connaissons depuis toujours et je me disais que ce serait bizarre. Sans vouloir offenser Emma, qui est évidemment très jolie, mais c’est juste que j’avais du mal à m’imaginer en train de l’embrasser. Plus j’y pensais, plus ça m’angoissait. » Dans le « show-biz, » on peut toujours compter sur quelqu'un pour donner bonne conscience. Cette fois, David Yates s'y est collé : « Je leur ai dit de se débarrasser de Rupert et Emma et d’entrer complètement dans les personnages de Ron et Hermione. Ils se sont totalement investis, et ce fut magnifique... vraiment génial. » Mais à écouter sa jeune actrice, cette fichue nature humaine s'obstine : « si vous avez grandi avec quelqu’un que vous considérez comme un frère et que vous vous trouvez dans une situation où il faut l’embrasser comme on embrasse un amoureux, ça fait drôle » (Emma Watson).


Comme on le devine, cependant, tout finit bien à Poudlard. L'école renaît des cendres d'une terrible bataille contre Voldemort, dont le professeur McGonagall prononce enfin le nom sans trembler, et le monde se remet à tourner correctement (nos voisins galactiques envisageaient de porter plainte pour tapage spatial).


Harry garde sa tête de premier de la classe mais gagne en assurance. «  Si c’est le même personnage tout au long de la saga, Harry – comme tout un chacun – a beaucoup changé au fil des années. Du coup, j’ai essayé de me renouveler à chaque film et de mettre en avant des traits de caractère différents ». (Daniel Radcliffe) Il est effectivement plus mûr, plus mature, et réfléchit un peu avant de... commettre les mêmes imprudences grâce auxquelles, bien entendu, il accomplit sa quête. Il négocie même avec un gobelin, notre grand garçon qui, il n'y a pas si longtemps, se cognait dans les murs des gares ! Il était un ami, il devient un meneur. Voldemort a beau vouer ses
alliés aux gémonies, personne ne le livrera. Il est le porteur d'espoir, dans ce monde d'une obscurité déprimante, et cet aspect est très bien rendu, non seulement par le jeu des acteurs mais également par les costumes, puisque les plus observateurs auront noté qu'Harry et ses amis portent des habits dont les couleurs contrastent avec l'austérité des autres.


Alors qu'ils avaient la part belle dans la première partie (« il y a plusieurs formes d’amour dans cette histoire, mais c’est l’amitié qui me semble la plus marquante à l’écran, » déclare J.K. Rowling), Hermione et Ron sont un peu plus en retrait. Non pas qu'
ils soient plus inutiles qu'une baguette magique de chez Téfal, bien au contraire, mais les projecteurs sont davantage concentrés sur Harry et sur quelques personnages secondaires que les autres épisodes avaient mésestimés. Ainsi le discret Neville et la timide Luna, par exemple, montrent-il des talents inattendus.


Dans le camp des gentils, les adultes sont plus niais que jamais. Pour Daniel Radcliffe « depuis quelques épisodes, la confiance est un thème qui revient constamment » En fait, à en croire les réactions d'Harry, la confiance est
mise à mal depuis
bien plus tôt (dès le premier opus) puisqu'il défie continuellement la confiance des adultes, souvent à juste titre malheureusement. Comme dans les autres épisodes, ils conseillent, mais s'engagent cette fois un peu plus dans la bagarre, non sans avoir demandé à Harry ce qu'ils devaient faire, bien entendu !

Point n'est besoin de s'étendre indéfiniment sur le monde de la sorcellerie, maintes fois étudié dans les précédents articles de L'écran. Il sera plus intéressant de noter quelques similitudes techniques et éthiques avec le Seigneur des anneaux et sa dynastie.
Ainsi la bataille finale est-elle peuplée de créatures étrangement familières, dont une sorte de troll géant. Harry doit également renoncer à la toute-puissance que lui procurerait la fameuse baguette de sureau, qu'il finit par casser péniblement (le geste est involontairement comique !) en deux morceaux qu'il lance dans un précipice. Son copain Ron se serait bien laissé tenter, lui.

Quant à Albus Dumbledore, que les fans avaient vu mourir la larme à l'oeil, il s'avère en fait que son casier n'est pas si vierge que ça. « Ce qui m’a vraiment intéressé dans cette histoire, c’est que la frontière entre le bien et le mal est ténue et que certains personnages sont bien plus complexes qu’à première vue », déclare David Yates. A en croire le film, il
aurait ainsi laissé grandir Harry pour mieux le laisser mourir, puisque le jeune héros porte en lui un « morceau » de Voldemort qui doit être détruit pour en finir. Pour une raison que le film n'explique pas assez, malgré une rencontre longuette dans un lieu qui pourrait passer pour un monde entre celui des morts et celui des vivants, il semblerait pourtant que ce soit un chic type. «Harry a choisi de faire confiance au Dumbledore qu’il a toujours connu, à cet homme en qui il a cru et qui ne l’a jamais déçu », indique David Barron. « Dumbledore lui a confié une mission décisive, qu’il doit accomplir quels qu’en soient les risques, et Harry doit désormais s’en acquitter ». Pas rancunier le Harry !

On retrouve le même type de problématique pour Rogue. « Pour y parvenir, il fallait que la saga donne matière à réflexion : comment distinguer entre ce qui est juste et ce qui ne l’est pas ? À qui peut-on faire confiance et de qui doit-on se méfier ? Que faut-il entendre par courage ou loyauté ? Tous ces thèmes y sont abordés. » (Alan Rickman, alias Rogue,) Toujours dans ce souci inébranlable de ne rien dévoiler du film, nous ne révélerons donc pas qu'il est en fait gentil. A l'invitation d'Alan Rickman, nous nous poserons cependant la question pas si bête de savoir si le fait d'être infiltré dans le camp du mal justifie qu'on laisse de grands maux se perpétrer sans rien faire. En effet Rogue, en tant que dirigeant de Poudlard (l'école de sorcellerie) est responsable du bien-être des élèves. Or on apprend qu'il est au contraire un bourreau. Pour ne pas « griller&
nbsp;» sa couverture ? L'intention est bonne mais le mal est là, ce mal incarné par Voldemort.

Ce dernier est en effet LE grand méchant de la saga. Même J.K. Rowling, si tolérante à l'égard des bévues d'Harry, ne lui fait aucun cadeau : « Tous les personnages, y compris Harry, ont des défauts » observe l’écrivain. « Personne n’est tout blanc ou tout noir – à l’exception de Voldemort. Il incarne le mal absolu : rien ne peut le racheter. » Il est accompagné partout d'un gros serpent qui rappelle furieusement les daemons de Philipp Pulman (A la croisée des mondes, 1995-2002, lui même adapté au cinéma dans A la croisée des mondes : la boussole d'or >, de Chris Weitz en 2007)

En effet, d'après l'interprète de Voldemort, Ralph Fiennes, « leur relation est sans doute la plus intime qu’il ait jamais eue avec quelqu’un, comme s’il s’agissait de son alter ego. »


Autour de ces aventures humaines, l'imagination est toujours au rendez-vous. Même si le coup de la pierre de résurrection, quant à lui, laisse à désirer en terme d'
originalité. Il faut reconnaître à JK Rowling un certain talent pour imaginer des situations intéressantes, comme ce maléfice consistant à démultiplier tout objet que touche l'infortunée victime.


Raphaël Jodeau