Joy

Film : Joy (2015)

Réalisateur : David O. Russell

Acteurs : Jennifer Lawrence (Joy Mangano), Robert De Niro (Le père de Joy), Bradley Cooper (Neil Walker), Edgar Ramírez (Tony Miranne)

Durée : 02:03:00


Étrangement méconnu du grand public, mais guetté par la critique, surtout en période d’Oscars, David O. Russel est l’un des réalisateurs les plus en vogue des dix dernières années, surtout depuis son documentaire Uncovered : tout sur la guerre d’Irak, et ses trois derniers films The Fighter, Happiness Therapy et American Bluff qui cumulèrent 25 nominations aux Oscars. Avec son dernier film, il remet au goût du jour la question : un auteur peut-il être à la hauteur de son propre travail ?

Joy contient tout ce qui fait le style si percutant envoûtant de son réalisateur. Une pression évidente mise sur les acteurs, un montage tout en mouvement et rythme, et des plans iconiques comme le traveling arrière sur un personnage qui marche (souvent en colère). Tout ceci se rapporte à ce qu’il aime filmer : la réalité dans un style sec. Il aime les gens qui se réparent, qui sont bancals. Il film le déséquilibre : dans les relations ou à l’intérieur même des personnes. Il met donc en scène les crises de nerfs, de larmes, de couple, de travail. Il aime filmer la dispute, l’arnaque, la trahison, la misère. Voilà pourquoi le personnage de Joy, mère seule qui porte tout son entourage sur les épaules, mais bien décidée à affronter tout le monde pour devenir une véritable chef de clan représente l’essence du personnage Russelien.

Néanmoins, le filme pèche sur les fondamentaux. Le rythme est très mal choisi. Après trois quart d’heure d’introduction – David O Russel s’y étend car elle contient tout ce qu’il aime filmer – le courage manque au spectateur de bien profiter du reste. Et c’est dommage car ce n’est pas mauvais. Ca n’est simplement pas à la hauteur. Les jeux d’acteurs, en dehors de Jennifer Lawrence, sont très décevants, Robert de Niro est en roue libre, sa compagne surjoue complètement, et Bradley Cooper, se fait voler l’occasion d’un joli rôle par manque de temps à l’écran, et par défaut d’écriture : il ne peut exprimer son talent dans un personnage aussi unidimensionnel. Et la musique, d’habitude si « cool » chez Russel, adepte des bons rocks et des tubes pop contemporains à l’action de ses films, est ici peu engageante.

Vendu sur un argument féministe, le film est en fait plus fin que ça. Il parvient à faire de son héroïne non pas une féministe récriminant hurlant au sexisme à chaque échec, mais une femme guidée tant par ses instincts de mère que par ses ambitions personnelles dans un milieu hostile. Bien sûr, le machisme est un obstacle de taille à la quête de l’héroïne, mais il n’est pas traité de manière polémique. Cette finesse est donc malgré tout, pour ce film décevant à de nombreux points de vue, le plus gros atout de ce film toutefois distrayant.