Révélé à Cannes, La Chasse a vu son acteur principal, Mads Mikkelsen, y remporter le Prix d’Interprétation Masculine. Poignant, le film s’attache à une impitoyable déconstruction de la société, accompagnée d’un regard sévère et pessimiste sur la lutte entre mensonge et vérité. Lucas, le rôle principal du film, se voit en effet accusé d’abus sexuel par un enfant. La rumeur se répand comme une traînée de poudre au sein de la petite communauté, dans laquelle le héros était pourtant si estimé et intégré.

Le réalisateur s’acharne à détailler une féroce chasse aux sorcières, et insiste sur la violence et l’isolement nés de la désagrégation des liens sociaux. Vinterberg s’embarque en effet dans une démonstration inéluctable des ravages de la rumeur. Les mots accusateurs de l’enfant-roi font mouche, puisqu’ils touchent directement à un des plus grands tabous de la société actuelle (illustré par l’affaire d’Outreau). Et l’adulte risque le lynchage, affaibli par sa confiance en une société et une justice qui auraient dû rester équitables et prévenir les ravages de la calomnie.

Si La Chasse se distingue par l’audace de ses thèmes, la réalisation est elle aussi ambitieuse, mais imparfaite. Mads Mikkelsen n’a pas volé son prix d’Interprétation, mais la peinture de ses accusateurs est grossière. Il n’y a là qu’un ramassis de brutes épaisses, prompts au jugement et à la violence. Et le rythme soutenu de l’action ne laisse place ni à l’ennui, ni au questionnement, alors qu’au fond, La Chasse tombe dans le manichéisme, et ne fait qu’effleurer la responsabilité de la société et de la justice, tout en dressant un constat vérifié mais peu nuancé des ravages de la rumeur.