La Confession

Film : La Confession (2015)

Réalisateur : Nicolas Boukhrief

Acteurs : Romain Duris (Père Léon Morin), Marine Vacth (Barny), Anne Le Ny (Christine Sangredin), Solène Rigot (Marion Lamiral)

Durée : 01:56:00


Dans un village perdu sous l’Occupation, une femme plonge dans un confessionnal et lance au jeune nouveau curé : « la religion est l’opium du peuple ». Bon, c’était plutôt la phrase du livre autobiographique de Béatrice Beck, et celle de la première adaptation, Léon Morin, prêtre (de Melville, 1961, avec Belmondo notamment). Le confesseur sait quoi répondre, avec une efficacité redoutable. Ça passait dans un film des années 60. Ressortir intacts les dialogues laissés par Beck elle-même relève de l’exploit dans un contexte autrement plus hostile envers le clergé, catholique s’entend. 

 

Deux esprits s’affrontent : le berger tentant de rameuter la brebis, la « tête de mule » comme il l’appelle franchement une fois la glace brisée. Le premier ne veut pas prouver l’existence de Dieu à la seconde : il veut arranger une rencontre entre elle et le divin Patron. Mais ce qu’il peut prouver tout de même, c’est qu’un curé peut être diplomate, pur, zélé, nuancé, généreux, qu’il peut protéger des juifs etc. Les idées reçues de notre charmante époque, toujours très douée pour certains amalgames, sont dynamitées les unes après les autres. 

 

Sous le charme, la jeune femme se demande si elle est attirée par les charmes de la foi, ou de son messager… Problème des prêtres réellement alter Christus, on finit parfois par ne plus savoir si c’est l’incarnation de ce message mystérieux qu’est la foi, ou ce message même, qui fascine. Si la question a de quoi être posée, il n’en demeure pas moins que les discussions entre les deux personnages à ce sujet ont le mérite d’être approfondies, classiques, au sens du terme où le spectateur d’aujourd’hui peut aussi bien être concerné par la tournure de ces raisonnements que les personnages des années 1940. Cette femme qui se jette dans le confessionnal pour déstabiliser le discours de la religion, c’est une sacrée bonne partie de la salle. Classiques donc, objectifs aussi : si le prêtre a une certaine psychologie et sait comment faire durer le dialogue avec cette femme, il faut reconnaître que son discours ne date pas d’hier. Il ne fait que parler la langue de son interlocutrice, afin d’être compris, jouant quelque peu sur l’esprit contestataire de celle-ci. 

 

Barny, femme abandonnée des hommes, est une chercheuse d’amour. Son mari est sur le front, ses chances de le retrouver sont minces. Sa quête semble vouée à enchaîner les échecs : son époux est lointain, qu’il est dur de l’aimer ! Puis comment aimer Sabine, une femme ? Comment s’attacher à un prêtre ? Mais comment mieux tomber, évidemment, quand on croise un homme qui propose non pas son amour, mais l’Amour ? 

Destiné à dresser le portrait d’une femme, changeant pour cela le titre originel Léon Morin, prêtre en La Confession, le film en réalité trouve davantage sa richesse dans le portrait de l’homme, aidé par le jeu trop monotone (mono tono n’est-ce pas) de Marine Vacth (Barny bien sûr), mais aussi par la prestation très réussie de Romain Duris en prêtre, profond, imperturbable, qui réussit à rendre audible la doctrine que « les hommes ne voudront plus entendre » (Timothée, 4, 3). 

 

Pas toujours tendre avec certains personnages ouvertement catholiques, comme pour compenser la louange faite au curé, La Confession réussit tout de même le tour de force de livrer à notre époque un message chrétien et une image du prêtre devenue bien rare (il y en a encore : Elefante blanco, La Mante religieuse…). L’histoire inspire sur la force de l’engagement, et les montagnes que soulève l’amour, montagnes pesant sur tant de gens acerbes envers une religion qu’ils méconnaissent, et dont le film confesse les belles œuvres.