La Dame dans l'auto avec des lunettes et un fusil

Film : La Dame dans l'auto avec des lunettes et un fusil (2015)

Réalisateur : Joann Sfar

Acteurs : Freya Mavor (Dany), Benjamin Biolay (Michel Caravaille), Stacy Martin (Anita)

Durée : 01:33:00


Joann Sfarr, c'est Le chat du Rabbin (adaptation d'une bande-dessinée dont il était le dessinateur) et Gainsbourg : vie héroïque, c'est Charlie Hebdo, où il tint une page pendant un an. Joann Sfarr c’est l'ex-étudiant en philosophie et ce juif mi-ashkénaze mi-séfarade qui affirme crâneur à Télérama : « J'adore les juifs et les musulmans, mais la religion, ça m'emmerde. » (2011)

C'est à ce garçon éclectique que Gilles Marchand et Patrick Godeau ont décidé de confier l'adaptation largement élaguée du roman éponyme de feu Jean-Baptiste Rossi, alias Sébastien Japrisot.

Incontestablement inscrit dans la veine hitchcockienne, le film emprunte sans complexe à différents genres. Thriller par son caractère énigmatique et anxiogène, il marche sur la frontière du film noir en se focalisant sur le destin de la victime et confine presque au road-movie, dans ce périple psychédélique entre Orly et Nice.

Si l'histoire est campée dans les années 70, c'est bien les films des années 50 (le spectre hitchcockien resurgit) que le réalisateur ressuscite en misant gros sur la sensualité de l'écossaise Freya Mavor, découverte dans la série Skins. Entre femme fatale et ingénue, la jeune actrice révélée par Pierre Niney sur Canal + vend de la fièvre à gogo. Les plans sont serrés, les jupes très, mais vraiment très courtes, l'esthétisme très léché et l'intrigue alléchante. Quelques flashes érotiques saupoudrés sur le tout achèveront de donner au résultat final sa couleur naturelle.

Mais ce qui devait arriver arriva. A force de miser sur la forme, le film vend tant de rêve au spectateur que celui-ci déchante au dénouement d'une intrigue finalement trop simple. Dégoulinante de sensualité, la pellicule trahit l'espoir du feu d'artifice annoncé. À la fausse sobriété du savoir-faire hitchcockien la fausse sobriété du fond seyait à ravir, mais avec la réalisation baroque de Sfarr ne pouvait s'acoquiner qu'un épilogue baroque. Même indépendamment des considérations éthiques, l'œuvre déroute et rate son final.