La Ruée vers l'art

Film : La Ruée vers l'art (2013)

Réalisateur : Marianne Lamour

Acteurs :

Durée : 01:26:00


Le 16 octobre sortait au cinéma un documentaire de Marianne Lamour intitulé « La ruée vers l'art » et enquêtant dans les coulisses de l'art contemporain. Beaux-Arts Magazine (comprendre « Anart Magazine ») et Rue89, pour ne citer qu'eux, s'énervent à tel point sur ce documentaire qu'on ne saurait y rester insensible.

Pourquoi, en effet, une telle vindicte ?

Cette réaction est si surprenante que, de l'aveu de tous, l'art dit « contemporain » est pourtant depuis longtemps aux abois. Seules quelques riches fortunes profitent d'un système dont le public se désintéresse complètement, à tel point qu'Aurélie Fillipetti est obligée (la pauvre !) d'aller bourrer le crâne de nos compatriotes ruraux avec son opération « un établissement, une œuvre. »

Placé depuis de nombreuses années sous perfusion, cet « art » fait donc si pâle figure qu'on dirait un macchabée, sur le dos duquel on continue néanmoins à faire de l'argent en faisant prendre son cadavre pour une momie respectable.

Et ce cadavre, quelques courageuses journalistes ont commis le crime d'aller le filmer. Nous voilà donc emmenés dans les coulisses de l'anart à la rencontre de quelques riches asticots souvent trop occupés à dévorer pour accorder un entretien à la caméra.

On ne saurait leur en vouloir. Quand on est au sommet de la pyramide, pourquoi perdre du temps à parler à de pauvres gens atteints de « bon-sens » (une sorte de maladie grave dont on a libéré les artistes au début du XXè siècle grâce à la découverte du grand scientartiste Marcel Duchamp) ?

Rien qu'à lire le titre de ce documentaire, on comprend le propos. Pas besoin d'être au Klondike pour rêver d'Eldorado. Ce qui caractérise les artistes en vogue aujourd'hui, ce n'est pas la pénurie d'inventivité (et il en faut pour faire « ça »), mais la relation extraordinairement fusionnelle qu'ils entretiennent avec le monde de la finance. Quoiqu'en dise cette chère Judith Benhamou-Huet, qui essaie à toute force de nous expliquer que l'objectif de l'art a toujours été l'argent, c'est bien cet art financier qui caractérise notre époque. Dès lors les deux journalistes ont choisi d'aborder le sujet par sa spécificité.

Est-ce un tort ? Probablement pas. Les Lamour and Co auraient pu plutôt s'extasier sur l'imagination des artistes, mais parler de créativité quand on parle d'art, c'est faire ce qui a toujours été fait, enfoncer une porte ouverte, accoucher d'une banalité... C'est probablement ce qu'auraient aimé les petits soldats de l'anart, histoire d'entretenir le mythe que la création est aujourd'hui la même que jadis, mais c'eût été parfaitement inutile.

Non... Ce documentaire ne devait pas être un nouveau fantasme d'intellectuel fumeux, mais une investigation journalistique, une enquête, sans concession.

Assez de fumisterie ! La base documentaire inhérente à ce genre de travail était heureusement solide. La tâche de Marianne Lamour consistait à donner un corps audiovisuel à l'excellent ouvrage Grands et petits secrets du monde de l'art, écrit par Danièle Granet et Michèle Lamour et publié en 2010 par Fayard. Un documentaire de 86 minutes ne saurait évidemment être aussi complet que le livre, mais il en constitue une synthèse claire et une propédeutique efficace. Malgré quelques approximations dans le cadrage ou l'utilisation de la focale, le résultat est donc très honorable et assez inédit.

On y apprend donc que la cote des œuvres est fabriquée, que la spéculation est reine, que les artistes ont pour principale préoccupation d'être remarqués par des financiers qui ne se contenteront pas, comme dans le passé, de les remarquer et de les enrichir, mais qui façonneront leur identité.

Cette plongée en eaux troubles est de plus parsemée d'entretiens de gens compétents qui, eux, ont accepté courageusement de témoigner de la réalité du métier. Espérons simplement qu'ils ne souffriront pas de leur effronterie (les soutiens de l'anart sont comme par hasard très souvent aux commandes de la presse).

Reste à connaître le devenir de ce documentaire. Les chaînes françaises le diffuseront-elles ? Quelques grands médias auront-ils l'effronterie d'en faire la promotion ?

Une seule chose est certaine. C'est le public qui décidera de son sort, et le public, c'est vous !

Faîtes donc connaître ce film, relayez-le dans vos réseaux, allez le voir et emmenez-y vos amis, car le premier pilier de l'anart, c'est l'ignorance du public...