Legend

Film : Legend (2015)

Réalisateur : Brian Helgeland

Acteurs : Tom Hardy (Reginald Kray / Ronald Kray), Emily Browning (Frances Shea), Paul Anderson (Albert Donoghue), Christopher Eccleston (Nipper Read)

Durée : 02:11:00


Grand scénariste hollywoodien (récompensé pour L.A. Confidential), habitué à travailler pour Tony et Ridley Scott, Paul Greengrass ou encore Clint Eastwood pour lequel il écrit le chef-d’œuvre Mystic River, Brian Helgeland mène aussi une carrière de réalisateur très tranquille. Sans s’imposer de rythme, il a réalisé six films entre 1996 et 2015, toujours sur des sujets très variés ; très attaché à soigner chacun de ses films.

En se proposant de tourner la biographie d’un gangster, Helgeland se soumet inévitablement à la comparaison avec ses confrères Scorsese et Coppola : les deux réformateurs du genre. De fait, Legend s’inscrit dans un héritage de Scorsese tout assumé, ce qui est assez dangereux. On recommande plutôt de faire neuf, que de se comparer aux princes. Une ouverture iconique avec voix off, élévation des héros (les Jumeaux Kay) sur un piédestal, musique rock et une pointe de cynisme : « it took a lot of love for me to hate him the way i do » (« Ca m’a demandé beaucoup d’amour de le haïr comme je le hais »). S’ensuit une histoire captivante et rondement bien menée, appuyée sur les gimmicks du genre (le patron qui punit son employé, les négociations qui dérapent, les tensions qui se résolvent en un éclat de rire…) et dans un style enjoué, violent, et rock’n roll.

Seule différence avec un Casino ou Les affranchis, le personnage féminin. L’histoire classique de la jeune fille qui tombe amoureuse du Prince aux affaires noires. Le pouvoir, l’élégance, la détermination fascine la petite banlieusarde, mais son destin, qui la rapproche de l’héroïne scorsesienne, diverge vers la fin pour donner au film un ton et un intérêt pour le moins novateur dans le genre.

ATTENTION RÉVÉLATIONS SUR LA FIN DU FILM – La désillusion, l’envie de voir son mari reprendre le droit chemin, la solitude — l’abandon —, et enfin la folie, les cachets… Tout y est jusqu’au dernier acte qui construit autour des personnages de Frances et Regginald Kay, un destin romantique. Le gangster revêt des atours plus humains. Il découvre la détresse après la puissance, l’absence après l’opulence, l’autodestruction après la gloire personnelle. Bref, il lâche prise sous le poids de l’amour et de la culpabilité. L’épouse de son côté, habille son ultime geste d’une grande symbolique : son suicide n’est pas un acte de folie, de dépression, ou encore moins de vengeance : elle se tue, car c’est le seul moyen pour elle d’aimer celui qu’elle hait.

FIN DES RÉVÉLATIONS

Notons de plus le génie de Tom Hardy qui joue les rôles des deux frères Kay. Au-delà de l’exploit technique, il faut remarquer le soin qu’il a mis à développer deux personnalités différentes. L’acteur interprète bien des jumeaux issus de la même souche, mais saisit dans son jeu ce que le temps, les choix personnels et les blessures peuvent avoir comme influence sur deux frères qui s’aiment. Tout ceci faisant de Legend un film à voir si l’on est amateur du genre, et pas trop rebuté par la violence et la perversion.