L'Etudiante et Monsieur Henri

Film : L'Etudiante et Monsieur Henri (2015)

Réalisateur : Ivan Calbérac

Acteurs : Claude Brasseur (Henri), Guillaume De Tonquédec (Paul), Noémie Schmidt (Constance), Frédérique Bel (Valérie)

Durée : 01:38:00


Enfin un film français et parisien débarrassé de bobos et de donneurs de leçons sur le racisme ! Messieurs Hollande et Sarkozy devront éviter cette comédie qui se réserve le droit de ne pas dispenser la haine des blancs, et dans laquelle on retrouve en toile de fond tous les symboles culturels de notre société chrétienne. On se réjouit donc du style très libre et enchanteur du réalisateur Ivan Calbérac pour raconter cette histoire de colocataires… originaux.

Dans le même style que Un peu, beaucoup, aveuglément de Clovis Cornillac (2015), on retrouve deux personnages aux goûts diamétralement opposés qui vont devoir cohabiter. Mais cette fois, l’histoire joue sur les contrastes puisque l’on a affaire à une jeune et séduisante étudiante arrivant de la province qui vient louer une chambre chez un vieil homme rabougri, rigide et austère. Débarrassé des bobos, Calbérac peut montrer les côtés difficiles de la vie parisienne, notamment pour les étudiants désargentés souvent confrontés à des loyers faramineux et à des propriétaires peu soucieux de leur confort. Il expose les tensions pouvant résulter de cette vie précaire poussant parfois certains jeunes à se prostituer pour honorer leur loyer (si, si). On y est presque, dans le cas de Constance, qui va devoir accepter le deal de son Monsieur Henri pour espérer rester dans la capitale. Sa mission ? Briser activement le couple de son fils un peu guimauve qu’il juge désastreux.

Sans choquer, et en flirtant avec une situation coincée entre l’état de nécessité et l’immoralité, le film se sert habilement du caractère insupportable du pathétique manipulateur Henri pour explorer des thèmes intéressants : la relation entre le père et le fils qui ne savent plus se communiquer leur amour que par la violence ; le courage de la jeune fille séduisante devant apprendre à écouter sa voix intérieure pour faire des choix et exister sans être manipulée ; les tourments de l’homme-guimauve incapable de réaliser que son affirmation pourrait lui rendre service ; le constat de l’homme déçu arrivé au bout de sa vie qui peut encore la changer s’il choisit de sortir de sa décrépitude.

Le trio d’acteurs Claude Brasseur, Guillaume de Tonquédec et Noémie Schmidt est bien accordé et suscite sans peine quelques éclats de rire, comme cette adaptation d’une pièce de théâtre pouvait le laisser espérer. La seule vraie fausse note réside dans la présence d’un quatrième personnage sensé représenter l’épouse chrétienne qui est bien évidemment l’incarnation de la tarte absolue : il faut croire que Béatrice de Montmirail (Les Visiteurs, 1993) a créé LE code de la femme catho. Cette façon de la montrer toujours sous le même angle caricatural – 22 ans plus tard ! – n’est finalement pas très innovante et constitue même une faute scénaristique : on ne voit que ses manières et pas sa personnalité propre. On ne sait pas qui elle est au fond d’elle-même. Elle n’a pas d’histoire. Dommage.

Sinon, les dialogues sont bien écrits, et le tout est filmé d’une façon très fluide. Une bande originale variée et agréable accompagne ce récit réaliste de vies à la fois ordinaires et peu anodines.