Live By Night

Film : Live By Night (2016)

Réalisateur : Ben Affleck

Acteurs : Ben Affleck (Joe Coughlin), Zoe Saldana (Graciella Suarez), Elle Fanning (Loretta Figgis), Sienna Miller (Emma Gould)

Durée : 02:09:00


Gone baby gone, The Town, Argo : Ben Affleck réalisateur n’avait jamais commis de faux-pas, et c’est peu de le dire, puisque le dernier des trois empocha, avec mérite, l’Oscar du Meilleur film (2013). 

Inspiré du monument de Sergio Leone Il était une fois en Amérique (1984), Ben, après avoir lancé la carrière déjà exceptionnelle de son petit frère Casey, a décidé de profiter de ses films pour se prendre sa revanche d’acteur. Insignifiant dans Argo, le film était si bon que personne ne lui en avait tenu rigueur. Mais ici, l’adaptation du roman éponyme de Dennis Lehane, pourtant plein de bons ingrédients, est clairement gâchée par son monolithique acteur et héros, trop essentiel dans l’histoire pour ne pas peser de sa belle gueule immuable. 

Pour installer un décor, des liens entre personnages, de belles images, il demeure toujours excellent. Son film installe une ambiance assez noire, exotique aussi. Passionné, Ben Affleck a voulu rendre hommage aux grands classiques du genre, et très sûr de son talent de metteur en scène, il s’est lancé avec beaucoup de confiance, et peu de recul. Son histoire commence banale, continue originalement, et s’achève banale. Trop sensible peut-être, il n’ose assumer la noirceur du genre. Pourtant, quand on évoque Il était une fois en Amérique, on se souvient de vrais crimes, et pas que des meurtres… 

Ben Affleck a de bonnes intentions : ses films tissent toujours des liens assez intéressants entre personnages, apporte à ces thrillers dans la forme le fond de véritables drames. C’était toute la réussite de The Town (2010), d’ailleurs, que beaucoup comparèrent pour cela à la référence du maître Michael Mann, Heat (1995). 

Gangster qui ne se veut pas tueur, comme si braquer une banque était tolérable, hors-la-loi depuis l’injustice perçue de la première guerre (l’intro du film à ce sujet s’avère d’ailleurs maladroite, évoquer ce passé décisif par simples dialogues aurait probablement été plus authentique, plus crédible et en tout cas plus fin), notre héros s’arrange avec sa conscience. 

Mais la justice étant un tout petit peu de ce monde, parfois, notamment dans le simple proverbe « bien mal acquis ne profite jamais », les événements le rattrapent. La rébellion est punie. Mais si cette justice immanente et patiente surtout, arrive par des scènes inattendues et fracassantes (la surprise fait tout, au cinéma !), il faut bien constater que la mélancolie qui devrait en découler est presque absente, alors que c’était le thème majeur du modèle, Il était une fois en Amérique : mauvaise idée de s’être comparé à ce géant !

Il faut être honnête, on en a pour son argent, et on se s’ennuie pas une seconde. Ben Affleck évite que la succession de péripéties tourne à l’indigestion, bien que la rareté d’éléments contemplatifs déçoive. La frustration est là : ambiance richement composée, musique sombre, personnages variés, beau casting (à part lui, quelque part !), tous les éléments étaient là pour sortir le grand film de mafia que les fans du genre attendent depuis Casino (1995), date où Scorsese fit survivre une dernière fois ce genre aux mythiques références. Mais Ben s’est pris pour Casey, et termine son œuvre d’une façon enfantine, surtout pour un film de grandes personnes. Les amateurs du Parrain et consort devront encore attendre…