Master & Commander : de l'autre côté du monde

Film : Master & Commander : de l'autre côté du monde (2003)

Réalisateur : Peter Weir

Acteurs : Russell Crowe (Le capitaine Jack Aubrey), Paul Bettany (Le docteur Stephen Maturin), Billy Boyd (Barrett Bonden), James d'Arcy (le lieutenant Thomas Pullings)

Durée : 02:14:00


Avec Master and Commander, Peter Weir signe son douzième film après le célèbre Cercle des Poètesdisparus et l’étonnant Truman Show. Cette fois, c’est en mer, à bord du HMS Surprise qu’il nous fait monter avec comme capitaine et seul maître à bord, Jack la Chance, l’excellent Russel Crowe.

Tout tourne autour de ce capitaine admiré et respecté par ses hommes. Meneur d’homme hors pair, en plus d’être un stratège futé, le capitaine indompté fait figure de chef. Et la caméra nous le montre comme tel ! Gros plan sur son regard décidé, panorama de la mer avec le capitaine sur le mât ou sur la proue du navire ! Son autorité ne repose ni sur le copinage avec les hommes ni sur la tyrannie. Il a su gagner le respect de ceux qu’il commande, « aimer ses hommes, mais sans le leur dire ». Sans ce respect, nulle autorité, nulle discipline. Et elles règnent à bord. S’il sait punir, il sait aussi encourager et récompenser. Et ces hommes, il pourrait les mener au bout du monde. Rien ne peut le faire dévier de sa mission. Il tente d’expliquer à un jeune lieutenant la règle de base de l’autorité : le but n’est pas de sympathiser avec les hommes, le but est de se faire respecter d’eux pour mieux remplir son rôle de chef. Mais le jeune lieutenant n’a pas les qualités requises et sombre dans le désespoir. À ses côtés, le jeune Lord Blakeney contraste. Jeune garçon courageux, maître de lui-même, soucieux des autres, c’est à lui que revient l’honneur de commander le navire pendant la dernière attaque et il est à la hauteur de sa mission. Il a l’âme et la trempe d’un chef et contrairement à son capitaine, l’orgueil ne guide pas son action.

Autre contraste du film, l’amitié entre le capitaine et le docteur Maturin. Tout oppose ce chef un peu trop confiant et trop obstiné à son médecin et ami de longue date étranger à la discipline militaire et assez loin de l’esprit marin… De leur confrontation naissent les meilleurs dialogues du film. Le médecin n’a pas tord de reprocher au capitaine son obstination et surtout ses motivations à poursuivre le navire ennemi. Parce que si Jack Lachance a reçu pour mission d’anéantir l’Aqueron, il met aussi beaucoup de fierté personnelle dans cette tâche, au détriment de ses hommes. Et c’est son médecin qui le lui fera réaliser. Le capitaine quant à lui expliquera à son ami l’art subtil de mener les hommes. Belle amitié que celle-là où chacun veut le bien de l’autre et tente de l’éclairer.

Russel Crowe est tout simplement excellent dans ce rôle qui lui a tout de suite plu d’ailleurs. C’est lui qui a recommandé Paul Bettany, remarquable en naturaliste sceptique, avec qui il avait partagé l’affiche d’Un homme d’exception deux ans plus tôt. Paul Bettany a été retenu parce qu’il était musicien. C’est dire si la musique tient une place importante dans le film. Absente des 25 premières minutes, elle n’en est que plus remarquée. Grandiose, elle accompagne les combats, joyeuse, elle exprime le repos des guerriers, grave, elle traduit le destin de ces quelques hommes au prise avec l’Aqueron, le froid, les vagues et pire, l’absence de vent… Les figurants jouant les membres de l’équipage ont été choisis avec soin. Weir voulait du réalisme. Et il y en a dans ses marins, dans leurs traits, dans leur attitude. Il y en a aussi dans les magnifiques batailles navales et dans les maquettes des frégates! Des effets spéciaux exceptionnels et sophistiqués ( au moins 750) contribuent à faire de ce film un chef-d’œuvre en matière de batailles navales! Par contre, dans le livre de Patrick O’Brian, le navire anglais guerroie contre une frégate américaine…

Véritable film sur la vie en mer, Master and Commander est aussi un film sur la vie en général. Il est riche en réflexions et donne des exemples de courage, d’amitié, de dépassement de soi. Il nous fait participer à la vie des hommes sur la mer et nous plonge au cœur de leurs choix déchirants : doit-on prendre le risque de perdre tout l’équipage pour sauver un seul homme? Cet homme est tombé à l'eau avec le mat du bateau. Or, si on ne coupe les cordes du mat très vite, il va faire chavirer tout le bateau. Le choix n’est pas très compliqué à faire, on sauve le bateau en coupant la corde. Malheureusement, un homme périt. Mais même son meilleur ami a compris que cette mort est un accident. On est loin du sentimentalisme : l'homme, le chef, prend une décision difficile mais raisonnable et responsable. Une telle scène peut être choquante pour les jeunes esprits mais elle a le mérite de pouvoir ouvrir la discussion sur ce qui fait la moralité d'une action. Vous retrouvez d'ailleurs un article de L'écran sur les cas de morale au cinéma.

En plus, des magnifiques images, du casting brillant, de la musique bien choisie, on apprécie Master and Commander pour les combats navals et entre autres, pour les différentes stratégies d’attaque et les manœuvres rusées . Jack Lachance connaissait-il Barbe-Rouge?