Mistress America

Film : Mistress America (2015)

Réalisateur : Noah Baumbach

Acteurs : Greta Gerwig (Brooke), Lola Kirke (Tracy), Matthew Shear (Tony), Heather Lind (Mamie-Claire)

Durée : 01:24:00


Mistress America est un de ces films qu'on rêverait de ne pas voir et qu'on ne regrette pas d'avoir vu (je vous laisse quelques minutes pour méditer cette phrase hautement méditative, voire contemplative).

Ce nouveau film de Noah Baumbach, ici scénariste et réalisateur, tient en effet des promesses qu'il ne faisait pas (bon allez d'accord j'arrête, c'est lourd!).

Intelligemment construit sur une mise en abîme, le scénario raconte l'histoire de Tracy, laquelle écrit précisément cette histoire dans une nouvelle qu'elle compte soumettre à un club littéraire qu'elle convoite.

Le script peut parfois dérouter par la longueur de ses scènes psychologiques, mais celles-ci sont absolument nécessaires pour donner de la profondeur aux personnages. D'ailleurs, disons-le, le film n'a aucun intérêt sans son analyse des caractères.

Tracy écrit son histoire, elle est au centre du film, mais ce n'est pourtant pas elle qui en est l'héroïne. Sans débat possible, Mistress America désigne Brooke, incarnée par Greta Gerwig qui collabore ainsi pour la deuxième fois avec Baumbach, une jeune fille qui incarne le rêve américain vu de façon hyper réaliste (et même cynique si le réalisme et le cynisme étaient compatibles).

Toujours pleine d'idées, Brooke est une trentenaire qui croque la vie à pleines dents, se pète une incisive et en déduit encore qu'elle a de la chance et qu'elle va rebondir.

Cette disposition d'esprit fascine totalement son entourage (dont Tracy, évidemment), à l'instar de Dany, un ami qui a réussi en affaire et la reçoit chez elle pour écouter son inénarrable projet de restaurant. Cette scène donne naissance à un passage d'une tendresse vraiment extraordinaire. Tellement d'ailleurs que je ne résiste pas à l'envie de vous en servir les préliminaires.

Car Dany sait, comprend, que ce projet pour lequel Tracy vient lui demander de l'argent est une chimère. Mais en véritable ami, il va aider Brooke d'une façon totalement inattendue et que je vous laisse découvrir. Disons simplement que sous ses airs de fumeur de joint (et il n'en a pas que l'air), il démontre un comportement « classe, » très classe…

Au service de cette intrigue, un casting efficace qui sait combler la surprise d'un scénario très linéaire, très chronologique et parfois un peu déroutant, justifié par l'existence d'une jeune fille naviguant sur le cours de sa vie comme sur un fleuve tumultueux.

Si l'on voulait faire une analogie, on pourrait même dire que la vie de Brooke est un road-movie psychologique, au bout duquel elle va découvrir sa nature profonde et même l'assumer…

Un film intéressant, qui fait du bien là où ça réfléchit, et qui mérite d'être recommandé à ceux qui n'ont pas froid aux yeux.

Que faire quand on a la possibilité de réussir mais qu'on n'en a pas les moyens ? Voilà l'étrange question qui constitue le cœur même du film...