Noirceur facile

Film : Paranoïa (2018)

Réalisateur : Steven Soderbergh

Acteurs : Claire Foy (Sawyer Valentini), Joshua Leonard (David Strine), Jay Pharoah (Nate Hoffman), Juno Temple (Violet), Aimee Mullins (Ashley Brighterhouse), Amy Irving (Angela Valentini), Zach Cherry (Denis...

Durée : 1h 37m


Le titre original cultive l'ambiguïté, Unsane... En revanche, le titre français se focalise sur une petite partie du sujet, l'éventuelle paranoïa de l'héroïne. 
Or, le film va bien au-delà de cette interrogation basique, et vire en huis clos étouffant où la folie semble pouvoir germer chez n'importe qui. Il pose la question même de ce qui nous fait différencier le fou de la personne saine, loin d'être évidente... 

Malgré une montée finale aux indéniables qualités théâtrales (mise en scène et acting), les péripéties deviennent si noires, tordues et perverses qu'on en vient à se demander si Soderbergh, obsédé par la santé, les maladies et l'industrie médicale, ne ferait pas mieux de se reposer et d'avaler un peu d'Ignatia. 

L'inspiration photographique (filmé avec un iPhone 7, intéressant sans être virtuose) et psychologique auraient mérité une inspiration moins facile. Imaginer l'odieux, rien de plus simple ! D'ailleurs, le réalisateur ne cache pas l'avantage budgétaire considérable qu'il a tiré de l'utilisation de portables plutôt que de caméras. Inspiration, ou flemme ? Un peu des deux : l'image s'avère superbement dérangeante, mais elle souffre de la taille d'un écran de cinéma ; idem pour le scénario, un tantinet tiré par les cheveux, et dépourvu du labyrinthe qu'on était en droit d'attendre. Formellement, l'exercice reste un véritable petit objet d'étude cinématographique, mais tant de noirceur nous fait sortir de l'illusion ; regrettable, pour un thriller psychologique, genre exigeant à tout prix l'immersion.