Nouveau genre : le Western lacrymogène !

Film : Hostiles (2017)

Réalisateur : Scott Cooper

Acteurs : Christian Bale (Captain Joseph J. Blocker), Rosamund Pike (Rosalie Quaid), Wes Studi (Yellow Hawk), Jesse Plemons (Lieutenant Rudy Kidder), Adam Beach (Black Hawk), Rory Cochrane (1st Sergeant Thomas...

Durée : 2h 7m


Pas facile de sortir un western en 2018, quand ce genre est en voie de disparition ! Open Range (Kevin Costner, 2003),  Le 3h10 pour Yuma (James Mangold, 2007), L'assassinat de Jesse James (Andrew Dominik, 2007), Australia (Baz Luhrmann, 2008), True Grit (Frères Coen, 2010) Django unchained (Tarantino, 2012), The Revenant (Inarritu, 2015), Les Huit Salopards (Tarantino, 2015), Brimstone (Koolhoven, 2016), Les 7 Mercenaires (Antoine Fuqua, 2016) : voilà en gros les dix westerns sortis sur nos écrans durant les 15 dernières années ! Ca fait pas beaucoup ! Vous me direz, c'est le principe du western, le mythe de l'attente d'un truc qui ne vient décidément pas et qui finit par se pointer... Pas facile en tout cas de proposer un western aujourd'hui, quand des monstres du cinéma comme Wayne ou Eastwood sont déjà passés par là en faisant une razzia. Le western par ailleurs a du mal à se renouveler car il n'aspire pas fondamentalement à la modernité. Il recherche la solitude, le dépaysement, la nature sauvage. Il peine à capter un public majoritairement abonné aux films "zappeurs" construits sur le bruit, la fulgurance, le second degré...

Malgré ces circonstances défavorables, le réalisateur de Hostiles, Scott Cooper, parvient à tirer son épingle du jeu avec un film plutôt esthétique. Le scénario assez basique consiste à suivre le convoi du capitaine Blocker (Christian Bale) entre le Nouveau-Mexique et le Montana pour transférer le chef de guerre d'une tribu cheyenne en évitant l'assaut des Comanches. Il recueille sous sa protection une jeune femme (Rosamund Pike) dont la famille a été massacrée par ces Amérindiens. Rien de très nouveau sous le soleil ! Au gré d'une histoire au déroulement souvent illogique, l'auteur essaye de façonner son style en recourant au genre méditatif, s'épanchant sur l'insécurité de ces populations vivant dans le centre des Etats-Unis à la fin du XIXe siècle. Ceci dit, il verse parfois dans une interprétation psychologisante du western où certaines disparitions occasionnent des effusions de larmes, de longs discours sur la mort et des regards stoïques à n'en plus finir. Un petit couplet sur l'antiracisme pointe lui aussi le bout de son nez en faisant remarquer l'inutilité de la guérilla entre les Blancs et les Amérindiens, et la méchanceté des propriétaires terriens (eh bien oui, la Terre n'appartient-elle pas à tous ? c'est pas gentil de pas vouloir la partager !). Le rapport à la mort se veut plus poignant et plus réaliste que d'habitude. Sauf que le réalisateur se consacre tellement à la sensibilité de son capteur et de ses personnages, qu'il en oublie parfois la pertinence de son cheminement et le caractère somme toute assez banal de ce qu'il raconte pour un western. Autrement dit, il se serait cassé la figure du haut d'un canyon que ça ne nous aurait pas étonné plus que ça, tellement il ne fait pas gaffe où il marche avec sa caméra, obnubilé qu'il est par le regard (pourtant relativement apathique) de Christian Bale ! Ne serait-ce pas cette usure à l'origine de tant de pleurs ?

C'est ainsi, il faut bien se démarquer : entre les répliques à l'emporte-pièce de Wayne, les silences cultes de Eastwood, les chevauchées de Kirk Douglas maintes fois vues sous tous les angles, le style délirant limite caricatural de Tarantino... c'est pas facile de se trouver une place pour faire bronzette dans ce genre cinématographique !