Tale of Tales

Film : Tale of Tales (2014)

Réalisateur : Matteo Garrone

Acteurs : Salma Hayek (La Reine de Selvascura), Vincent Cassel (Le Roi de Roccaforte), Toby Jones (Le Roi d'Altomonte), John C. Reilly (Le Roi de Selvascura)

Durée : 02:16:00


Trois contes s’entremêlent, confondant dans une ambiance médiévale, superbes costumes et décors imaginatifs (enfin il ne faut pas chipoter sur les décalages d’époque entre eux : robe XVIIIe, village XIVe, scaphandre XIXe… vu que ce sont des contes, avec des créatures « merveilleuses », qu’importe).

Ce qui allait est dit.
Aviez-vous vu la bande-annonce ? Pensiez-vous qu’on vous pousserait devant le spectacle d’une reine qui dévore un cœur de monstre, d’un roi libidineux qui défenestre une vieille, de cette même vieille qui tête le sein d’une sorcière, et j’en passe ?

Il y en a qui aiment ça, qui vous le conseilleront. Après tout, dans les séries dont on ne prononce plus le nom pour ne pas se faire ficher « Père la Morale », on nous a habitué aux incestes, aux crimes odieux, aux trahisons, aux viols etc. Alors forcément, The Tale of Tales devient normal, presque sympathique. Le Seigneur des Anneaux va passer pour un Narnia, à force.

Sous le prétexte de fiction, le sang coule, les vêtements tombent (autant sur des pieds de 20 ans que de 80, petite différence avec ce qu’on a d’habitude), la peau s’arrache… On va devoir faire comme dans les avions un jour au cinéma : un sac de précaution sur le côté.

Les personnages sont étonnamment antipathiques, à croire que c’était voulu.
Relativisons l’horreur : après tout, en faisant un tour rapide de la mythologie grecque, on s’aperçoit qu’il y a des similitudes. Une femme incarnée en animal, deux jumeaux nés d’un monstre, une princesse condamnée à un mariage atroce (et presque drôle, pour le coup, involontairement)… Entre mythologie et contes médiévaux, on retrouve une inspiration certes étrange, ésotérique – cauchemardesque souvent – mais pas en soi haïssable ; question de recul peut-être.

Le problème est multiple : d’abord, contrairement aux fables chevaleresques et aux récits grecs, personne ne sert d’exemple, de modèle. De la princesse au paysan, tous sont médiocres.
Ensuite, ceux-ci entretiennent des rapports ambigus : les deux albinos, courageux certes, mais franchement creepy ; le roitelet et son insecte géant ; l’indifférence de la reine envers le roi mort (gros spoil ? vous saurez comme ça que le meilleur acteur se voit moins dans le film que dans les trailers)… Enfin, le film aime les situations gênantes, et se complaît dedans (on vous parlait d’une sorcière qui donne le sein à une p’tite vieille, notamment).

On n’en tire aucune leçon, aucune morale. The Tale of Tales est un tour dans les caves d’une imagination tordue. Ennuyeux parfois (on ne compte plus les transitions « plan panoramique sur château »), écœurant souvent, le film prouve malgré lui que le squelette d’un film n’est pas son ambiance, ni son rythme, mais son récit, ici décousu, et porté par de pénibles personnages. Si on aime avoir la nausée et se salir la mémoire, évidemment…