Under the Skin

Film : Under the Skin (2013)

Réalisateur : Jonathan Glazer

Acteurs :

Durée : 01:48:00


Under the Skin est presque raconté comme un film muet. La rareté des dialogues se fait remarquer. Malheureusement, la longueur des séquences aussi. Ce film est avant tout étrange. Quoi de plus normal pour une histoire d’extra-terrestre qui vient enlever des humains, me direz-vous ?

La forme est le point le plus important. Under the Skin est un exercice de style cinématographique. L’ambiance, noire, glauque et froide au possible, entoure un personnage féminin très silencieux. Aux plans ennuyeux dans la camionnette qu’elle conduit succèdent d’autres points de vue parfois très originaux, et même artistiquement géniaux.

Les auteurs du film n’ont pas hésité à filmer quelques séquences en caméra cachée, afin de capter de vraies expressions d’authentiques personnes, dans un large panel de situations : solitude, tristesse, désir, violence, déprime (pas très joyeux en effet) … Doit-on croire le réalisateur, qui prétend que certains dialogues entre Scarlett Johansson et des quidams sont de vrais échanges filmés à l’insu de ces derniers ?

Mais lorsque l’on privilégie ainsi la forme, on oublie parfois que le rythme en fait aussi partie. Et Under the Skin est long, traîne, longtemps, très longtemps … Un rythme contemplatif sans rien à contempler, à la façon détestable d’un Only God Forgives, que seuls quelques esthètes pédants parviennent à aimer … Or, le cinéma doit capter l’attention. Ici, heureusement, la part des interrogations sur les personnages, les lieux, le sens de l’histoire etc, permet de tenir à peu près. Encore faut-il être habitué. Ceux qui n’aiment pas trop le cinéma en ressortiront plus fâchés que jamais avec le 7e Art.

L’évolution du personnage est intéressante, mais contée de façon sommaire, assez superficielle, et surtout, trop tardivement. L’exposition dure plus de la moitié du film, l’élément perturbateur arrivant à une demi-heure de la fin. C’est bien trop tard pour éviter l’ennui, et laisser grimper la tension dramatique. J’ignore si le livre dont le film est tiré commence vraiment son intrigue aussi tard.

Under the Skin se veut moderne, presque abstrait parfois. La musique est également de la partie, à ce niveau, parfois jusqu’au bruyant … Du cinéma d’auteur comme on en voit rarement. Le talent original du réalisateur britannique Jonhatan Glazer est indéniable, mais il ferait mieux de se trouver des histoires plus consistantes. Il manie le mystère et l’étrangeté avec une certaine inspiration, en frôlant parfois le grotesque (l’exclamation amusée de quelques-uns de mes voisins le confirme). Quant à l’ennui, c’est vraiment le démon à éviter quand on réalise un film. La belle Scarlett n’y change pas grand-chose : une prestation réussie, certes, malgré un personnage qui impose la mono-expression, pas évident.

Pour filmer le réel, ce style est peut-être trop fou. Glazer devrait-il se pencher sur l’ésotérique, le rêve, ou la folie elle-même ? Il a déjà tâtonné en ce sens avec Birth. Toujours est-il qu’en attendant, il nous livre une histoire peu intéressante, étrange et particulièrement glauque, qui laisse sur sa faim. Avec un meilleur scénario, peut bien mieux faire !