Une vie entre deux océans

Film : Une vie entre deux océans (2016)

Réalisateur : Derek Cianfrance

Acteurs : Michael Fassbender (Tom Sherbourne), Alicia Vikander (Isabel Sherbourne), Rachel Weisz (Hannah Roennfeldt), Bryan Brown (Septimus Potts)

Durée : 02:13:00


Encore un film sur la première guerre mondiale, avec cette fois un frêle canot accostant sur le phare de Tom et d’Isabel, amoureusement éperdus au milieu de l’océan. Jusqu’à ce que le canot arrive, leur romance tournait à la routine un poil méditative, Tom passant ses journées à scruter l’horizon plat de la mer sans fin, Isabel déprimée de ne pas réussir à mettre au monde un enfant. Mais voilà, une barque arrive, avec à son bord… miracle, un nourrisson ! Et accessoirement un cadavre.

 

Certaines barques ne viennent pas toujours de la providence. Sauvée des eaux, la petite Lucy aurait pu être récupérée discrètement et se glisser ni vue ni connue dans les traces du célèbre patriarche, figure de l’espoir par excellence. Sauf que l’embarcation a évidemment été signalée et qu’un destin plutôt mitigé attend Lucy en chemin. Car Tom et son épouse se retrouvent devant un cas moral de force majeure : déclarer l’enfant à la préfecture maritime les priverait certainement d’une adoption aussi opportune qu’inespérée à cause de leur isolement ; ne pas le déclarer comblerait leur bonheur mais les conforterait dans une ignorance coupable quant à la survie éventuelle de la vraie mère.

 

L’écueil du cinéma romanesque

 

Tiré du bestseller éponyme de M.L. Stedman (2012) traduit en 35 langues, le film de Derek Cianfrance retrace évidemment les situations chamboulées des survivants du désastre mondial. Il montre utilement l’impact de cet événement sur des non-combattants rattrapés par les innombrables conséquences de la guerre. Cependant il s’étire en quelques longueurs regrettables à partir du moment où il s’attache à épier l’hystérie d’Isabel (Alicia Vikander, Mémoires de jeunesse, 2014), quasiment prête à couper en deux la petite Lucy pour ne pas être séparée d’elle. Pendant ce temps, le très hésitant Tom, loin de posséder la verve tranchante d’un Salomon, se terre dans un mutisme obscur saccadé par des décisions unilatérales.

 

Le film s’emballe pour des paysages idylliques ruisselant des larmes de l’incomplétude. Il est coupable d’un trop grand suivisme quant à l’écriture romanesque et oublie les efforts de mise en scène, se reposant un peu trop sur les mêmes panoramas. Comme quoi l’excès de fidélité à l’œuvre originale rend parfois la donne… trompeuse ! Y a rien à faire : film et roman, deux catégories à jamais distinctes ! A voir en période de déprime.