Your Name

Film : Your Name (2016)

Réalisateur : Makoto Shinkai

Acteurs :

Durée : 01:46:00


C’est toujours pareil, on ne sait complimenter un homme politique français sans le comparer à de Gaulle, un prodige musical sans évoquer Mozart ou un cassoulet sans parler de Maïté. Pour la critique française, tout aussi pavlovienne que ses cousins politologues, il est donc inimaginable de louer le dernier long-métrage de Makoto Shinkai sans ériger ce dernier en successeur de Miyazaki. Certes, le fondateur du studio Ghibli est le pionnier du grand cinéma d’animation japonais, et celui qui l’aura fait rayonner à l’international… En quelque sorte un Walter Disney d’outre-Pacifique (mince, voilà que je m’y mets) ! Mais il est trop réducteur de suggérer depuis notre bassesse, avec nos yeux grisés et nos esprits sans imagination, que tout ce qui beau est semblable.

Après son succès incontestable, toutes cultures et toutes tranches d’âge confondues, Your Name (une fois n’est pas coutume je vous épargnerai le titre original) n’a plus à faire ses preuves sur le plan technique. C’est une œuvre splendide, dans laquelle le dessin, toujours extrêmement précis chez Shinkai, n’en est pas lourd pour autant. La musique, imprégnée malgré tout du kitsch japonais, alterne les forte et les pianissimo avec justesse et (peut-être) un léger humour. Enfin le scénario allie la richesse du roman à la structure de la nouvelle. Seul le fond, du reste, laisse perplexe …

Une œuvre poétique, certes, mais dans sa forme. Et la tendance capilotractée de l’intrigue parvient en fait à masquer l’absence de profondeur du métrage. Ou du moins, on n’est jamais sûr qu’une idée naissante à la vue du film soit réellement une intention de l’auteur. D’aucun verront dans l’échange corporel une ode à la théorie du genre… Pourquoi ne pas se contenter d’une transcription du malaise réel qui habite chaque adolescent envers son corps. Le rejet que chacun des personnages fait de sa condition présente, de ses origines, de ses souffrances, n’est pas un propos politique ou universel à proprement parler, mais tout simplement une manifestation et une exploration de l’univers adolescent. De surcroit à l’époque actuelle. En effet la quête des personnages pour la survie, la possibilité de l’amour et le dépassement des certitudes passées n’est pas forcément révolutionnaire, mais peut surtout marquer l’affirmation du corps, du cœur et de l’esprit chez ces jeunes êtres.

Un poème initiatique donc, qu’il ne faut pas craindre de mettre entre toutes les mains, sans oublier de jeter à la poubelle les louanges convenues et récupératrices que vous pourrez trouver dans la presse.