Après avoir joué la bimbo, puis s’être distinguée dans des rôles plus fins comme Une vie volée ou L’Échange, Angelina Jolie a décidé en 2011 de passer derrière la caméra pour deux films de guerre (Au pays du sang et du miel et Invincible) et aujourd’hui Vue sur mer, un drame sentimental inspiré par le cinéma européen des années soixante. Les maîtres mots seront : lenteur, silence, tension (violence ?) et sensualité.
Malgré la lenteur, et l’apparente prétention du film, le jeu virtuose d’Angelina Jolie et (un peu moins) de Brad Pitt ainsi que la candeur de la réalisation durant le premier acte nous immergent dans une histoire intrigante. Le film parvient, au début, à nous faire rire de la situation tragique de ce couple incapable de communiquer. Il semblerait que le rire soit aussi la solution adoptée par les protagonistes pour se maintenir à distance de leurs problèmes – mais c’est un rire jaune et ironique. La distance, c’est aussi le talent qu’ont ses deux amputés de l’amour de ne jamais se croiser alors qu’ils sont exilés sur une île.
La photographie naturelle, douce et chaude, joue de concert avec le cadre idyllique que la réalisatrice met en scène. Tout semble si vrai et gratuit aux abords de cet hôtel de pierres blanches ; au bord d’une mer au bleu profond et sur laquelle pêcheurs et plaisanciers semblent trouver leur compte sans rien attendre. Les gens sont agréables, ils se font confiance, discutent et semblent toujours prendre le parti de s’aimer. Un univers dans lequel ce couple aux relents de souffre – et étranger de surcroit – dénote particulièrement. Plusieurs fois le gérant, devenu l’ami du mari (Roland), fait allusion à la discrétion voir l’absence de Vanessa (l’épouse). Elle, qui n’est qu’un fantôme pendant la première moitié du film, semble toujours cacher quelque chose, sous ses grands chapeaux, derrière ses grosses lunettes de soleil, et dans les replis alambiqués de ses robes. Elle ne joue pas le jeu du bonheur insouciant auquel tout le monde autour d’elle semble participer – comme le lui souligne souvent son mari « You are resisting your own happiness ».
L’incapacité à écrire de Roland en fait un personnage cliché : celui de l’auteur alcoolique. Mais c’est aussi une clé d’entrée dans le mystère de ce couple. Tout d’abord parce que c’est une projection, sur la plume de Roland, de l’incapacité de communiquer du couple. Là où le chantage a remplacé la bienveillance ; là où la confidence est remplacée par l’extorsion, les mots disparaissent tant du langage de l’amour que de celui de l’écrivain. (ATTENTION CECI EST UNE RÉVELATION DE LA FIN DU FILM) Mais c’est aussi une splendide métaphore, et projection (non plus sur la plume) mais sur le personnage de Roland, de l’infertilité de Vanessa. L’écriture, ou toute forme de création artistique, a souvent été analysé chez les hommes comme une compensation de la fertilité féminine : une tendance mue par la curiosité de cette capacité créatrice, naturelle chez la femme, mais si mystérieuse pour l’homme. Alors la page blanche de Roland est comme le berceau vide que pleure Vanessa. (FIN DES RÉVELATIONS)
Vue sur mer raconte donc la trajectoire d’un couple qui se répare, mais la beauté de ce geste est néanmoins gâchée par le vice des personnages, et le caractère profondément malsain de certaines scènes. Tout le troisième acte se résume ainsi : le couple est heureux car il partage une bouteille de vin en espionnant l’intimité sexuelle de ses voisins. Un choix de narration bien étrange et qui ne manque pas de mettre – à plusieurs reprises – toute la salle assez mal à l’aise. Mais cela semble confirmer l’inspiration de réalisateurs chocs comme Jean-Luc Godard ou même d’un film aussi pervers et génial que Eyes Wide Shut. Angelina Jolie fait un pas de plus en tant que réalisatrice et le résultat est encore encourageant mais, après trois films, on attend toujours une œuvre.
Après avoir joué la bimbo, puis s’être distinguée dans des rôles plus fins comme Une vie volée ou L’Échange, Angelina Jolie a décidé en 2011 de passer derrière la caméra pour deux films de guerre (Au pays du sang et du miel et Invincible) et aujourd’hui Vue sur mer, un drame sentimental inspiré par le cinéma européen des années soixante. Les maîtres mots seront : lenteur, silence, tension (violence ?) et sensualité.
Malgré la lenteur, et l’apparente prétention du film, le jeu virtuose d’Angelina Jolie et (un peu moins) de Brad Pitt ainsi que la candeur de la réalisation durant le premier acte nous immergent dans une histoire intrigante. Le film parvient, au début, à nous faire rire de la situation tragique de ce couple incapable de communiquer. Il semblerait que le rire soit aussi la solution adoptée par les protagonistes pour se maintenir à distance de leurs problèmes – mais c’est un rire jaune et ironique. La distance, c’est aussi le talent qu’ont ses deux amputés de l’amour de ne jamais se croiser alors qu’ils sont exilés sur une île.
La photographie naturelle, douce et chaude, joue de concert avec le cadre idyllique que la réalisatrice met en scène. Tout semble si vrai et gratuit aux abords de cet hôtel de pierres blanches ; au bord d’une mer au bleu profond et sur laquelle pêcheurs et plaisanciers semblent trouver leur compte sans rien attendre. Les gens sont agréables, ils se font confiance, discutent et semblent toujours prendre le parti de s’aimer. Un univers dans lequel ce couple aux relents de souffre – et étranger de surcroit – dénote particulièrement. Plusieurs fois le gérant, devenu l’ami du mari (Roland), fait allusion à la discrétion voir l’absence de Vanessa (l’épouse). Elle, qui n’est qu’un fantôme pendant la première moitié du film, semble toujours cacher quelque chose, sous ses grands chapeaux, derrière ses grosses lunettes de soleil, et dans les replis alambiqués de ses robes. Elle ne joue pas le jeu du bonheur insouciant auquel tout le monde autour d’elle semble participer – comme le lui souligne souvent son mari « You are resisting your own happiness ».
L’incapacité à écrire de Roland en fait un personnage cliché : celui de l’auteur alcoolique. Mais c’est aussi une clé d’entrée dans le mystère de ce couple. Tout d’abord parce que c’est une projection, sur la plume de Roland, de l’incapacité de communiquer du couple. Là où le chantage a remplacé la bienveillance ; là où la confidence est remplacée par l’extorsion, les mots disparaissent tant du langage de l’amour que de celui de l’écrivain. (ATTENTION CECI EST UNE RÉVELATION DE LA FIN DU FILM) Mais c’est aussi une splendide métaphore, et projection (non plus sur la plume) mais sur le personnage de Roland, de l’infertilité de Vanessa. L’écriture, ou toute forme de création artistique, a souvent été analysé chez les hommes comme une compensation de la fertilité féminine : une tendance mue par la curiosité de cette capacité créatrice, naturelle chez la femme, mais si mystérieuse pour l’homme. Alors la page blanche de Roland est comme le berceau vide que pleure Vanessa. (FIN DES RÉVELATIONS)
Vue sur mer raconte donc la trajectoire d’un couple qui se répare, mais la beauté de ce geste est néanmoins gâchée par le vice des personnages, et le caractère profondément malsain de certaines scènes. Tout le troisième acte se résume ainsi : le couple est heureux car il partage une bouteille de vin en espionnant l’intimité sexuelle de ses voisins. Un choix de narration bien étrange et qui ne manque pas de mettre – à plusieurs reprises – toute la salle assez mal à l’aise. Mais cela semble confirmer l’inspiration de réalisateurs chocs comme Jean-Luc Godard ou même d’un film aussi pervers et génial que Eyes Wide Shut. Angelina Jolie fait un pas de plus en tant que réalisatrice et le résultat est encore encourageant mais, après trois films, on attend toujours une œuvre.