Nicostratos le pélican

Film : Nicostratos le pélican (2010)

Réalisateur : Olivier Horlait

Acteurs : Thibault Le Guellec (Yannis), Emir Kusturica (Demosthene), François-Xavier Demaison (Aristote), Jade-Rose parker (Angelikis)... .

Durée : 01:35:00


Une fable animalière et familiale qui emporte d’emblée l’adhésion malgré une certaine tendance au sentimentalisme facile.

style="font-family: Cambo,arial,helvetica,sans-serif; font-size: small;">Il s’agit de l’adaptation cinématographique du livre éponyme d’Eric Boisset, lequel a d’ailleurs participé au scénario. Avec le réalisateur, son ambition était de « rendre cinématographique ce qui est littéraire » (source : DP). Le cinéaste Olivier Horlait est déjà familier de ce type de sujet puisqu’il réalisa auparavant Sunny et l’éléphant qui relatait la relation privilégiée entre un jeune cornac thai et son éléphant. Changement de cadre et d’animal pour ce film où les îles grecques remplacent la Thaïlande et le pélican les éléphants. L’homme connaît son métier car les splendides paysages grecs sont très bien mis en valeur et la mise en scène rend bien compte de l’aspect majestueux et sauvage de l’île de Milos où a été tourné le film. Les plages de sable et côtes rocheuses sont notamment mises à l’honneur (les amateurs de baignade et de plongée seront ravis). Le casting est essentiellement composé d’inconnus,
à commencer par les deux jeunes interprètes principaux, Thibault Le Guellec et Jade-Rose Parker, dans les rôles respectifs de Yannis et Angelikis, à l’interprétation spontanée et rafraîchissante. Les seuls acteurs connus sont Emir Kusturica (réalisateur yougoslave et déjà vu comme interprète dans La veuve de Saint-Pierre de Patrice Leconte et L’affaire Farewell de Christian Carion) dans le rôle de Démonsthène, le père de Yannis, et François-Xavier Demaison (Coluche, l’histoire d’un mec d’Antoine de Caune, Le petit Nicolas de Laurent Tirard, La chance de ma vie de Nicolas Cuche) dans celui d’Aristote, oncle d’Angelikis. Tous deux tiennent parfaitement leurs rôles et s’avèrent même assez complémentaires lors des scènes qu’ils ont en commun.

Mais la véritable star du film est bien le pélican du titre. Pas
moins de huit oiseaux (le pélican vedette et sept doublures) furent utilisés pour le film, révélant des prouesses de dressage. L’histoire rend un bel hommage à l’animal, à son espièglerie et à son vol majestueux. Le réalisateur réussit bien à nous faire partager l’admiration qu’il éprouve pour ces grands oiseaux des mers. « J’ai trouvé la démarche et le regard de ces grands oiseaux touchants et drôles à la fois. En vol, le pélican est majestueux » (source : DP). Il s’agit avant tout de l’histoire d’amitié entre un adolescent et un animal, le premier trouvant avec le second une relation exclusive qu’il ne trouvait avec aucun humain sur l’île où il vit. Paradoxalement, c’est aussi cette relation avec l’animal qui va lui permettre de trouver sa place dans le monde des humains. En effet, devenu malgré lui une véritable attraction populaire, Nicostratos le pélican attire même des touristes étrangers, ce qui bouleverse quelque peu la vie de l’île et revitalise le commerce local (notamment celui d’
Aristote, propriétaire de l’unique café des lieux). Il trouvera également l’amour en la personne d’Angelikis, la jeune nièce d’Aristote venue aider son oncle à son café pour la saison. Grâce à elle, il quitte pour la première fois son île natale, découvre Athènes la capitale et rencontre d’autres gens de son âge. Il s’agit donc pour le personnage d’un vrai démarrage de sa vie sociale. Enfin, il parviendra à renouer avec son père avec lequel il entretient des relations difficiles depuis la mort prématurée de sa mère. La place de la famille est également importante dans le film, notamment par le biais de cette relation père-fils délicate, montrée avec tact et pudeur. La perte de la femme pour Démosthène et de la mère pour Yannis résonne comme un manque cruel impossible à remplir et qu’ils doivent tous deux surmonter. En fin de compte, cette rencontre et cette amitié avec Nicostratos va permettre au jeune Yannis de grandir et de rentrer dans l’âge d’homme. Le rapport à la terre et à l’habitat est également
important. Même si Yannis est heureux de pouvoir visiter Athènes pour la première fois, il s’y sent perdu et ne retrouve ses repères qu’une fois rentré chez lui. Démosthène est encore plus viscéralement attaché à ses origines, n’hésitant pas à proclamer haut et fort qu’il est né sur cette île, qu’il y a grandit et s’y est marié. Les autres habitants semblent bien vivre dans la même logique. Tous semblent par ailleurs assez attachés à leur mode de vie et à la tradition et n’en dérogent pas, même avec l’afflux de touristes sur l’île. Un plaidoyer pour la tradition assez sympathique. Précisons aussi que le film ne verse jamais dans la caricature, chaque personnage est suffisamment consistant. Notamment, Démosthène est sévère, voire injuste envers Yannis, mais n’est pas pour autant un mauvais père et se montre même momentanément aimant dés le début du film. De même, Aristote se montre âpre au gain, mais aussi sensible et amical. Quant à la jeune Angelikis, si elle est volontiers exubérante et sûre d’elle, elle
sait cependant se remettre en question et faire preuve de profondeur.

Le film se laisse suivre agréablement et emporte l’adhésion, malgré une certaine tendance au sentimentalisme appuyé et quelques traits d’humour un peu lourd. De petits défauts qui n’empêchent nullement d’apprécier cette belle leçon de vie dépaysante.




Françis