Arrietty, le petit monde des chapardeurs

Film : Arrietty, le petit monde des chapardeurs (2010)

Réalisateur : Mirai Shida

Acteurs : les voix de Mirai Shida (Arietty), Ryunosuke Kamiki (Sho), Kirin Kiki (Haru) .

Durée : 01:34:00


un film d'animation charmant et exotique, voulu engagé par ses cinéastes quoique l'obscurité du sens s'éclipse devant la pureté des bons sentiments.

Ce dix-huitième film des studios Ghibli est librement adapté du premier tome d’une série de livres fantastiques écrits par la romancière anglaise Mary Norton, « Les Chapardeurs ». Il s’agit en fait d’une traduction autorisée de The borrowers qui signifie plus exactement « les emprunteurs », ce qui correspond mieux à la philosophie de ces petits êtres qui empruntent tout ce dont ils ont besoin mais jamais en trop grande quantité pour que les humains ne se rendent comptent de rien. Pour Hayao Miyazaki ce concept s’accorde bien avec la conjoncture économique : « […] l’ère de la consommation de masse approche de sa fin. Nous sommes dans une très mauvaise situation économique et l’idée d’emprunter plutôt que d’acheter illustre parfaitement la direction générale que prennent les choses. » Si le film n’entre finalement pas dans ces considérations, il met néanmoins en scène des personnages qui, sans être pourtant en état de nécessité, volent aux humains tout en essayant de préserver leur sécurité. Le père d’Arietty n’hésite pas à prendre la décision de déménager lorsque le moindre risque s’est fait sentir. On pourrait donc dire, sans tellement extrapoler, que les chapardeurs sont une allégorie des couches sociales les plus faibles et les plus démunies. On échappe néanmoins à la caricature des humains abominables, égoïstes et violents qui sont la cause de tous les maux. La seule personne dangereuse du film n’est que la bonne qui est davantage bête que méchante. « J’ai l’espoir que ce film offrira un réconfort et encouragera les gens qui traversent ces temps difficiles, chaotiques et incertains… » s’exclame Miyazaki exprimant ainsi la sympathie pour ce projet qu’il n’aura suivi qu’en tant que producteur exécutif.

 

Il est appréciable de voir que les cinéastes cherchent à donner une certaine profondeur philosophique ou sociale et l’on sait que les productions Ghibli ont toujours souhaité porter des idées dont la plus connue est la sauvegarde de l’écologie. Arriety, le petit monde des chapardeurs n’échappent pas à la règle mais cette fois de façon assez grossière. Subitement lors d’une discussion, la petite Arriety récite à son ami Sho un discours écolo qui tombe comme un cheveu sur la soupe. On déplore ainsi que cette cause écologique soit devenue un prétexte et se fasse l’écho misérable de films comme Le tombeau des lucioles.

 

Ainsi malgré le sens que lui donne Miyazaki et la tirade écologique, ce film manque d’une profondeur qui manquera aux adeptes de mangas philosophiques fans de Miyazaki et autres ambassadeurs de la culture nippone.

 

Cela fait d’Arriety une œuvre enfantine qui n’est pas dépourvue de charme. Les dessins d’une grande beauté plastique offrent de splendides jeux de lumières et un magnifique sens du détail. Les musiques à coloration celtique accentuent la poésie et la magie de ce conte. Les personnages véhiculent une grande douceur (sauf le chat et la bonne qui sont des ressorts comiques) qui pourra nourrir les plus jeunes de gentillesse. Les plus âgés pourraient s'agacer devant une certaine niaiserie sauce Princesse Sarah (le misérabilisme en moins).

Le film s’adressant essentiellement aux enfants, on déplore en particulier une attitude du père, que l’on retrouve d’ailleurs assez souvent au cinéma. En effet, ce dernier propose à sa fille de ne rien dire à sa mère des dangers qu’ils ont encouru lors d’une nuit de chapardages afin de ne pas l’inquiéter et va même jusqu’à lui mentir. Une petite discussion pourra s’avérer utile pour indiquer à l’enfant que chercher à ne pas inquiéter quelqu’un qu’on aime n’est pas une justification au mensonge. Outre cette maladresse instaurant une confusion entre les bonnes actions et les bonnes intentions, le film offre un bonne vision de la prudence. Lorsque Arriety souhaite montrer à son père qu’elle n’a pas peur et qu’elle est pleine de courage, celui-ci lui enseigne qu’« il y a un certain risque qu’il est préférable de ne jamais prendre ».