Autant en emporte le vent

Film : Autant en emporte le vent (1939)

Réalisateur : Victor Fleming

Acteurs : Vivien Leigh Rôle : Scarlett O'Hara Clark Gable (Rhett Butler) Leslie Howard (Ashley Wilkes) Olivia de Havilland (Melanie Hamilton)

Durée : 03:58:00


Autant en emporte le vent est l’adaptation du célèbre roman de Margaret Mitchell qui, sur fond de guerre de Sécession, met en scène ce que certains considèrent comme la plus grande histoire d’amour du cinéma. Qui en effet ne connaît les mésaventures amoureuses de l’impétueuse Scarlett O’Hara et du cynique et charmeur Rhett Butler ? Histoire d’amour célèbre par la force des sentiments et des caractères mais ce couple fournit surtout un contre exemple. Illusion, mensonge et cruauté ne cessent de séparer ces deux amants qui se cherchent.

L’héroïne Scarlett O’Hara, interprétée par Vivien Leigh qui reçut l’oscar de la meilleure actrice, incarne le courage et la ténacité. Réduite à la misère par la guerre, elle continue d’avancer et de se battre pour les siens, abandonnant toute moralité s’il le faut et ne laissant derrière elle aucun scrupule. Une force de la nature diront certains, mais la véritable force n’est-elle pas de savoir, malgré la misère, garder son honneur ? C’est ce qui oppose Scarlett aux familles du sud comme il faut, toutes ces « vieilles biques » comme elle dit qui se cramponnent à des traditions et des étiquettes dépassées.

Le spectateur entraîné par le film dans les misères de la guerre est poussé à approuver Scarlett. Mais au milieu se situe la vertu, incarnée par le personnage de Mélanie. On regrettera alors que le film la mette moins en valeur que le livre et souligne davantage sa naïveté que sa force tranquille et son courage pétri de bonté. Au fond, Scarlett est forte par égoïsme, Mélanie par bienveillance.

De plus Scarlett poursuit son amour d’adolescente avec autant de ténacité qu’elle poursuit l’argent. Durant de nombreuses années, elle continue à vouloir séduire Ashley Wilkes, le mari de Mélanie. Ashley de son côté incarne la faiblesse, séduit par Scarlett mais voulant la repousser, il ne parvient pas à fuir la tentation et sous la pression (familiale et économique) renonce à un déménagement qui aurait pu le sauver de l’adultère (adultère qui ne dépasse jamais le baiser, mais adultère tout de même). Une attirance pour Scarlett qui ne l’empêche pas d’aimer sa femme, et qui représente bien le pouvoir et la souffrance d’un désir charnel chez un homme de bien.

Quant au beau ténébreux Reth Butler qui a fait rêver toute une génération d’adolescentes, son amour pour Scarlett apparaît certes très fort mais surtout très malheureux. Et pour cause, ce couple représente parfaitement le malheur d’un amour sans morale et sans bonté. Deux égoïstes peuvent-ils s’aimer ? Non, répond le film. A maintes reprises, l’orgueil de l’un bute sur l’orgueil de l’autre et les jours se succèdent sans que l’amour ne triomphe de la cruauté. Rhett est amoureux de sa femme mais ne parvient pas à le lui prouver et finit par se décourager. Toutefois, le film se finit sur une touche d’espoir intéressante où Scarlett ouvre enfin les yeux - trop tard semble-t-il - mais elle n’est pas du genre à abandonner …

Ces entremêlements de sentiments amoureux évoluent sur fond historique : la guerre de Sécession, vue, et cela est très rare, du côté du sud … Au cœur de cette civilisation en voie de disparition, le spectateur pénètre de manière très efficace dans un monde à part entière et goûte aux coutumes et traditions du vieux sud. Cela permet aussi de montrer que tous les sudistes n’étaient pas des esclavagistes assoiffés de violence et que certaines grandes familles traitaient bien leurs esclaves. Mais l’intérêt se situe surtout dans l’analyse des mentalités qui se cramponnent au passé, même une fois le sud soumis. Comme le montre le titre du film Gone with the wind, une civilisation a été emportée par le vent, et le film retrace les étapes de cette disparition et les conséquences, finement analysées, sur l’esprit du sud. A cela correspond une division du film en quatre parties, de l’avant guerre jusqu’à l’après guerre. Chaque partie a son atmosphère, sa couleur et son fond sonore et rend plus prégnante la perte progressive d’un passé montré comme glorieux. Une personnalité importante de la peinture du sud est incontestablement la mamma noire des O’Hara, un personnage remarquablement analysé et interprété. D’ailleurs l’actrice Hattie McDaniel reçut l’Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle, qui fut le premier oscar accordé à un acteur ou une actrice noire.

Scarlett et Rhett… La plus grande histoire d’amour du cinéma dit-on ? Plutôt le plus grand contre-exemple, une peinture cruelle et peut-être involontaire de l’égoïsme et de l’orgueil, d’amants qui ne parviennent pas à dépasser la recherche du plaisir personnel.