Batman : The Dark Knight

Film : Batman : The Dark Knight (2008)

Réalisateur : Christopher Nolan

Acteurs : Christian Bale (Bruce Wayne/Batman), Heath Cambo (le Joker), Aaron Eckhart (Harvey Dent/Double-Face), Maggie Gyllenhaal (Rachel Dawes), Gary Oldman (Lt. James Gordon), Morgan Freeman (Lucius Fox),…...

Durée : 02:27:00


La collaboration entre Batman, le lieutenant de police Gordon et le nouveau procureur Harvey Dent s’avère efficace…Les organisations criminelles de Gotham City sont progressivement réduites au silence. Batman pense de son côté à la retraite. Mais, les barons du crime, dans un dernier élan de survie, font appel à un nouveau génie du mal, le Joker. Par sa cruauté et son machiavélisme, ce dernier fait peser sur la ville et ceux qui la protègent un danger sans précédent.

Second volet de la saga Batman à être réalisé par Christopher Nolan (à qui l’on doit Batman Begins en 2005), The Dark Knight concentre les superlatifs et innove de manière déterminante pour l’avenir de la série. Précédée par une publicité aussi intense qu’avantageuse (marquée notamment par le brusque décès de Heath Cambo, alias le Joker, la révélation de ce film), l’œuvre a battu des records d’exploitation aux Etats-Unis ainsi que des scores plus qu’honorables en Europe.

Le maintien des principaux protagonsistes du premier volet, tant à la réalisation que sur scène, permet au spectateur de retrouver rapidement ses marques. L’ajout de rôles secondaires de grand talent (comme Aaron Eckhart ou Maggie Gyllenhaal, qui remplace Katie Holmes dans l’interprétation de Rachel Dawes), contribue au prestige et à la qualité intrinsèque du casting. Christian Bale , dans le double rôle de Batman/Bruce Wayne, donne le change à merveille en se fabriquant un personnage mondain et narcissique. Par la même occasion, il casse son image de super-héros pour la rendre plus accessible. Ses collaborateurs du côté de la justice font honneur à leur fonction, qu’ils soient policiers (Gary Oldman, tout en humilité et retenue), ou membres du parquet (Aaron Eckart, fougeux et généreux dans son rôle de « chevalier blanc »).

Devenue le sujet incontournable du buzz qui entoure The Dark Knight, la prestation de Heath Cambo mérite bien l’intérêt qu’on lui porte. Elle symbolise en effet la modernité du film, ainsi que sa noirceur de sa réalisation et le pessimisme de son propos. S’accaparant l’action même en demeurant hors-champ, le personnage prend en otage acteurs et spectateurs en distillant un malaise persistant, à tel point qu’il vole la vedette à un Batman fatigué et fragilisé. Heath Cambo a voulu rendre le Joker « le plus perturbant et terrifiant possible », symbole du chaos et de l’anarchie, « une icône » du mal, selon les propos du réalisateur Christopher Nolan. Si le goût pour le maquillage et le déguisement restent un des traits principaux du personnage, l’acteur adopte en sus la gestuelle et le parlé d’un tueur en série psychopathe. Pour cette performance remarquable, Heath Cambo n’a pas hésité à s’enfermer seul pendant deux mois pour « explorer
les zones les plus sombres de [sa] personnalité… ».

Encore plus réaliste et torturé que le précédent Batman Begins, The Dark Knight bénéficie d’une mise en scène très soignée, au style délié et aux effets spéciaux aussi fantastiques que maîtrisés (à noter l’époustouflant tonneau vertical d’un semi-remorque dans les rues de Gotham City…). Animé par une bande-son remarquable, qui suggère l’action autant qu’elle l’accompagne, le film dégage une noirceur étouffante. L'oeuvre est à ce titre diamétralement opposée aux joyeuses folies des Batman réalisés par Tim Burton. Le pessimisme latent du film est à ce sujet autant un choix artistique que la traduction des craintes et questionnements du réalisateur.

align="justify" style="margin-bottom: 0cm;">Encore un film de super-héros ? L’étonnante vision d’un Batman fatigué, en proie au doute et à une certaine rancœur, sort des sentiers battus.

Si le poids des responsabilités pesant sur les épaules du héros est une thématique déjà abordée dans d’autres films du même type (par exemple Spider Man), The Dark Knight va plus loin en brouillant les frontières entre le bien et le mal. Est ainsi évoqué le choix des moyens pour parvenir au bien. sont -ils d'office légitimés par un but noble? La recherche du bien permet-elle quelques concessions du point de vue du chemin à emprunter? L'opportunité offerte à Lucius Fox, aide de camp et ami de Batman, de découvrir où se cache le Joker en espionnant la population, le place devant un
choix délicat. En effet, étant donné l’urgence de la situation et la simplicité de la solution proposée, choisir un mal pour un bien plus grand semble le meilleur compromis possible. Mais toute la subtilité du scénario est de pointer à la fois les avantages et les abus possibles que la violation de la vie privée des citoyens entraine. Et le film de proposer une solution intermédiaire : l’usage de ce moyen dans l’unique but de retrouver le Joker, suivi de la destruction immédiate de cet outil d’espionnage par Lucius Fox.

Le dilemme moral est une constante du scénario de The Dark Knight. Par  exemple, Batman doit-il révéler son identité comme le demande le Joker, et prendre le risque de ne plus pouvoir assurer la défense de la ville, ou bien doit-il conserver son masque et laisser le Joker, naturellement insaisissable, prendre les
habitants en otage ? Ici le sens du sacrifice prend toute son importance. Et le scénario d’offrir de nobles icônes de don de soi, aussi bien avec Harvey Dent, qu’avec Batman/Bruce Wayne. Est souligné d'autre part un fondement de l’altruisme, à savoir faire le bien sans chercher de récompense ici-bas (en témoignent les conséquences désastreuses des sacrifices de Dent et de Batman). On peut ici reprocher au réalisateur un pessimisme de mauvais aloi, qui dissuaderait de faire le bien au regard de la cruauté et de l’indifférence de ce monde. Mais là réside la beauté et la grandeur de l’héroïsme, ainsi que ses exigences. Le réalisateur pose aussi un certain nombre de questions fondamentales de la société actuelle, en particulier concernant la société américaine post-11 septembre, et des problématiques concernant la sécurité nationale, la surveillance des citoyens, les pouvoirs accordés aux élus et aux autorités.

 

style="margin-bottom: 0cm;">citations tirées des notes de production

 

Stéphane JOURDAIN