Burlesque

Film : Burlesque (2010)

Réalisateur : Steven Antin

Acteurs : Christina Aguilera (Ali Rose), Cher (Tess), Stanley Tucci (Sean), Kristen Bell (Nikki),

Durée : 01:40:00


De la sensualité à gogo, accompagnée de prouesses vocales et de musiques parfois talentueuses pour célébrer la carrière d'une jeune fille prête à presque tout pour réussir.
Il faut sortir le grand jeu pour exister à côté de la très sulfureuse Lady Gaga, qui fait trembler jusqu'à Madonna. Cher et Christina Aguilera relèvent le défi et construisent leur carrière cinématographique. Si Cher est déjà une routière des caméras, Christina Aguilera l'est un peu moins, mais elle défend son jeu d'actrice avec un certain honneur, en face de comédiens nettement plus expérimentés comme Stanley Tucci, qui joue une fois de
plus les sympathiques homosexuels (tout homosexuel étant, pour Hollywood, nécessairement très sympa et drôle, à quelques exceptions près). Certains extraits sont de ce fait assez émouvants.

Le scénario n'est pas très élaboré, ce qui pourrait se justifier si Burlesque était une authentique comédie musicale. Mais alors que ce genre cinématographique colore musicalement les situations quotidiennes, ce film ne montre la musique qu'à sa place habituelle, sur scène. Un scénario un peu plus riche, comme celui de Dreamgirls par exemple, aurait donc été le bienvenu.

Mais on sent que le film a préféré miser sur les chorégraphies et les costumes. Si les éclairages ont été soignés,
aucun passage n'arrive à la cheville de
Chicago, aux très artistiques jeux de lumières.


Sur le plan philosophique, il s'agit d'une très banale success story, aux leçons inégales.

On saluera tout d'abord la ténacité de la jeune fille fraîchement débarquée à Hollywood. Les longues pérégrinations qui fatiguent la motivation des jeunes carriéristes sont assez mal rendues, puisqu'elles ne font l'
objet que de quelques minutes de pellicule, mais l'obstination de la jeune fille au sein de l'établissement
Burlesque, passant de serveuse à danseuse puis chanteuse, prêche incontestablement pour la persévérance et le talent.

Au juste, que désire la jeune fille exactement ? Comme beaucoup d'adolescentes écervelées : la célébrité, le succès dans les affaires, le strass, le maquillage, les paillettes, le champagne et... les chaussures. Autant de choses à l'exact opposé de l'humilité, l'esprit de pauvreté, le recueillement sur les choses essentielles que tous les sages philosophes, croyants ou athées, ont désigné comme les conditions nécessaires au bonheur. La finalité de sa vie est donc bien loin de ce qui la rendra heureuse, même si le film prétend nous montrer (à défaut de nous le
prouver) le contraire.

Dans cet univers de « pestouilles », il est donc dans la continuité logique que la jeune fille confonde beauté et sensualité. Alors qu'elle veut plaire, tendance qu'il serait bien puritain de vouloir condamner, elle essaie d'exciter, ce qui est bien différent. Elle rêve de porter ces tenues qui en montrent le plus possible sans qu'on puisse les qualifier complètement d'érotiques, ou de pornographiques. Alors qu'il est bien dommage qu'une jolie jeune fille ne puisse percer dans le monde de la chanson sans devoir dévoiler ses charmes et sans qu'une équipe autour d'elle, qui n'y voit qu'un objet commercial, la transforme en produit de consommation, le film enfonce un peu plus le clou, qui fut jadis le tremplin de Cher et demeure celui de Christina Aguilera, que la surenchère sexuelle de ses
concurrentes l'amena à faire des clips comme
Dirrty. Comme le dit le film lui-même : « La vie est le fruit des choix que tu fais. »

On en tirera malgré tout une petite leçon de vie utile : « Apprends à reconnaître ceux qui t'aiment pour ce que tu es » (Cher, alias Tess). A un élève du Programme Cinécole qui disait un jour que toutes les filles ne pensent qu'à l'argent et aux belles voitures, l'animateur répondit : « Qu'est-ce que tu montres à une fille pour la séduire ? » Devant l'air coupable de l'adolescent, il conclut simplement : « Alors ne t'étonne pas qu'elle ne regarde que ça... » Ce qui est valable pour les garçons l'est pour les filles. Comment
les gens pourraient-ils aimer Ali pour sa richesse intérieure si tout son travail porte sur la richesse extérieure ?


Raphaël Jodeau