Divergente

Film : Divergente (2014)

Réalisateur : Neil Burger

Acteurs : Shailene Woodley (Beatrice "Tris" Prior), Theo James (Quatre), Kate Winslet (Jeanine Matthews), Zoë Kravitz (Christina)

Durée : 02:19:00


La série de romans de Veronica Roth, très prisée outre-atlantique, offrait une base idéale pour un

scénario de film (comme énormément de livres aujourd'hui, puisque tout le monde rêve secrètement de voir ses oeuvres adaptées au cinéma).

Après Hunger Games c'est donc un nouveau film d'action inquietant qui voit le jour.

Un monde, cinq factions, cinq façons d'appréhender la société : les Erudits, savants qui rationnalisent tout, les Fraternels, au travail de la terre, les Sincères, juristes d'une honnêteté redoutable, les Audacieux, sorte de têtes brûlées qui protègent la populace et les Altruistes, caste à visée humanitaire dont le chef dirige tout ce petit monde.

Incarnée par cette jeune actrice qui donna magistralement la réplique à Georges Clooney dans The descendants et qui – amusant !- est dans la réalité survivaliste (elle s'est entraînée à survivre dans la forêt), Béatrice est une jeune fille issue des altruistes, qui se demande bien quel groupe intégrer. Le dossier de presse et les médias sont unanimes : il s'agit d'un film sur l'identité. Peut-être, mais une identité qui ne se fonde pas que sur l'essence, au sens philosophique du terme, à savoir ce que nous sommes naturellement. Certes pour choisir, la société a mis au point un test qui nous révèle ce que l'homme est, et donc vers quelle caste il peut s'orienter. Pourtant l'individu est libre de choisir ce qu'il veut (par un rite qui symbolise le passage à l'âge adulte) c'est-à-dire de contredire le test...

Deviens ce que tu es, disait Socrate. Pas évident parce qu'en l'occurrence, la jeune fille est tout. Le test ne fonctionne pas pour elle. Elle va devoir choisir ce qu'elle deviendra.

Ce que nous sommes influe sur ce que nous faisons, et le film ne traduit l'être que dans l'action. C'est en agissant que l'individu trahit sa nature profonde. Ainsi, par exemple, c'est en devant trouver des solutions à des problèmes de survie que la jeune fille se révèle plus l'un ou plus l'autre. Si elle

résiste et vainc la difficulté, elle agit en audacieuse. Si elle la contourne, c'est qu'elle est autre chose. La manière d'aborder son être se fait donc par le biais de son intelligence pratique. Voilà qui est passionnant et bougrement intelligent, mais qui montre la limite de notre petite romancière, puisque l'être n'est pas la simple somme de son agir (il est également ce qu'il connaît), et que l'agir ne se

résume pas à l'intelligence pratique mais aussi aux vertus morales (justice, tempérance, etc.) qui ne sont pas du domaine de l'intelligence, mais de la volonté...

Tout le long de la pellicule, en filigrane, comme dans Hunger Games, la peur. Peur d'échouer aux tests de toutes natures, de perdre sa famille, d'un renversement de gouvernement, d'une trahison...

La société civile, beaucoup plus détaillée dans le roman, n'est pas vraiment l'objet du film. Elle est plus, ici, un contexte, qui fait d'ailleurs penser à la République platonicienne (elle aussi divisée en castes : les commerçants, les soldats, les gouvernants, etc.). C'est dommage, évidemment, mais largement excusable. Comment, en un peu plus de deux heures, entrer à ce point dans les détails ?

Une phrase, grand principe fondateur de cette société revient régulièrement : "la faction avant les liens du sang." Il s'agit d'une critique acerbe du collectivisme et du socialisme, comme le facisme par exemple, qui fait primer le groupe et ses codes avant la loi naturelle. Le film montre sans ambiguïté combien cette idéologie est nocive et s'écrase contre la force des liens familiaux, gravés dans la nature de l'homme.

L'histoire d'amour est, quant à elle, beaucoup plus banale.

Neil Burger renoue avec le savoir-faire qu'il avait déployé dans Limitless. Un rythme nerveux, des cadrages d'une grande efficacité, une caméra intrusive, à quoi il ajoute cette fois des décors gigantesques. Les effets spéciaux sont excellents, le jeu des acteurs bon sans être époustouflant, bref, un excellent film d'action qui soulève des questions intéressantes pour peu qu'on l'interroge un peu.