C'est dans le Far West profond, perdu au milieu des plaines, coupé du monde, que Tommy Lee Jones, à la fois producteur, réalisateur et acteur dans ce film, a choisi de nous entraîner.
Ici rien ne pousse, pas même l'espoir. La maladie est fatale, la folie utilise la solitude comme porte-voix, celui qui n'est pas rude est voué à encaisser les coups.
Celui ou celle, d'ailleurs, puisque les premières images nous transportent dans la maison de Mary B. Cuddy, une femme pleine de vertus désespérément à la recherche de l'âme sœur.
Cette œuvre aurait pu être l'adaptation d'une œuvre littéraire, tant il accorde d'importance aux gestes, aux regards, aux attitudes. Comme un livre, le scénario entend plonger les mains au fond des psychologies, ce qui donne au film un rythme assez lent sans être ennuyeux.
A l'image des plans magnifiques que nous propose la caméra (plans d'ensemble stables, très symétriques, très photographiques, excellent parti pris cinématographique pour ce sujet lourd comme une enclume), la demoiselle semble la seule à tenir la route. Courageuse, travailleuse, témoignant d'une rudesse qui cache mal une tendresse féminine épanchée sur un piano imaginaire, son existence est touchante, plus encore lorsqu'elle trébuche sur les échecs amoureux (quoiqu'il s'agisse plus de calcul que d'affection, le premier étant souvent le point de départ du second) : les hommes, empoussiérés de muflerie, la craignent ou l'admirent mais n'envisagent jamais de l'accompagner dans la vie.
En parallèle, presque toutes les femmes du film sont des garces. Elles sont soit folles (c'est le thème du film), soit « langues de vipère, » et pourtant mariées la plupart du temps.
Dans cette perspective Mr. Briggs, incarné par un Tommy Lee Jones plus vrai que nature, est pour elle une planche de salut. Bien que bougon et alcoolisé, il va connaître au contact de Mary une sorte de rédemption. Celui qui ne pensait qu'à l'argent et à son intérêt va apprendre l'importance du sacré et de la vie d'autrui, l'honneur qui se dégage d'une mission accomplie. D'abord menaçant il devient tendre et attentionné, prenant soin d'une jeune fille qui lui rappelle Mary.
— Attention les lignes suivantes dévoilent l'intrigue —
C'est pourtant un drame qui va déclencher son repentir. Refusant à son tour d'être l'homme de cette femme, il va la pousser dans ses retranchements, et tout bascule.
Je ne lis jamais les critiques et les synopsis avant d'aller voir un film. Quelle ne fut pas ma stupeur, dès lors, de découvrir au milieu de la pellicule cette âme admirable misérablement pendue à la branche d'un arbre !
Quelle souffrance aura-t-il fallu à cette dame pour sombrer dans le désespoir du suicide ! Mon cœur de spectateur s'est serré pendant la première moitié, il fut à ce moment révolté ! Comment une femme si courageuse a-t-elle pu céder à ses amertumes ? Incohérence scénaristique ou triste représentation d'une réalité dépravée ? Un dossier de presse de deux pages n'aide pas à trancher la question...
Les portes de sortie étaient pourtant nombreuses : changement de vie, de région, comme elle en parlait d'ailleurs de son vivant. Puisque les hommes n'étaient pas à sa hauteur, ne pouvait-elle pas les élever comme elle le fit pour Briggs, ou bien en chercher ailleurs ?
C'est comme si la folie de ses passagères s'était emparé d'elle. Quel dommage, quand le film aurait pu montrer à notre époque blasée et imprégnée de solitude qu'il est toujours possible de connaître la joie !
— Fin du dévoilement —
Il reste un film d'une plasticité remarquable et d'une très grande profondeur, qu'on pourrait analyser sur de nombreux paragraphes si les contraintes éditoriales n'étaient pas ainsi faites.
Notons des scènes violentes pénibles et un érotisme qui aurait pu être utilement remplacé par des ellipses temporelles, même si on comprend la volonté de Tommy Lee Jones de nous montrer à quel point le sexe peut être désenchanté...
C'est dans le Far West profond, perdu au milieu des plaines, coupé du monde, que Tommy Lee Jones, à la fois producteur, réalisateur et acteur dans ce film, a choisi de nous entraîner.
Ici rien ne pousse, pas même l'espoir. La maladie est fatale, la folie utilise la solitude comme porte-voix, celui qui n'est pas rude est voué à encaisser les coups.
Celui ou celle, d'ailleurs, puisque les premières images nous transportent dans la maison de Mary B. Cuddy, une femme pleine de vertus désespérément à la recherche de l'âme sœur.
Cette œuvre aurait pu être l'adaptation d'une œuvre littéraire, tant il accorde d'importance aux gestes, aux regards, aux attitudes. Comme un livre, le scénario entend plonger les mains au fond des psychologies, ce qui donne au film un rythme assez lent sans être ennuyeux.
A l'image des plans magnifiques que nous propose la caméra (plans d'ensemble stables, très symétriques, très photographiques, excellent parti pris cinématographique pour ce sujet lourd comme une enclume), la demoiselle semble la seule à tenir la route. Courageuse, travailleuse, témoignant d'une rudesse qui cache mal une tendresse féminine épanchée sur un piano imaginaire, son existence est touchante, plus encore lorsqu'elle trébuche sur les échecs amoureux (quoiqu'il s'agisse plus de calcul que d'affection, le premier étant souvent le point de départ du second) : les hommes, empoussiérés de muflerie, la craignent ou l'admirent mais n'envisagent jamais de l'accompagner dans la vie.
En parallèle, presque toutes les femmes du film sont des garces. Elles sont soit folles (c'est le thème du film), soit « langues de vipère, » et pourtant mariées la plupart du temps.
Dans cette perspective Mr. Briggs, incarné par un Tommy Lee Jones plus vrai que nature, est pour elle une planche de salut. Bien que bougon et alcoolisé, il va connaître au contact de Mary une sorte de rédemption. Celui qui ne pensait qu'à l'argent et à son intérêt va apprendre l'importance du sacré et de la vie d'autrui, l'honneur qui se dégage d'une mission accomplie. D'abord menaçant il devient tendre et attentionné, prenant soin d'une jeune fille qui lui rappelle Mary.
— Attention les lignes suivantes dévoilent l'intrigue —
C'est pourtant un drame qui va déclencher son repentir. Refusant à son tour d'être l'homme de cette femme, il va la pousser dans ses retranchements, et tout bascule.
Je ne lis jamais les critiques et les synopsis avant d'aller voir un film. Quelle ne fut pas ma stupeur, dès lors, de découvrir au milieu de la pellicule cette âme admirable misérablement pendue à la branche d'un arbre !
Quelle souffrance aura-t-il fallu à cette dame pour sombrer dans le désespoir du suicide ! Mon cœur de spectateur s'est serré pendant la première moitié, il fut à ce moment révolté ! Comment une femme si courageuse a-t-elle pu céder à ses amertumes ? Incohérence scénaristique ou triste représentation d'une réalité dépravée ? Un dossier de presse de deux pages n'aide pas à trancher la question...
Les portes de sortie étaient pourtant nombreuses : changement de vie, de région, comme elle en parlait d'ailleurs de son vivant. Puisque les hommes n'étaient pas à sa hauteur, ne pouvait-elle pas les élever comme elle le fit pour Briggs, ou bien en chercher ailleurs ?
C'est comme si la folie de ses passagères s'était emparé d'elle. Quel dommage, quand le film aurait pu montrer à notre époque blasée et imprégnée de solitude qu'il est toujours possible de connaître la joie !
— Fin du dévoilement —
Il reste un film d'une plasticité remarquable et d'une très grande profondeur, qu'on pourrait analyser sur de nombreux paragraphes si les contraintes éditoriales n'étaient pas ainsi faites.
Notons des scènes violentes pénibles et un érotisme qui aurait pu être utilement remplacé par des ellipses temporelles, même si on comprend la volonté de Tommy Lee Jones de nous montrer à quel point le sexe peut être désenchanté...