Jersey Boys

Film : Jersey Boys (2014)

Réalisateur : Clint Eastwood

Acteurs : Christopher Walken (Angelo 'Gyp' DeCarlo), John Lloyd Young (Frankie Valli), Erich Bergen (Bob Gaudio), Vincent Piazza (Tommy DeVito), Michael Lomenda (Nick Massi)

Durée : 02:14:00


Pianiste et clarinettiste, Clint Eastwood est un talent contrarié. Son album Cowboy favorites fut un flop monumental, les suivants claquèrent comme des pétards mouillés, et le pauvre réalisateur n'eut d'autres choix pour continuer à swinguer que de créer son propre label Malpaso Records, qui composa les bandes originales de la quasi-totalité de ses films.

C'est dire si Jersey Boys était pour lui l'occasion de se rassurer !

Après la comédie musicale à succès de Broadway, qui récolta un Tony Award, Clint Eastwood retrace donc à son tour le parcours du groupe musical des années 60 et insiste sur deux personnages du quatuor : Franky Valli bien sûr, interprété par John Lloyd Young, l'acteur principal de la comédie musicale qui put converser avec le personnage qu'il incarne pour plus de crédibilité, et Tommy DeVito, un choix étrange puisque l'autre compère qui resta jusqu'à la fin du groupe est en fait Bob Gaudio.

La réalisation est très sobre. Les travellings communs succèdent aux plans très classiques, quoique la position des caméras soit très étudiée, par exemple lors des sorties de prison ou du règlement de compte avec Tommy chez le mafieux Angelo.

Mais une des caractéristiques principales du film est sans aucun doute la désintégration du fameux quatrième mur cinématographique grâce au regard caméra, utilisé par Godard dans À bout de souffle puis popularisé par la série Malcom, dans laquelle le jeune garçon s'adresse au public. Ici les personnages s'adressent donc au spectateur lors de moments insolites comme les chansons, par exemple, rappelant les techniques littéraires de métafiction.

Sur le fond Clint Eastwood prend le large par rapport au sujet. Pas de jugement, pas de condamnation : la simple histoire d'un groupe musical avec ses tracas habituels. Rivalités internes, histoires de filles faciles ou à épouser (les filles de « type A » et celles de « type B, » explique Tommy), problèmes d'argent, obstacles du show-business… le quotidien des success story quoi, le gravier des échecs et le parfum des victoires, les déboires familiaux, le sacrifices des pères de famille sur l'autel de la célébrité. La pellicule prend cependant garde de s'arrêter là où commencent les vapeurs de souffre. Les nanas oui, mais pour les parties de jambes en l'air, attends donc d'être chez toi !

La figure de Franky Valli est quant à elle propre et sans bavures. Au moment où ses ritals de compères collectionnent les soutifs, lui se marie, assume ses responsabilités de père, va à la messe le dimanche. Quand Tommy dérape, il endosse ses problèmes avec force et responsabilité.

Pour enrober le tout, le film met brillamment en scène les meilleures chansons du groupe, de ces chansons qui vous font oublier le quotidien en remuant le pied en cadence.

Et un, et deux, et un, deux, trois, quatre… Musique !