Krach

Film : Krach (2010)

Réalisateur : Fabrice Genestal

Acteurs : Gilles Lellouche (Erwan Kremor), Vahina Giocante (Sybille Malher), Charles Berling (Georges), Michael Madsen (Wiliam)... .

Durée : 01:27:00


Thriller rythmé sur le monde impitoyable de la finance, Krach raconte la chute libre d'un trader enivré par jeu de la bourse. Avec simplicité mais conviction, le film critique sans racolage malsain un modèle économique emprisonné par des hommes sans âmes, vautrés dans le sexe et la drogue, qui aiment fumer leurs gros cigares assis sur des tonneaux de poudre.

Le scénario peut paraître abracadabrant, mais c'est une amusante manière de combiner les deux "traumatismes" du siècle : crise financière et crise climatique. Quoiqu'il en soit, le modèle de marché financier créé à partir des variations climatiques est plus divertissant que les algorithmes incompréhensibles conçus par les petits génies de Wall Street. L'essentiel n'est pas là. Il s'agit pour les cinéastes de montrer la folie qui règne dans ce monde sans âme, sans humanité. Faire de l'argent est un jeu ou un sport où ses acteurs tentent désespérément de devenir des dieux. Le récit, bien rythmé, pointe du doigt plusieurs aspects intéressants quoique peu
nouveaux au cinéma. Tout d'abord, on voit clairement que l'argent, à la fois cause efficiente et cause finale, est tout. Ces traders qui pensent tout pouvoir contrôler ne sont en réalité que les jouets d'un système qui les dépasse, et pour une simple sensation de toute-puissance, ils vendent leur âme, leur humanité, non seulement parce que les fluctuations du marché conditionnent leur vie, mais parce qu'ils perdent l'envie même d'exister. Le suicide d'un des personnages est une conséquence logique. Or quand on a perdu le sens de la vie, qu'on est de toute façon trop fatigué pour même y penser, on sombre, notamment dans la drogue et le sexe. Selon Fabrice Genestal, "le trader a une vie très linéaire, à la limite du pathétique. Tout y est réduit à sa plus simple expression. Aucune nuance, aucun sentiment, aucune psychologie. L’argent est la cause de cet avilissement. Le trader croit jouir d’une autonomie absolue, lui conférant un pouvoir suprême. Or, l’actionnaire demeure le maître du jeu". Le
personnage principal, adroitement interprété par Gilles Lellouche, est allégorique. Il chute progressivement dans une sorte d'autisme destructeur poussé à la fois par un orgueil monstrueux, et une addiction au jeu, tel un malheureux joueur de poker qui tente désespérément de se refaire.

Plus globalement, Krach est un parti-pris sur ce que doit être le marché et essaie de montrer que donner les pleins pouvoirs aux traders, sans aucune autre limite que celle de la concurrence, est voué à l'échec. C'est aussi la fascination, mise sous forme de thriller, par un système qu'un seul homme est capable de bouleverser à l'aide d'un ordinateur et de quelques coups de téléphone. En revanche le film, concentré sur la folie des traders qui peuvent immobiliser le marché mondial, semble déresponsabiliser les gouvernements, ne serait-ce qu'en ne les
intégrant pas ou très peu dans l'équation.

Une oeuvre intéressante malgré ces quelques défauts qui donne une assez bonne vision de la déshumanisation de ce milieu, certes un peu convenue mais qui n'en demeure pas moins vraie.