Il faut avoir vu Le bruit des glaçons pour glousser en accord avec le « Tout Paris,
» ce qui est a priori mauvais signe.
Pourtant le film, tissé autour de la maison du personnage principal et respectant presque absolument l'unité de lieu, n'est pas inintéressant.
La première surprise vient de l'entreprise périlleuse de faire un thriller sans action et, au début du moins, sans intrigue. La musique (superbe), les longs regards caméra de Jean Dujardin, alias Charles, le jeu inquiétant d'Albert Dupontel (alias son cancer) et le ton des personnages construisent en effet un drame dont on perçoit le moteur (la maladie) sans en saisir au premier abord le dénouement, même possible. Celui-ci n'est esquissé que bien tard dans le film, où la fatalité laisse place à l'espoir : il est
possible de se débarrasser du mal. Oui mais comment ?
Lorsqu'on constate que les cancers, personnifiés, s'agacent de voir l'affection naître entre le maître et sa servante, tout deux atteints par la maladie, on se doute que l'amour pourrait être les fourches caudines de la maladie. Pourtant la fin du film, qu'on ne révélera pas sous peine de la déflorer, éclate l'univers romantique pour tomber dans celui de l'astuce scénaristique, digne des fourberies d'un Scapin.
C'est ainsi que le thème principal du film, la maladie, laisse en bouche un goût d'inachevé, d'incomplétude, presque de maladresse. Alors que Bertrand Blier sait de quoi il parle et annonce une idée très originale et prometteuse, on a donc
peine à le suivre tellement la profondeur annoncée s'avère décevante.
Le deuxième thème du film, l'amour véritable, est une nouvelle banalité traitée de manière non-conformiste. Banalité puisqu'à en croire l'univers fantasmatique du cinéma l'amour, même quand il n'en a que la couleur, triomphe de tout partout. Mais l'originalité vient du fait que les personnes aimantes voient le cancer de l'être aimé, ce qui présente par ailleurs l'insigne avantage pour le malade de savoir qui l'aime vraiment. Pourtant l'amour entre un homme et une femme semble être, pour Bertrand Blier en tout cas, indissociable de l'amour charnel, le sexe pouvant très bien quant à lui être sans amour (c'est le cas de la petite russe, que Charles amène un soir dans sa propriété, afin de l'utiliser jusqu'à de qu'elle en soit usée). Cette conception indubitablement faussée de l'
amitié profonde entre un homme et une femme est la source de situations au moins désordonnées, pour ne pas dire incohérentes. Alors qu'il a une femme et un enfant (même à la fin du film, il n'assumera pas cette responsabilité), Charles préfère s'attacher à Louisa, sa bonne, qui l'aime sincèrement (puisqu'elle voit son cancer) mais d'un amour charnel (puisqu'elle va profiter de l'alcoolisme de son maître pour coucher avec lui). Charles aime son fils de seize ans, qui l'aime en retour puisqu'il voit son cancer (mais pas de relation charnelle entre eux : ça ferait désordre). Louisa aimant Charles, elle aime aussi son fils, avec lequel elle va donc également coucher. Bref, du grand n'importe quoi qui fait ressembler les personnages à des adolescents victimes de leurs hormones, dans un grand bain collectif qu'on appellera « amour » pour la circonstance. Cette situation est d'autant plus étrange que Louisa est entendue comme l'élément stabilisateur du film. Gardienne de la maison bien
avant que Charles et sa femme s'installent, elle traverse « droitement » tous les soubresauts de la maison, apparemment guidée par sa seule affection pour Charles.
Le troisième thème du film est bien sûr celui de la mort, échéance que les mourants veulent repousser pour optimiser une vie fort venteuse au moment du bilan. Conçu, ainsi que la maladie, comme un mal (Albert Dupontel, alias le cancer, assimilera le cancer au « mal », puis à « l'enfer »), elle montre une nouvelle confusion entre ce que Aristote appelait loi physique (dépendant de mécanismes physiques, biologiques, etc.) et loi morale (dépendant essentiellement de l'intelligence et de la volonté de l'homme libre). Classiquement il convient en effet de distinguer le mal en tant que maladie et le mal fait par les hommes, beaucoup plus proche de la réalité infernale.
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Un quatrième thème est celui de l'addiction, remède malheureux à une vie malheureuse, qui permet d'oublier dans une rigolade bien française les tourments d'une vie irresponsable.
N'oublions pas de noter les quelques apparitions acides des paparazzis (Charles étant un écrivain connu), témoins délectés d'une tragédie détestable qui ressemble à celle du genre humain, depuis son commencement.
Une réflexion crue et assez riche sur le combat contre la maladie et l'addiction, bien orchestrée et interprétée au coeur d'un scénario travaillé, qui pèche par la lenteur de son tempo et son aspect « film français » qui s'écoute vibrer.
Il faut avoir vu Le bruit des glaçons pour glousser en accord avec le « Tout Paris,
» ce qui est a priori mauvais signe.
Pourtant le film, tissé autour de la maison du personnage principal et respectant presque absolument l'unité de lieu, n'est pas inintéressant.
La première surprise vient de l'entreprise périlleuse de faire un thriller sans action et, au début du moins, sans intrigue. La musique (superbe), les longs regards caméra de Jean Dujardin, alias Charles, le jeu inquiétant d'Albert Dupontel (alias son cancer) et le ton des personnages construisent en effet un drame dont on perçoit le moteur (la maladie) sans en saisir au premier abord le dénouement, même possible. Celui-ci n'est esquissé que bien tard dans le film, où la fatalité laisse place à l'espoir : il est
possible de se débarrasser du mal. Oui mais comment ?
Lorsqu'on constate que les cancers, personnifiés, s'agacent de voir l'affection naître entre le maître et sa servante, tout deux atteints par la maladie, on se doute que l'amour pourrait être les fourches caudines de la maladie. Pourtant la fin du film, qu'on ne révélera pas sous peine de la déflorer, éclate l'univers romantique pour tomber dans celui de l'astuce scénaristique, digne des fourberies d'un Scapin.
C'est ainsi que le thème principal du film, la maladie, laisse en bouche un goût d'inachevé, d'incomplétude, presque de maladresse. Alors que Bertrand Blier sait de quoi il parle et annonce une idée très originale et prometteuse, on a donc
peine à le suivre tellement la profondeur annoncée s'avère décevante.
Le deuxième thème du film, l'amour véritable, est une nouvelle banalité traitée de manière non-conformiste. Banalité puisqu'à en croire l'univers fantasmatique du cinéma l'amour, même quand il n'en a que la couleur, triomphe de tout partout. Mais l'originalité vient du fait que les personnes aimantes voient le cancer de l'être aimé, ce qui présente par ailleurs l'insigne avantage pour le malade de savoir qui l'aime vraiment. Pourtant l'amour entre un homme et une femme semble être, pour Bertrand Blier en tout cas, indissociable de l'amour charnel, le sexe pouvant très bien quant à lui être sans amour (c'est le cas de la petite russe, que Charles amène un soir dans sa propriété, afin de l'utiliser jusqu'à de qu'elle en soit usée). Cette conception indubitablement faussée de l'
amitié profonde entre un homme et une femme est la source de situations au moins désordonnées, pour ne pas dire incohérentes. Alors qu'il a une femme et un enfant (même à la fin du film, il n'assumera pas cette responsabilité), Charles préfère s'attacher à Louisa, sa bonne, qui l'aime sincèrement (puisqu'elle voit son cancer) mais d'un amour charnel (puisqu'elle va profiter de l'alcoolisme de son maître pour coucher avec lui). Charles aime son fils de seize ans, qui l'aime en retour puisqu'il voit son cancer (mais pas de relation charnelle entre eux : ça ferait désordre). Louisa aimant Charles, elle aime aussi son fils, avec lequel elle va donc également coucher. Bref, du grand n'importe quoi qui fait ressembler les personnages à des adolescents victimes de leurs hormones, dans un grand bain collectif qu'on appellera « amour » pour la circonstance. Cette situation est d'autant plus étrange que Louisa est entendue comme l'élément stabilisateur du film. Gardienne de la maison bien
avant que Charles et sa femme s'installent, elle traverse « droitement » tous les soubresauts de la maison, apparemment guidée par sa seule affection pour Charles.
Le troisième thème du film est bien sûr celui de la mort, échéance que les mourants veulent repousser pour optimiser une vie fort venteuse au moment du bilan. Conçu, ainsi que la maladie, comme un mal (Albert Dupontel, alias le cancer, assimilera le cancer au « mal », puis à « l'enfer »), elle montre une nouvelle confusion entre ce que Aristote appelait loi physique (dépendant de mécanismes physiques, biologiques, etc.) et loi morale (dépendant essentiellement de l'intelligence et de la volonté de l'homme libre). Classiquement il convient en effet de distinguer le mal en tant que maladie et le mal fait par les hommes, beaucoup plus proche de la réalité infernale.
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Un quatrième thème est celui de l'addiction, remède malheureux à une vie malheureuse, qui permet d'oublier dans une rigolade bien française les tourments d'une vie irresponsable.
N'oublions pas de noter les quelques apparitions acides des paparazzis (Charles étant un écrivain connu), témoins délectés d'une tragédie détestable qui ressemble à celle du genre humain, depuis son commencement.