Comme pour le premier volet de la saga Le Monde de Narnia, Andrew Adamson a excellé dans la réalisation d’un monde imaginaire. Le premier film comptait 60 à 70% d'images réalisées en studio. Pour ce second volume, les proportions sont inversées, puisque il y a beaucoup plus de prises de vues réelles. Le tournage s'est donc étendu sur sept mois, de la Nouvelle-Zélande à la Slovénie, en passant par la Pologne et la République Tchèque et a su tiré profit de ses paysages fabuleux.
Par ailleurs, les décors sont travaillés avec soin ; Andrew Adamson considère
en effet « que les lieux sont aussi importants que les personnages de l’histoire » (making of, in http://fr.movies.yahoo.com). Il les fait donc contribuer à l’atmosphère fantastique, ou les investit d’un rôle symbolique. Ainsi le château de Miraz, qui possède d’inquiétantes gargouilles, et
>« dont l’aspect s’inspire fortement du style fasciste des année 30 » (Roger Ford, décorateur, in Secret de tournage, http://www.allocine.fr), donne le ton avant même l’apparition des personnages.
Les costumes sont chargés du même rôle fantastique et
symbolique ; ainsi la costumière déclare « Nous sommes partis en Europe, en Espagne, en Italie et à Londres, pour voir ce qu'il y avait dans toutes les costumeries. Mais tout ce que nous avons trouvé ressemblait beaucoup à ce que l'on avait déjà vu dans d'autres films. En fin de compte, c'est dans un livre du musée du textile à Florence que nous avons trouvé exactement ce que nous cherchions: des costumes mélangeant les styles méditerranéen, pirate et médiéval. De plus, ces costumes dégageaient un sentiment général de méchanceté. Nous avons tout d'un coup réalisé que nous avions sous les yeux ce que portaient nos Telmarins. »( Isis Mussenden, interview in http://www.cinemovies.fr)
Ce monde fantastique, remarquable pour ses paysages, ses décors et ses costumes, devient homérique avec son peuple de créatures mythologiques. Le recours aux maquillages pour mettre en scène ces diverses créatures produit un ensemble travaillé et réussi. Les cent trente figurants qui interprètent les créatures ont nécessité chaque jour plusieurs heures de maquillage. A lui seul, l'acteur Warwick Davis prenait trois heures et demie de son temps pour se faire poser les prothèses faciales qui le transformaient en Nikabrik, le nain noir (in Secret de tournage, http://www.allocine.fr).
De plus, les effets spéciaux se sont appuyés sur le travail du premier volet pour passer au niveau supérieur. Andrew Adamson déclare en ce sens : « cette fois les créatures sont là, le travail de création est fait ; ça nous permet de nous concentrer un peu plus sur l’image. Par exemple dans les
batailles, j’ai toujours voulu voir la manière dont chacune des créatures se bat. Maintenant on peut jouer un peu plus là-dessus, on peut voir que les faunes se battent différemment des minotaures, des centaures et des griffons. » (making of, in http://fr.movies.yahoo.com)
Ce monde fantastique créé avec brio est mis au service d’une aventure épique et dynamique, par laquelle
le deuxième volet de la saga diffère fortement du premier. « Je pense que c’est une histoire plus dure, plus sombre » déclare Andrew Adamson (making of, in http://fr.movies.yahoo.com). En effet il ne s’agit plus d’une opposition entre un lion et une sorcière, mais d’un conflit politique, d’une guerre entre deux rois humains. La magie et le
merveilleux interviennent tardivement, conférant ainsi à l’ensemble du film un caractère plus guerrier. Par ailleurs, le conflit est familial et les trahisons intestines, d’où l’atmosphère plus assombrie.
Mais l’aventure est bien menée et reste dynamique. La finesse se constate notamment dans l’exposition du conflit : alors que le livre décrit la rencontre entre les enfants Pevensie et un nain qui leur apprend l’histoire de Narnia et des Telmarins (peuple descendant des terriens qui soumit les narniens), le film procède par découvertes successives, accompagnant les enfants partis à la recherche d’une explication, « nous allons essayer de comprendre ce qui se passe » décide Peter. Andrew Adamson évite ainsi, par le biais d’un
montage parallèle, la maladresse d’un flashback ou la lourdeur d’un récit rétrospectif, au profit d’un suspens croissant. Par ailleurs, les grandes scènes de batailles et de stratégies militaires sont prenantes et variées, oscillant entre attaques furtives et nocturnes, combats singuliers, et batailles homériques.
De plus, une ironie discrète, due à la naïveté ou à l’inexpérience des personnages, atténue le ton chevaleresque qui aurait été en décalage avec le statut des héros-enfants, et maintient un équilibre précieux entre burlesque et épique. On ne nous prive donc pas de personnages et de situations comiques, dont parfois la légèreté révèle la volonté d’atteindre un public d’enfants.
Andrew Adamson a su à travers cette aventure énergique et fantastique atteindre une thématique plus élevée, celle du passage de l’enfance à l’âge adulte. « Je pense qu’avec ce roman, C. S. Lewis voulait parler de la transition entre l’enfance et l’âge adulte et du fait qu’il faut abandonner certaines choses pour grandir » explique-t-il. Ce thème est traité notamment par
le paradoxe toujours présent entre la taille, l’âge et la capacité des personnages, à mettre en relation avec le décalage entre apparence et réalité : les enfants Pevensie ont plus de 1300 ans dans le monde de Narnia, le nain qui les accompagne déclare avec un aplomb piqué « je suis une grande personne », et l’apparition retardée de la petite souris laisse d’abord croire à une créature effrayante, au moyen d’un suspens angoissant.
Dans la même veine, le Prince Caspian est soumis à une véritable initiation : contraint de quitter son monde, il est d’abord perdu et décontenancé en découvrant l’existence des narniens
qu’on lui avait cachée et la méchanceté de son oncle. Puis il doit apprendre à être un chef au contact des rois et reines Pevensie. Il passe ainsi de l’enfant perdu à l’adolescent en colère et enfin au roi humble et clément. Le jeu de l’acteur Ben Barnes, qui joue Caspian, révèle parfaitement cette évolution imperceptible, notamment dans l’assurance croissante de son maintien et de son regard. A cet effet, il était important que le casting soit réussi : « Le casting a été très long. Nous avons cherché en Argentine, en Italie, en France, en Espagne et en Angleterre. C'était un rôle difficile à distribuer parce que je voulais une personne capable de s'intégrer facilement à notre petite famille d'acteurs. » (Andrew Adamson, in Secret de
tournage, http://www.allocine.fr).
Enfin le thème du passage de l’enfance à l’âge adulte se voit dans la relation des personnages au passé de Narnia : Lucy voudrait retrouver le royaume qu’elle a connu et revoir ses amis du chapitre 1, alors que Susanne s’est résignée et accepte que les choses ne soient plus comme avant. L’une est encore une enfant alors que l’autre réagit comme une adulte. Cependant le film souligne un paradoxe, car si les personnages sont dans la nécessité de grandir pour
accomplir leur mission (Caspian pour devenir roi), ils ne doivent pas abandonner la pureté et la confiance dans les événements qu’incarne l’enfance. Ainsi les personnages adultes sont les premiers à perdre espoir, comme le nain noir Nikabrik qui se tourne vers la sorcière blanche, alors que Lucy reste certaine de l’intervention et de la victoire d’Aslan. C’est donc dans l’épreuve (l’aventure homérique) que les personnages sont contraints de grandir mais aussi de conserver un certain optimisme naïf. Cette délicate alchimie entre la rationalité et la maturité des adultes d'une part, et l'innocence de l'enfance d'autre part peut faire penser à la parole biblique : « Laissez venir à moi les petits enfants, et ne les en empêchez pas ; car le royaume de Dieu est pour ceux qui leur ressemblent. Je vous le dis en vérité, quiconque ne recevra pas le royaume de Dieu comme un petit enfant n'y entrera point. » (in Marc 10, 14-16).
Le Monde de Narnia chapitre 2 met aussi en scène une lutte entre les forces du bien et du mal, dont la ligne de démarcation est définie par la relation des personnages au pouvoir. En effet, le film prône une certaine attitude face au pouvoir, incarnée par le Prince Caspian, qui s’oppose à celle du roi Miraz. Tout d’abord, il fait l’apologie de l’harmonie, en établissant un parallélisme entre Peter et Caspian qui sont deux exilés, prétendant à un trône vacant, et tous deux jeunes rois épris de justice et de paix : la victoire est assurée lorsque ces deux forces se fondent en une seule, et mettent à
profit leur complémentarité. La scène finale, avec le don de l’épée royale, en est la parfaite illustration. Au contraire, le Roi Miraz est sans cesse confronter à la dissidence et n’y remédie que par la peur et la contrainte.
Le film fait aussi l’apologie du désintéressement face au pouvoir. En effet le mal est incarné par Miraz dont le seul objectif est de conserver le pouvoir ; il use ainsi du mensonge, pour usurper le trône et effacer l’histoire et la mémoire de Narnia, et de la peur pour supprimer les narniens et éliminer les dissidents. Au contraire, Caspian reçoit l’autorité d’Aslan alors qu’il ne se sent pas encore prêt ; car ce témoignage d’humilité et de désintéressement est pour Aslan la preuve que le prince est capable d’être roi.
Le
pouvoir est aussi analysé dans sa relation au passé. En effet, Caspian a pour mission de renouer la chaîne des temps, car l’existence d’un royaume ne peut se faire sans la reconnaissance de son histoire : Miraz était plus attentif à faire disparaître la mémoire de Narnia que les restes de son peuple décimé. Ainsi, pour sauver Narnia, le rôle des blaireaux est de se souvenir, et le rappel des rois et reines de l’Ancien Temps confirme cette nécessité de renouer avec le passé. Aslan incarne aussi la continuité du royaume de Narnia, et on le voit trois fois sculpté dans la pierre, figé dans le temps, avant son apparition véritable. Dans le roman, le blaireau dit à Caspian « tant que vous serez fidèle à l’Ancien Narnia, vous serez mon roi » explicitant le devoir de perpétuation
qui est deviné dans le film. Mais plus que l’éloge de la loyauté au passé et à l’identité culturelle de son royaume, on peut interpréter cet aspect du roman de Lewis comme celui de la fidélité absolue au socle de la foi chrétienne, c’est-à-dire aux Saintes Écritures. Anglican, Lewis a toujours défendu l’historicité des Évangiles, et la nécessité d’y recourir sans restriction. Le prince Caspian a toujours appris l’histoire de Narnia sous forme de légendes et de mythes, et une sorte de conversion s’opère en lui lorsqu’il découvre l’existence réelle de Narnia et s’engage à lui rendre son passé ; alors seulement il devient le guide.
De plus, l’inspiration chrétienne est indéniable. L’absence d’Aslan au début du film permet de mettre en relation les notions de foi et de salut. En effet, Aslan attend un acte de foi
avant d’intervenir, et il s’agit évidemment de croire sans avoir vu, d’où la difficulté pour les personnages de ne pas se prétendre abandonnés. Lucy représente à elle seule les Saintes femmes, car elle voit Aslan et tente d’en faire témoignage, mais ses compagnons n’accordent aucun crédit à ses affirmations. Et le nain représente Saint Thomas, lorsqu’Aslan rugit face à lui afin de lui montrer la certitude de sa présence et de lui reprocher son incrédulité. Le film prône donc une foi véritable, celle de Lucy qui, perdue et impuissante, déclare pourtant « je pense qu'il sait ce qu'il fait. »
Le thème de la rédemption et du pardon, déjà vu dans le premier volet, est encore présent. En effet, Edmund, dont la chute et le rachat est rappelé par la table de pierre
fendue, reste inébranlable face à la tentation du désespoir et du recours au mal qu’incarne la sorcière blanche. Par ailleurs, le général, à la fin du film, pourrait fort bien représenter le bon larron ; en acceptant de passer la porte qu’Aslan lui ouvre sur un autre monde, il fait un acte de foi et bénéficie d’un avenir plus heureux, puisqu’il a parlé le premier.
Ainsi le message du film est clair : foi et espoir dans le salut, et une morale inscrite dans l’exercice du pouvoir, dont la légitimité vient d’une autorité supérieure.
Par ailleurs, les décors sont travaillés avec soin ; Andrew Adamson considère
en effet « que les lieux sont aussi importants que les personnages de l’histoire » (making of, in http://fr.movies.yahoo.com). Il les fait donc contribuer à l’atmosphère fantastique, ou les investit d’un rôle symbolique. Ainsi le château de Miraz, qui possède d’inquiétantes gargouilles, et >« dont l’aspect s’inspire fortement du style fasciste des année 30 » (Roger Ford, décorateur, in Secret de tournage, http://www.allocine.fr), donne le ton avant même l’apparition des personnages.
Les costumes sont chargés du même rôle fantastique et
symbolique ; ainsi la costumière déclare « Nous sommes partis en Europe, en Espagne, en Italie et à Londres, pour voir ce qu'il y avait dans toutes les costumeries. Mais tout ce que nous avons trouvé ressemblait beaucoup à ce que l'on avait déjà vu dans d'autres films. En fin de compte, c'est dans un livre du musée du textile à Florence que nous avons trouvé exactement ce que nous cherchions: des costumes mélangeant les styles méditerranéen, pirate et médiéval. De plus, ces costumes dégageaient un sentiment général de méchanceté. Nous avons tout d'un coup réalisé que nous avions sous les yeux ce que portaient nos Telmarins. »( Isis Mussenden, interview in http://www.cinemovies.fr)
Ce monde fantastique, remarquable pour ses paysages, ses décors et ses costumes, devient homérique avec son peuple de créatures mythologiques. Le recours aux maquillages pour mettre en scène ces diverses créatures produit un ensemble travaillé et réussi. Les cent trente figurants qui interprètent les créatures ont nécessité chaque jour plusieurs heures de maquillage. A lui seul, l'acteur Warwick Davis prenait trois heures et demie de son temps pour se faire poser les prothèses faciales qui le transformaient en Nikabrik, le nain noir (in Secret de tournage, http://www.allocine.fr).
De plus, les effets spéciaux se sont appuyés sur le travail du premier volet pour passer au niveau supérieur. Andrew Adamson déclare en ce sens : « cette fois les créatures sont là, le travail de création est fait ; ça nous permet de nous concentrer un peu plus sur l’image. Par exemple dans les
batailles, j’ai toujours voulu voir la manière dont chacune des créatures se bat. Maintenant on peut jouer un peu plus là-dessus, on peut voir que les faunes se battent différemment des minotaures, des centaures et des griffons. » (making of, in http://fr.movies.yahoo.com)
Ce monde fantastique créé avec brio est mis au service d’une aventure épique et dynamique, par laquelle
le deuxième volet de la saga diffère fortement du premier. « Je pense que c’est une histoire plus dure, plus sombre » déclare Andrew Adamson (making of, in http://fr.movies.yahoo.com). En effet il ne s’agit plus d’une opposition entre un lion et une sorcière, mais d’un conflit politique, d’une guerre entre deux rois humains. La magie et le
merveilleux interviennent tardivement, conférant ainsi à l’ensemble du film un caractère plus guerrier. Par ailleurs, le conflit est familial et les trahisons intestines, d’où l’atmosphère plus assombrie.
Mais l’aventure est bien menée et reste dynamique. La finesse se constate notamment dans l’exposition du conflit : alors que le livre décrit la rencontre entre les enfants Pevensie et un nain qui leur apprend l’histoire de Narnia et des Telmarins (peuple descendant des terriens qui soumit les narniens), le film procède par découvertes successives, accompagnant les enfants partis à la recherche d’une explication, « nous allons essayer de comprendre ce qui se passe » décide Peter. Andrew Adamson évite ainsi, par le biais d’un
montage parallèle, la maladresse d’un flashback ou la lourdeur d’un récit rétrospectif, au profit d’un suspens croissant. Par ailleurs, les grandes scènes de batailles et de stratégies militaires sont prenantes et variées, oscillant entre attaques furtives et nocturnes, combats singuliers, et batailles homériques.
De plus, une ironie discrète, due à la naïveté ou à l’inexpérience des personnages, atténue le ton chevaleresque qui aurait été en décalage avec le statut des héros-enfants, et maintient un équilibre précieux entre burlesque et épique. On ne nous prive donc pas de personnages et de situations comiques, dont parfois la légèreté révèle la volonté d’atteindre un public d’enfants.
Andrew Adamson a su à travers cette aventure énergique et fantastique atteindre une thématique plus élevée, celle du passage de l’enfance à l’âge adulte. « Je pense qu’avec ce roman, C. S. Lewis voulait parler de la transition entre l’enfance et l’âge adulte et du fait qu’il faut abandonner certaines choses pour grandir » explique-t-il. Ce thème est traité notamment par
le paradoxe toujours présent entre la taille, l’âge et la capacité des personnages, à mettre en relation avec le décalage entre apparence et réalité : les enfants Pevensie ont plus de 1300 ans dans le monde de Narnia, le nain qui les accompagne déclare avec un aplomb piqué « je suis une grande personne », et l’apparition retardée de la petite souris laisse d’abord croire à une créature effrayante, au moyen d’un suspens angoissant.
Dans la même veine, le Prince Caspian est soumis à une véritable initiation : contraint de quitter son monde, il est d’abord perdu et décontenancé en découvrant l’existence des narniens
qu’on lui avait cachée et la méchanceté de son oncle. Puis il doit apprendre à être un chef au contact des rois et reines Pevensie. Il passe ainsi de l’enfant perdu à l’adolescent en colère et enfin au roi humble et clément. Le jeu de l’acteur Ben Barnes, qui joue Caspian, révèle parfaitement cette évolution imperceptible, notamment dans l’assurance croissante de son maintien et de son regard. A cet effet, il était important que le casting soit réussi : « Le casting a été très long. Nous avons cherché en Argentine, en Italie, en France, en Espagne et en Angleterre. C'était un rôle difficile à distribuer parce que je voulais une personne capable de s'intégrer facilement à notre petite famille d'acteurs. » (Andrew Adamson, in Secret de
tournage, http://www.allocine.fr).
Enfin le thème du passage de l’enfance à l’âge adulte se voit dans la relation des personnages au passé de Narnia : Lucy voudrait retrouver le royaume qu’elle a connu et revoir ses amis du chapitre 1, alors que Susanne s’est résignée et accepte que les choses ne soient plus comme avant. L’une est encore une enfant alors que l’autre réagit comme une adulte. Cependant le film souligne un paradoxe, car si les personnages sont dans la nécessité de grandir pour
accomplir leur mission (Caspian pour devenir roi), ils ne doivent pas abandonner la pureté et la confiance dans les événements qu’incarne l’enfance. Ainsi les personnages adultes sont les premiers à perdre espoir, comme le nain noir Nikabrik qui se tourne vers la sorcière blanche, alors que Lucy reste certaine de l’intervention et de la victoire d’Aslan. C’est donc dans l’épreuve (l’aventure homérique) que les personnages sont contraints de grandir mais aussi de conserver un certain optimisme naïf. Cette délicate alchimie entre la rationalité et la maturité des adultes d'une part, et l'innocence de l'enfance d'autre part peut faire penser à la parole biblique : « Laissez venir à moi les petits enfants, et ne les en empêchez pas ; car le royaume de Dieu est pour ceux qui leur ressemblent. Je vous le dis en vérité, quiconque ne recevra pas le royaume de Dieu comme un petit enfant n'y entrera point. » (in Marc 10, 14-16).
Le Monde de Narnia chapitre 2 met aussi en scène une lutte entre les forces du bien et du mal, dont la ligne de démarcation est définie par la relation des personnages au pouvoir. En effet, le film prône une certaine attitude face au pouvoir, incarnée par le Prince Caspian, qui s’oppose à celle du roi Miraz. Tout d’abord, il fait l’apologie de l’harmonie, en établissant un parallélisme entre Peter et Caspian qui sont deux exilés, prétendant à un trône vacant, et tous deux jeunes rois épris de justice et de paix : la victoire est assurée lorsque ces deux forces se fondent en une seule, et mettent à
profit leur complémentarité. La scène finale, avec le don de l’épée royale, en est la parfaite illustration. Au contraire, le Roi Miraz est sans cesse confronter à la dissidence et n’y remédie que par la peur et la contrainte.
Le film fait aussi l’apologie du désintéressement face au pouvoir. En effet le mal est incarné par Miraz dont le seul objectif est de conserver le pouvoir ; il use ainsi du mensonge, pour usurper le trône et effacer l’histoire et la mémoire de Narnia, et de la peur pour supprimer les narniens et éliminer les dissidents. Au contraire, Caspian reçoit l’autorité d’Aslan alors qu’il ne se sent pas encore prêt ; car ce témoignage d’humilité et de désintéressement est pour Aslan la preuve que le prince est capable d’être roi.
Le
pouvoir est aussi analysé dans sa relation au passé. En effet, Caspian a pour mission de renouer la chaîne des temps, car l’existence d’un royaume ne peut se faire sans la reconnaissance de son histoire : Miraz était plus attentif à faire disparaître la mémoire de Narnia que les restes de son peuple décimé. Ainsi, pour sauver Narnia, le rôle des blaireaux est de se souvenir, et le rappel des rois et reines de l’Ancien Temps confirme cette nécessité de renouer avec le passé. Aslan incarne aussi la continuité du royaume de Narnia, et on le voit trois fois sculpté dans la pierre, figé dans le temps, avant son apparition véritable. Dans le roman, le blaireau dit à Caspian « tant que vous serez fidèle à l’Ancien Narnia, vous serez mon roi » explicitant le devoir de perpétuation
qui est deviné dans le film. Mais plus que l’éloge de la loyauté au passé et à l’identité culturelle de son royaume, on peut interpréter cet aspect du roman de Lewis comme celui de la fidélité absolue au socle de la foi chrétienne, c’est-à-dire aux Saintes Écritures. Anglican, Lewis a toujours défendu l’historicité des Évangiles, et la nécessité d’y recourir sans restriction. Le prince Caspian a toujours appris l’histoire de Narnia sous forme de légendes et de mythes, et une sorte de conversion s’opère en lui lorsqu’il découvre l’existence réelle de Narnia et s’engage à lui rendre son passé ; alors seulement il devient le guide.
De plus, l’inspiration chrétienne est indéniable. L’absence d’Aslan au début du film permet de mettre en relation les notions de foi et de salut. En effet, Aslan attend un acte de foi
avant d’intervenir, et il s’agit évidemment de croire sans avoir vu, d’où la difficulté pour les personnages de ne pas se prétendre abandonnés. Lucy représente à elle seule les Saintes femmes, car elle voit Aslan et tente d’en faire témoignage, mais ses compagnons n’accordent aucun crédit à ses affirmations. Et le nain représente Saint Thomas, lorsqu’Aslan rugit face à lui afin de lui montrer la certitude de sa présence et de lui reprocher son incrédulité. Le film prône donc une foi véritable, celle de Lucy qui, perdue et impuissante, déclare pourtant « je pense qu'il sait ce qu'il fait. »
Le thème de la rédemption et du pardon, déjà vu dans le premier volet, est encore présent. En effet, Edmund, dont la chute et le rachat est rappelé par la table de pierre
fendue, reste inébranlable face à la tentation du désespoir et du recours au mal qu’incarne la sorcière blanche. Par ailleurs, le général, à la fin du film, pourrait fort bien représenter le bon larron ; en acceptant de passer la porte qu’Aslan lui ouvre sur un autre monde, il fait un acte de foi et bénéficie d’un avenir plus heureux, puisqu’il a parlé le premier.
Ainsi le message du film est clair : foi et espoir dans le salut, et une morale inscrite dans l’exercice du pouvoir, dont la légitimité vient d’une autorité supérieure.