Le Procès du siècle

Film : Le Procès du siècle (2016)

Réalisateur : Mick Jackson

Acteurs : Rachel Weisz (Deborah Lipstadt), Tom Wilkinson (Richard Rampton), Timothy Spall (David Irving), Andrew Scott (Anthony Julius)

Durée : 01:50:00


A la fin des années 1980, alors que la seconde guerre mondiale entre dans le domaine de l’Histoire, le monde occidental transforma le débat historien en débat politique. Apparaissent dans certains pays des lois équivalentes à la loi Gayssot en France, qui condamne toute remise en cause, minimisation ou éloge d’un crime contre l’humanité (in extenso : la Shoah). Cette période voit aussi l’émergence d’un courant de pensée négationniste qui s’étale du néo-nazi en quête de réhabilitation au simple historien sceptique.

David Irving (magnifiquement incarné par Timothy Spall) fait partie de ces négationnistes. Il met au défi la jeune historienne juive Deborah Lipstadt (on regrette que la BBC n’ait pas trouvé meilleure actrice) de prouver l’authenticité de la Shoah. L’enjeu est intéressant, et la BBC a effectivement eu le courage d’exposer les thèses négationnistes de David Irving sans les tourner en ridicule, et même réussit à peindre un portrait du complotiste qui ne soit pas un affreux mangeur de petits enfants. Nous suivons avec un regard neutre les deux parties exposer leur thèses et argumenter leur propos.

La réalisation est très télévisuelle, mais fait honneur malgré tout au genre du film de procès que votre serviteur affectionne tant ! Cependant, on regrette que sous prétexte d’un final que l’on voudrait tonitruant, on construise des faux retournements de situation. Aussi, il faut l’avouer, en dehors des scènes de tribunal où la langue de Shakespeare est admirablement honorée, le film est particulièrement bavard et les discours exagérément tire-larmes. 

Au nom de tout cela, la BBC réussit un film historique respectable, qui aurait sa place dans les classes de lycée, mais qui décevra les plus férus d’histoire et de philosophie puisque la plus grande question n’est absolument pas traitée : celle du droit à l’erreur, du droit de penser mal ! Le bien-fondé d’une condamnation telle que celle de David Irving n’est absolument pas discuté, il est admis… comme toutes les opinions ayant trait de près ou de loin au nazisme et aux événements qui y sont liés ! Bilan d’un demi-siècle de tergiversations autour de la Shoah, de ses défenseurs, ses contradicteurs et des tabous qui l’entourent, Le Procès du Siècle est aussi le symptôme d’une société frileuse et figée, qui compte sur les discours larmoyants et les tribunaux pour tenir à distance des monstres qu’elle démystifierait sûrement en les affrontant sur le terrain de la raison.

Commentaires

Portrait de GdeMaron
Le procès du siècle

 

Ce n’est évidemment pas le film « du siècle », mais si Anne, mon épouse, aurait « pu ne pas le voir » je suis à la limite de penser le contraire –« il aurait été très dommage de ne pas le voir »-, et pourtant  Dieu sait si ces remakes incessants de procès du nazisme m’en donnent une indigestion tellement cet arbre cache la forêt des cent millions de morts du communisme.

 

Ce long-métrage m’apparaît véritablement différent, même si –rassurez-vous – les « bons » continuent de gagner, les « mauvais » de perdre et le politiquement correct d’être sauf.

 

 

 

Je n’avais jamais entendu parler de cette affaire Deborah Lipstadt vs David Irving, qui se serait déroulée en l’an 2000, et je ne sais pas dans quelle mesure ce film est fidèle, et infidèle, aux faits.

 

Il se distingue en tout cas de la prolifération des autres productions en ce sens que, d’habitude, comme l’affirme Deborah Lipstadt dès les premières images, on ne discute pas avec ceux qu’on qualifie, à tort ou à raison, de « négationnistes » ; on leur refuse toute « disputation », toute confrontation et même toute recherche historique au sujet de l’holocauste. En France le ministre communiste Gayssot a d’ailleurs inscrit dans la loi du 13 juillet 1990 l’interdiction de toute « contestation », et donc de tout débat portant sur les « crimes contre l’humanité » définis par le Tribunal de Nuremberg.

 

 

 

Je m’étonne donc de la distribution de ce film en France qui donne la parole à un « révisionniste », même s’il lui prête des propos suffisamment stupides et abjects pour ôter toute crédibilité à ses écrits d’historien parmi lesquels on souligne des erreurs et des « mensonges volontaires ».

 

L’intérêt de ce film, selon moi, est en fait de poser sur la place publique la question des «vérités officielles » dont il est interdit de débattre. Il démontre que cette interdiction donne du poids à ceux qui s’y opposent tandis que la discussion favorise l’émergence de la vérité.

 

Non toutes les opinions ne sont pas « respectables », sauf la liberté laissée à chacun de les professer publiquement pour pouvoir démontrer, tout autant publiquement, qu’elles ne sont pas conformes à la vérité.

 

Encore, effectivement, faut-il admettre le concept de vérité,  alors que ceux qui définissent des « vérités officielles »  sont généralement les mêmes qui évacuent ledit concept - c’est la question de Pilate : « qu’est-ce que la vérité ? -».