Les Immortels

Film : Les Immortels (2011)

Réalisateur : Tarsem Singh

Acteurs : Henry Cavill (Thésée), Mickey Rourke (Le roi Hypérion), Luke Evans (Zeus), Stephen Dorff (Stavros)

Durée : 01:50:00


Un film à l'esthétique travaillée mais qui se complaît dans la violence et s'éloigne considérablement de la légende grecque de Thésée.

Disons le tout net : quand Tarsem Singh a fait son film, il devait avoir fumé un gros, un très gros morceau de moquette. Non pas que la réalisation soit fofolle (il s’inscrit gentiment dans la lignée de 300, produit par les mêmes en 2006 et réalisé avec des images policées en High Dynamic Range, HDR, qui donne ce ton sombre et argenté), mais il réécrit la mythologie grecque avec un aplomb désarçonnant. Au moins Henry Cavill, son acteur principal, est honnête : « Je me suis très peu servi de ma connaissance de la mythologie pour construire mon personnage. Le film permet d’établir certains parallèles avec la mythologie populaire de Thésée, mais il est très diff& eacute;rent du mythe traditionnel. Il s'agit d'une bataille d’hommes face à d’autres hommes. Il existe des dieux et des Titans, mais ils ne s’immiscent pas directement dans les affaires humaines. » (in dossier de presse)

 

Les « geeks » de la langue grecque, donc, que la phrase « les oies tricotent » font grassement rigoler, en seront pour leurs frais. Thésée n’est dans ce film qu’un guerrier qui affronte le roi Hypérion, un monarque conquérant complètement pété de la cafetière qui presse les organes comme on se sert un jus d’orange bien frais, orange sanguine bien sûr. Thésée n’est plus à présenter, mais rappelons pour la petite histoire que, dans la mythologie grecque, Hypérion est un Titan, ce qui n’est pas le cas ici. Il est vrai qu’une certaine légende rapport& eacute;e par Diodore de Sicile (comment ? vous ne connaissez pas Diodore ?) en fait un mortel devenu roi, mais dans cette version les relations entre celui-ci et les Titans furent un peu houleuses, puisque ces derniers ont dérouillé un de ses fils, Hélios, avant de le noyer dans le fleuve Éridan. Dans le film en revanche, Hypérion est plutôt en guerre contre les dieux, parce que ceux-ci ne sont pas intervenus au moment où sa famille se faisait massacrer.

En fait, Hypérion est en guerre contre tout, pourvu qu’il puisse assouvir sa soif de massacre. Il repeint régulièrement les murs de son palais en rouge en explosant ses soldats qui, par un grand mystère, ne se plaignent jamais à l’inspection du travail et ne préfèrent pas pointer aux Assedic.

Le rouge, ça n’est plus ce que c’était... Co-scénariste avec son frère, Charley Parlapanides parle dans le dossier de presse de « folie meurtrière. » Tu m’étonnes...

 

Pendant que les soldats d’Hypérion font bien gaffe de ne pas énerver pépère, notre Thésée, entraîné par Zeus en personne (s’il vous plaît!), incognito sous les traits d’un vieillard, mène sa vie tranquillement, en brave athée qu’il est. Ceci ne semble gêner ni Zeus lui-même ni sa mère, pourtant très croyante, mais tout le monde a l’air persuadé que c’est un bon gars qui est du côté des dieux. Ils avaient dû lire le scénario car, en effet, Thésée va servir la cause des dieux contre Hypérion et les Titans.

Le film insiste lourdement sur la question de la foi. L’homme ne voit pas les dieux, qui existent pourtant sous leurs mignonnes armures dorées qui m’ont rappel& eacute; Les Chevaliers du Zodiaque de mon enfance (ha ! nostalgie !). Incrédule, Thésée ne croit pas à l’existence des dieux. De plus ceux-ci ont pour règle (et oui, les dieux sont soumis à des règles ce qui, pour le coup, est assez conforme à la tragédie grecque) de ne pas intervenir dans les affaires humaines. Du coup personne n’intervient quand l’autre barjot égorge sa mère, ce qui éveille en Thésée révolte et colère. Pour Vlas Parlapanides, Thésée et Hypérion sont semblables, et c’est leurs choix qui les différencient : « Thésée et le roi Hypérion sont comme les deux faces d'une même pièce. Entre autres points communs, ils ont tous les deux connu la persécution et l’assujettissement. L’un a choisi la réaction la plus sombre, pas l’autre.& nbsp;»

Notre héros va alors rencontrer une oracle jeune et jolie qui fait, comme tout oracle qui se respecte, des rêves tout bizarres, qu’elle arrive à interpréter (c’est fortiche parce que moi j’y comprenais rien !). Cette oracle, en plus de lui donner son corps, va également essayer de le convaincre de croire. Tout le film devient alors une quête spirituelle (de niveau -2, ne nous emballons pas !) ponctuée de combats pour la survie du peuple grec et, précisons-le tout de même, pour assouvir la vengeance de Thésée.

Celui-ci va même prendre la tête d’une armée pour combattre le terrible Hypérion, dont le hobby est maintenant de s’acharner contre un ancien Grec qui s’est rangé à ses côtés. Pour le producteur Gianni Nunnari, débordant d’optimisme, «Le message de ce film est le suivant: trouvez votre place dans la vie et prenez vos responsabilités ! Si vous y parvenez, vous mènerez une existence qui dépasse toutes vos espérances. » Il faut le dire vite.

 

Lorsque, malgré toute la détermination de Thésée, les Titans (qui ressemblent plus à des orcs du Seigneur des anneaux qu’à des géants portant le monde sur leurs épaules) vont être libérés par son ennemi, les dieux vont alors se manifester pour combattre la menace. Quoiqu’ils aient de jolies armures, ils n’ont alors plus grand chose de divin : ils se font littéralement déchiqueter sur place par leurs monstres d’ennemis et connaissent, ne me demandez pas pourquoi, la mort. Seul Zeus et quelques-uns vont parvenir à s’en sortir en faisant écrouler la montagne sur les Titans, devenus bien faibles pour les besoins du scénario.

 

Vraiment n’y allez que pour voir de la baston à gogo et écouter des répliques pour bourrins. Pour le reste, même 300 ou Troie devraient faire l’affaire...