Les meilleurs amis du monde

Film : Les meilleurs amis du monde (2009)

Réalisateur : Julien Rambaldi

Acteurs : Marc Lavoine (Max), Pierre-François Martin-Laval (Jean-Claude), Léa Drucker (Mathilde), Pascale Arbillot (Lucie)

Durée : 01:31:00


la comédie est efficace, bien campée sur le jeu attendrissant de Pierre-François Martin-Laval, sur la sincérité de Léa Drucker et de Pascale Arbillot, mais bute quelques fois sur de petits manques de conviction de Marc Lavoine. Déjà ensemble dans Le petit Nicolas, Maxime Godart et Vincent Claude se donnent en toile de fond une réplique accessoire. Les personnages et situations sont fort justement dessinés et l'on ne peut s'empêcher de se reconnaître dans ces petits défauts de la vie quotidienne. Julien Rambaldi signe en effet une réflexion qui explore tous les recoins de l'amitié, de la simple relation professionnelle à la vraie amitié en passant par le copinage. Le message est limpide : pas d'amitié sans sincérité. Au cours du film, qui aime à osciller entre humour et gravité, la méchanceté change de camp. Alors que l'on est d'abord révolté par la façon dont les nouveaux riches parlent de leurs amis, on ne peut cautionner la façon brutale et désinhibée avec laquelle ces derniers se vengent, devenant par leurs actes bien pires que les coupables en paroles. Dans un tel contexte la morale du film devient libératoire : se dire la vérité, tout simplement, même si celle-ci n'est parfois agréable ni à dire, ni à entendre. Cette attitude n'est pas sans rappeler la notion de « correction fraternelle, » pratiquée dans les monastères, à cette différence que, dans le film, cette sincérité ne semble pas s'accompagner nécessairement de charité. Voilà en quoi l'esprit du siècle, qui corrode jusqu'au meilleures consciences, se révèle dans le film tel qu'il est : en oubliant que toute vérité n'est pas nécessairement bonne à dire on oublie, par la même occasion, que ce qui mérite d'être révélé exige souvent beaucoup de délicatesse. Dans une société où le refus des amitiés de façade entraînent toutes les inimitiés et où, mal entendue, la notion d'amitié est aussi distribuée que diluée (d'aucuns ne comptent plus leurs meilleurs amis), on apprécie la distinction que fait le film entre le copinage et l'amitié car, si le copinage peut s'entendre d'une simple relation sincère même dans les difficultés, l'amitié a ceci de plus grand qu'il autorise à dire les choses parfois fort désagréables que l'ami doit entendre pour son bien. Ultime épreuve de l'amitié profonde, ces moments de vérités écartent bien vite les amitiés intéressées et les meilleurs amis illusoires. Pour reprendre une distinction fort éclairante d'Aristote, la relation à l'autre, comme tous les biens de ce monde, peut être appréciée pour son utilité (c'est le « réseau »), pour son caractère agréable (les copains avec lesquels on passe du bon temps), ou enfin pour son caractère « honnête » (mot étymologiquement rattaché à la notion d' « honneur »). Conçu comme l'amour gratuit de l'autre recherché pour lui-même et non pour ce qu'il procure, n'est-ce pas ce dernier stade qui mérite seul ce nom d'« amitié » ?