Avouons-le, nous les aimons, nos schtroumpfs ! D'abord ils sont petits, mignons, ensuite ils sont une petite part de nous-même (moi c'est le schtroumpf gourmand, et vous ?), et ils sont enfin (cocorico !) français. Mais du coup ce sont NOS schtroumpfs, et l'on s'inquiète de voir la toute-puissante Hollywood s'en saisir pour les transformer en acteurs insipides d'une comédie américaine classique. Hé bien nous avons raison car oui, ils ont osé. Peyo est trahi ! Quelle horreur ! Non que la
comédie soit inefficace - embusqué entre deux fauteuils, j'ai surpris quelques enfants en train de rigoler pour de vrai. Mais les petits êtres bleus sont les invités de la comédie la plus classique, la plus traditionnelle, la plus académique qui soit. Reconnaissons une chose : projeter les schtroumpfs dans l'univers new-yorkais relevait de la gageure ! Mais ou bien les américains ont tous les mêmes problèmes insignifiants (« mon Dieu ! Je vais être papa ! Comment assumer cette charge ? »), ou bien les scénaristes manquaient cruellement d'imagination, malgré le fait d'avoir inventé trois nouveaux schtroumpfs pour le film : Schtroumpf paniqué, Schtroumpf dingo et Schtroumpf courageux.
Tous ces mangeurs de salsepareilles sont tout de même moins mignons dans le film que dans la bande dessinée, pour des raisons techniques. Alors que la BD schématise la peau que le lecteur peut s'imaginer à son goût, le souci de réalisme a
poussé les techniciens à multiplier les détails : « Le travail sur la texture de la peau des Schtroumpfs a été très important pour convaincre le public qu’ils peuvent vraiment faire partie de notre monde et qu’ils ne sont pas si différents de nous. L’oeil perçoit la texture en fonction de la façon dont la lumière se reflète sur la surface. Elle vous indique en quoi sont faites les choses et ce qu’il y a à l’intérieur. Nos Schtroumpfs ont des pores, des taches de rousseur et du duvet sur leur visage. Et bien sûr, le Grand Schtroumpf a une barbe, et la Schtroumpfette de longs cheveux. Nous avons utilisé tous ces éléments pour définir nos personnages et donner le sentiment qu’ils sont réels. » (Richard R. Hoover, superviseur des effets visuels, in Dossier de presse).
Neil Patrick Harris, devenu
célèbre grâce à la série How I met your mother, pâle copie de Friends, et récemment à l'oeuvre dans le film Sortilège (de Daniel Barnz, en 2011), est donc un homme d'affaire brillant et torturé par une patronne sans états d'âme. Comme prévu, on ne fait pas dans le surprenant...
Ce jeune homme va être papa, ce qui semble constituer le plus grand défi de toute sa carrière d'homme responsable. Pour son plus grand bien, il va voir débarquer dans sa vie quelques Schtroumpfs à la philosophie prétendument édifiante. « Prétendument » dirons-nous, car on ne comprend pas du tout en quoi les aventures passées avec ces lutins venus d'ailleurs vont le rendre meilleur. Comme cet aspect du film est obscur, il faut se raccrocher au dossier de presse, qui fait ce qu'il peut pour sauver les meubles : « Quand les Schtroumpfs entrent dans sa vie, il doit faire preuve de patience et
se comporter avec eux presque comme un parent, et en faisant cela il réalise qu’il peut être un très bon père. Grace est naturellement plus maternelle avec les Schtroumpfs, alors que Patrick subit un peu tout ce qui se passe. » (Neil Patrick Harris). Ha ? bon...
D'abord exaspéré par ces petits êtres très remuants, il va donc devenir ouvert, tolérant et responsable, entre deux proverbes particulièrement plats du Grand Schtroumpf, qui conserve sa voix de la série, prêtée par Jonathan Winters. Désireux de jouer les grands-pères pleins de sagesse, ce dernier saura resservir l'idéologie outrageusement crétine qui dessert la plupart des films hollywoodiens, et surtout ceux qui s'adressent aux enfants. Alors que Patrick, toujours dans ses grands soucis existentiels, se demande comment il pourra être un bon papa, il annonce : « savoir ce qu'il faut faire, ça ne vient pas de là-haut, dit-il en montrant sa tête, ça vient d'
ici, ajoute-t-il en montrant son coeur » Non mais franchement, à partir de quel moment précis les cinéastes cesseront-ils de prendre leur public pour un gros tas d'abrutis ? Qu'on essaie de nous faire croire que le coeur est le siège du savoir est déjà osé, mais cessons donc de faire de la réflexion (et donc de l'intelligence), l'ennemie de son propriétaire ! Il va bientôt être suspect de se fier à ses raisonnements ! Au nom de quoi ? Un être idiot est-il plus rempli d'amour qu'un être intelligent ? L'amour n'est-il plus qu'un sentiment ? Le parent exaspéré par son enfant est-il moins aimant ? Il me semblait, à moi grand naïf, que le fait de continuer à vouloir le bien de son enfant malgré ce soudain manque d'affection était la plus belle preuve d'amour.
D'ailleurs ce grand Schtroumpf à la réputation trahie réalise-t-il que c'est bien son intelligence qui dicte autant sa conduite que ses
conseils ?
Ce futur père inquiet progresse malgré ces conseils malavisés, mais il n'est pas le seul. Une partie de l'intrigue tourne autour du Schtroumpf maladroit, qui accumule les gaffes et se sent, de ce fait, exclu de cette noble communauté de squatteurs de champignons. Le réalisateur ne s'y trompe pas : « Le Schtroumpf Maladroit est le coeur et l’âme du film. Son parcours est le plus émouvant de tous. C’est un peu le petit frère, celui qui est la cause de tous leurs ennuis et qui essaye de trouver sa place dans la grande famille des Schtroumpfs. »
S'adressant au Schtroumpf grognon Grace, la compagne de Patrick Winslow, donne le ton : « ce n'est pas parce que tu t'appelles Schtroumpf grognon que tu dois toujours être grognon. » Oui... Bon... pas de quoi faire rougir Socrate certes, mais
suffisamment pour montrer au Schtroumpf maladroit qu'il n'est pas prisonnier de sa condition, lui ouvrant des perspectives vertigineuses. En fait, il restera toujours malhabile, mais ce travers saura, en temps voulu, montrer sa vertu.
La palme du personnage le moins original revient incontestablement à Gargamel, dont Hank Azaria, son interprète, donne une interprétation psychologique inédite : « Je pense qu’en réalité il déteste les Schtroumpfs parce qu’ils sont une famille heureuse et que lui vit seul avec son chat. Il est poussé par la haine. C’est un personnage complexe et très intéressant. » La démarche rythmée par une musique tellement classique qu'elle en est irritante (vous savez, ce type de musique que n'importe quel débutant peut reproduire avec simplement une contrebasse et une clarinette...), accompagné par l'indéfectible Azraël, ce personnage entre Godefroi de
Montmirail (Les visiteurs, de Jean-Marie Poiré, en 1995) et les méchants de Maman j'ai raté l'avion (de Chris Columbus, en 1990, sur lequel Raja Gosnell a d'ailleurs travaillé) allie aux situations ridicules du script un jeu d'acteur pour le moins hésitant.
Signalons enfin ce qui mécontentera les puristes : associer les Schtroumpfs à un univers très moderne. On verra donc les Schtroumpfs rapper, rocker, ou jouer à Guitar Hero, ce qui casse franchement le mythe du gentil Schtroumpf doux et innocent (hé oui ! Vous l'aurez deviné : je fais partie de ces puristes !). Pourtant Véronique Culliford, fille de Pierre Culliford, alias « Peyo, » ne voit pas le problème : « Certaines choses changent dans la vie, mais les Schtroumpfs restent les mêmes. Leurs histoires sont toujours aussi populaires à
travers les générations parce que les gens ne changent pas. Nous restons nous-mêmes et les Schtroumpfs sont en quelque sorte notre reflet. Nous pouvons nous adapter au temps qui passe, aux nouvelles technologies, mais au fond, nous restons ce que nous sommes. » Quant à la Schtroumpfette qui joue les Marylin Monroe au-dessus d'une bouche d'aération... sans commentaire... Plus rien n'est innocent, que voulez-vous ma bonne dame, le monde devient fou !
Avouons-le, nous les aimons, nos schtroumpfs ! D'abord ils sont petits, mignons, ensuite ils sont une petite part de nous-même (moi c'est le schtroumpf gourmand, et vous ?), et ils sont enfin (cocorico !) français. Mais du coup ce sont NOS schtroumpfs, et l'on s'inquiète de voir la toute-puissante Hollywood s'en saisir pour les transformer en acteurs insipides d'une comédie américaine classique. Hé bien nous avons raison car oui, ils ont osé. Peyo est trahi ! Quelle horreur ! Non que la
comédie soit inefficace - embusqué entre deux fauteuils, j'ai surpris quelques enfants en train de rigoler pour de vrai. Mais les petits êtres bleus sont les invités de la comédie la plus classique, la plus traditionnelle, la plus académique qui soit. Reconnaissons une chose : projeter les schtroumpfs dans l'univers new-yorkais relevait de la gageure ! Mais ou bien les américains ont tous les mêmes problèmes insignifiants (« mon Dieu ! Je vais être papa ! Comment assumer cette charge ? »), ou bien les scénaristes manquaient cruellement d'imagination, malgré le fait d'avoir inventé trois nouveaux schtroumpfs pour le film : Schtroumpf paniqué, Schtroumpf dingo et Schtroumpf courageux.
Tous ces mangeurs de salsepareilles sont tout de même moins mignons dans le film que dans la bande dessinée, pour des raisons techniques. Alors que la BD schématise la peau que le lecteur peut s'imaginer à son goût, le souci de réalisme a
poussé les techniciens à multiplier les détails : « Le travail sur la texture de la peau des Schtroumpfs a été très important pour convaincre le public qu’ils peuvent vraiment faire partie de notre monde et qu’ils ne sont pas si différents de nous. L’oeil perçoit la texture en fonction de la façon dont la lumière se reflète sur la surface. Elle vous indique en quoi sont faites les choses et ce qu’il y a à l’intérieur. Nos Schtroumpfs ont des pores, des taches de rousseur et du duvet sur leur visage. Et bien sûr, le Grand Schtroumpf a une barbe, et la Schtroumpfette de longs cheveux. Nous avons utilisé tous ces éléments pour définir nos personnages et donner le sentiment qu’ils sont réels. » (Richard R. Hoover, superviseur des effets visuels, in Dossier de presse).
Neil Patrick Harris, devenu
célèbre grâce à la série How I met your mother, pâle copie de Friends, et récemment à l'oeuvre dans le film Sortilège (de Daniel Barnz, en 2011), est donc un homme d'affaire brillant et torturé par une patronne sans états d'âme. Comme prévu, on ne fait pas dans le surprenant...
Ce jeune homme va être papa, ce qui semble constituer le plus grand défi de toute sa carrière d'homme responsable. Pour son plus grand bien, il va voir débarquer dans sa vie quelques Schtroumpfs à la philosophie prétendument édifiante. « Prétendument » dirons-nous, car on ne comprend pas du tout en quoi les aventures passées avec ces lutins venus d'ailleurs vont le rendre meilleur. Comme cet aspect du film est obscur, il faut se raccrocher au dossier de presse, qui fait ce qu'il peut pour sauver les meubles : « Quand les Schtroumpfs entrent dans sa vie, il doit faire preuve de patience et
se comporter avec eux presque comme un parent, et en faisant cela il réalise qu’il peut être un très bon père. Grace est naturellement plus maternelle avec les Schtroumpfs, alors que Patrick subit un peu tout ce qui se passe. » (Neil Patrick Harris). Ha ? bon...
D'abord exaspéré par ces petits êtres très remuants, il va donc devenir ouvert, tolérant et responsable, entre deux proverbes particulièrement plats du Grand Schtroumpf, qui conserve sa voix de la série, prêtée par Jonathan Winters. Désireux de jouer les grands-pères pleins de sagesse, ce dernier saura resservir l'idéologie outrageusement crétine qui dessert la plupart des films hollywoodiens, et surtout ceux qui s'adressent aux enfants. Alors que Patrick, toujours dans ses grands soucis existentiels, se demande comment il pourra être un bon papa, il annonce : « savoir ce qu'il faut faire, ça ne vient pas de là-haut, dit-il en montrant sa tête, ça vient d'
ici, ajoute-t-il en montrant son coeur » Non mais franchement, à partir de quel moment précis les cinéastes cesseront-ils de prendre leur public pour un gros tas d'abrutis ? Qu'on essaie de nous faire croire que le coeur est le siège du savoir est déjà osé, mais cessons donc de faire de la réflexion (et donc de l'intelligence), l'ennemie de son propriétaire ! Il va bientôt être suspect de se fier à ses raisonnements ! Au nom de quoi ? Un être idiot est-il plus rempli d'amour qu'un être intelligent ? L'amour n'est-il plus qu'un sentiment ? Le parent exaspéré par son enfant est-il moins aimant ? Il me semblait, à moi grand naïf, que le fait de continuer à vouloir le bien de son enfant malgré ce soudain manque d'affection était la plus belle preuve d'amour.
D'ailleurs ce grand Schtroumpf à la réputation trahie réalise-t-il que c'est bien son intelligence qui dicte autant sa conduite que ses
conseils ?
Ce futur père inquiet progresse malgré ces conseils malavisés, mais il n'est pas le seul. Une partie de l'intrigue tourne autour du Schtroumpf maladroit, qui accumule les gaffes et se sent, de ce fait, exclu de cette noble communauté de squatteurs de champignons. Le réalisateur ne s'y trompe pas : « Le Schtroumpf Maladroit est le coeur et l’âme du film. Son parcours est le plus émouvant de tous. C’est un peu le petit frère, celui qui est la cause de tous leurs ennuis et qui essaye de trouver sa place dans la grande famille des Schtroumpfs. »
S'adressant au Schtroumpf grognon Grace, la compagne de Patrick Winslow, donne le ton : « ce n'est pas parce que tu t'appelles Schtroumpf grognon que tu dois toujours être grognon. » Oui... Bon... pas de quoi faire rougir Socrate certes, mais
suffisamment pour montrer au Schtroumpf maladroit qu'il n'est pas prisonnier de sa condition, lui ouvrant des perspectives vertigineuses. En fait, il restera toujours malhabile, mais ce travers saura, en temps voulu, montrer sa vertu.
La palme du personnage le moins original revient incontestablement à Gargamel, dont Hank Azaria, son interprète, donne une interprétation psychologique inédite : « Je pense qu’en réalité il déteste les Schtroumpfs parce qu’ils sont une famille heureuse et que lui vit seul avec son chat. Il est poussé par la haine. C’est un personnage complexe et très intéressant. » La démarche rythmée par une musique tellement classique qu'elle en est irritante (vous savez, ce type de musique que n'importe quel débutant peut reproduire avec simplement une contrebasse et une clarinette...), accompagné par l'indéfectible Azraël, ce personnage entre Godefroi de
Montmirail (Les visiteurs, de Jean-Marie Poiré, en 1995) et les méchants de Maman j'ai raté l'avion (de Chris Columbus, en 1990, sur lequel Raja Gosnell a d'ailleurs travaillé) allie aux situations ridicules du script un jeu d'acteur pour le moins hésitant.
Signalons enfin ce qui mécontentera les puristes : associer les Schtroumpfs à un univers très moderne. On verra donc les Schtroumpfs rapper, rocker, ou jouer à Guitar Hero, ce qui casse franchement le mythe du gentil Schtroumpf doux et innocent (hé oui ! Vous l'aurez deviné : je fais partie de ces puristes !). Pourtant Véronique Culliford, fille de Pierre Culliford, alias « Peyo, » ne voit pas le problème : « Certaines choses changent dans la vie, mais les Schtroumpfs restent les mêmes. Leurs histoires sont toujours aussi populaires à
travers les générations parce que les gens ne changent pas. Nous restons nous-mêmes et les Schtroumpfs sont en quelque sorte notre reflet. Nous pouvons nous adapter au temps qui passe, aux nouvelles technologies, mais au fond, nous restons ce que nous sommes. » Quant à la Schtroumpfette qui joue les Marylin Monroe au-dessus d'une bouche d'aération... sans commentaire... Plus rien n'est innocent, que voulez-vous ma bonne dame, le monde devient fou !