On vous épargnera les banalités à propos des difficultés à rendre des suites aussi surprenantes que leur film originel.
Changement de décor, les Visiteurs débarquent en pleine Terreur. A la façon des films du genre (Papy fait de la résistance ; Liberté, Egalité, Choucroute !…), tout le monde est joyeusement caricaturé : la noble chochotte aux grandes perruques poudrées, le leader opportuniste obéissant au glacial Robie (pour reprendre son surnom de Liberté, Egalité, Choucroute ! du regretté Jean Yann), la concierge populo révolutionnaire lèche-bottes de ses patrons… Quelques figures, dans chaque camp, sont là pour montrer qu’on ne se fout pas de tout le monde non plus, pour ceux qui s’en inquiétaient.
Jean-Marie Poiré (et Christian Clavier, co-scénariste) se montre intelligent en caricaturant avec justesse : les traits moqués des personnages correspondent à des réalités historiques, et non à des discours bien-pensants de manuels scolaires. Des nobles libéraux convertis au nouveau régime, on en trouve à la pelle ; des opportunistes chez les leaders de la République, même chose. On remarque en plus, que la Révolution, avec tous ses beaux idéaux égalitaires, ne fait qu’un jeu de chaises musicales : toujours ceux qui dirigent, les courtisans autour, et ceux qui sont dirigés !
On retient même une certaine glorification de la vieille noblesse (incarnée par un Jean Reno plus charismatique que jamais), venant faire la leçon à celle du XVIIIe siècle, qui a oublié d’où elle vient, quel sang elle a perdu autrefois dans des actes de bravoure, la suie des villages incendiés, la sueur des combats et le froid des châteaux, l’hiver… Et l’historien en herbe qui vous parle a vibré, sachez-le, lorsque Godefroy de Montmirail, par répliques lapidaires, révèle son éducation de seigneur. Malgré les blagues à répétition sur son côté pouilleux au milieu d’un siècle qui n’est pas le sien, quelle allure !
Blagues à répétition, ai-je dit. Ici pèche le film. Malgré les répliques fusant de toutes parts (plus ou moins bonnes, cela dépend). Primo, parce que l’homme du Moyen Age, contrairement à une superstition populaire, se lave bien autant que celui du siècle des Lumières (la Renaissance ayant atteint des sommets de saleté entre temps), et que nos deux compères sont souvent moqués pour leur puanteur. Mais bon, après tout, le premier tenait le même « propos ».
Secundo parce que même si les épisodes précédents, y compris le premier, étaient aussi remplis de gags de ce genre, il faut bien avouer que celui-ci en comporte bien trop.
Quelques répliques bien vues et plus fines sont bien là (plus quelques petits détails de situation amusants), mais que voulez-vous, quand on croise de telles époques, on pouvait peut-être faire mieux. A vrai dire, en sortant, on regrette encore et toujours la touche de finesse féminine qu’apportait Valérie Lemercier, bien que la comtesse du film s’en sorte bien. Le rôle de la femme qui s’occupe avec pitié des deux visiteurs est malheureusement bien plat (la sœur de Robespierre, enfin si j’ai bien suivi).
En fait, ce troisième opus, par son fan-service, est aussi frustrant qu’amusant : frustrant pour être si loin du premier, amusant parce que malgré le trop-plein de blagues olfactives, on rit vraiment. Clavier est le moteur du film : il enchaîne les gaucheries et les grossièretés, mais donne une électricité à une histoire un peu traînante. La frustration est d’autant plus réelle que le film touche à nombre de cordes sensibles de l’aventure originelle : les émouvants rapports entre Godefroy et ses descendants, le regard noble jeté par le seigneur sur l’époque où il tombe, la musique, qui n’a pas pris une seule ride…
A vous de voir : on peut sortir heureux d’avoir revu ces personnages si attachants, ou déçu des deux tiers des répliques, ou les deux… Retenons une chose toutefois : les répliques qui restent dans les mémoires ne sont pas toujours les plus intelligentes ! La gratuité de certaines demande de revoir le film, pour savoir si elles ne cachent pas quelques subtilités trop vite passées pour un premier visionnage. On en connaît tellement qui ont aimé Papy fait de la résistance à la seconde ou troisième fois, et connaissent aujourd’hui tous les dialogues, qui laisseraient pourtant de glace un profane ! Mais aujourd’hui, il y en a davantage encore qui ont un avis tranché sur un film dès la deuxième seconde du générique, et pas toujours celui de fin …
On vous épargnera les banalités à propos des difficultés à rendre des suites aussi surprenantes que leur film originel.
Changement de décor, les Visiteurs débarquent en pleine Terreur. A la façon des films du genre (Papy fait de la résistance ; Liberté, Egalité, Choucroute !…), tout le monde est joyeusement caricaturé : la noble chochotte aux grandes perruques poudrées, le leader opportuniste obéissant au glacial Robie (pour reprendre son surnom de Liberté, Egalité, Choucroute ! du regretté Jean Yann), la concierge populo révolutionnaire lèche-bottes de ses patrons… Quelques figures, dans chaque camp, sont là pour montrer qu’on ne se fout pas de tout le monde non plus, pour ceux qui s’en inquiétaient.
Jean-Marie Poiré (et Christian Clavier, co-scénariste) se montre intelligent en caricaturant avec justesse : les traits moqués des personnages correspondent à des réalités historiques, et non à des discours bien-pensants de manuels scolaires. Des nobles libéraux convertis au nouveau régime, on en trouve à la pelle ; des opportunistes chez les leaders de la République, même chose. On remarque en plus, que la Révolution, avec tous ses beaux idéaux égalitaires, ne fait qu’un jeu de chaises musicales : toujours ceux qui dirigent, les courtisans autour, et ceux qui sont dirigés !
On retient même une certaine glorification de la vieille noblesse (incarnée par un Jean Reno plus charismatique que jamais), venant faire la leçon à celle du XVIIIe siècle, qui a oublié d’où elle vient, quel sang elle a perdu autrefois dans des actes de bravoure, la suie des villages incendiés, la sueur des combats et le froid des châteaux, l’hiver… Et l’historien en herbe qui vous parle a vibré, sachez-le, lorsque Godefroy de Montmirail, par répliques lapidaires, révèle son éducation de seigneur. Malgré les blagues à répétition sur son côté pouilleux au milieu d’un siècle qui n’est pas le sien, quelle allure !
Blagues à répétition, ai-je dit. Ici pèche le film. Malgré les répliques fusant de toutes parts (plus ou moins bonnes, cela dépend). Primo, parce que l’homme du Moyen Age, contrairement à une superstition populaire, se lave bien autant que celui du siècle des Lumières (la Renaissance ayant atteint des sommets de saleté entre temps), et que nos deux compères sont souvent moqués pour leur puanteur. Mais bon, après tout, le premier tenait le même « propos ».
Secundo parce que même si les épisodes précédents, y compris le premier, étaient aussi remplis de gags de ce genre, il faut bien avouer que celui-ci en comporte bien trop.
Quelques répliques bien vues et plus fines sont bien là (plus quelques petits détails de situation amusants), mais que voulez-vous, quand on croise de telles époques, on pouvait peut-être faire mieux. A vrai dire, en sortant, on regrette encore et toujours la touche de finesse féminine qu’apportait Valérie Lemercier, bien que la comtesse du film s’en sorte bien. Le rôle de la femme qui s’occupe avec pitié des deux visiteurs est malheureusement bien plat (la sœur de Robespierre, enfin si j’ai bien suivi).
En fait, ce troisième opus, par son fan-service, est aussi frustrant qu’amusant : frustrant pour être si loin du premier, amusant parce que malgré le trop-plein de blagues olfactives, on rit vraiment. Clavier est le moteur du film : il enchaîne les gaucheries et les grossièretés, mais donne une électricité à une histoire un peu traînante. La frustration est d’autant plus réelle que le film touche à nombre de cordes sensibles de l’aventure originelle : les émouvants rapports entre Godefroy et ses descendants, le regard noble jeté par le seigneur sur l’époque où il tombe, la musique, qui n’a pas pris une seule ride…
A vous de voir : on peut sortir heureux d’avoir revu ces personnages si attachants, ou déçu des deux tiers des répliques, ou les deux… Retenons une chose toutefois : les répliques qui restent dans les mémoires ne sont pas toujours les plus intelligentes ! La gratuité de certaines demande de revoir le film, pour savoir si elles ne cachent pas quelques subtilités trop vite passées pour un premier visionnage. On en connaît tellement qui ont aimé Papy fait de la résistance à la seconde ou troisième fois, et connaissent aujourd’hui tous les dialogues, qui laisseraient pourtant de glace un profane ! Mais aujourd’hui, il y en a davantage encore qui ont un avis tranché sur un film dès la deuxième seconde du générique, et pas toujours celui de fin …