L'italien

Film : L'italien (2009)

Réalisateur : Olivier Baroux

Acteurs : Kad Merad (Dino/Mourad), Valérie Benguigui (Hélène), Roland Giraud (Charles Lemonnier) .

Durée : 01:42:00


Une comédie franchement drôle pour un public très large, les images potentiellement choquantes par nature étant inexistantes. Le jeu d'acteur est
excellent et le scénario efficace. Ce n'est pas tant dans la prouesse technique que dans la richesse du fond que ce nouveau film avec Kad Mérad (décidément partout ces derniers temps) sort du lot. Les questions frappent de plein fouet les problématiques contemporaines par un biais original. A l'heure où le débat sur l'identité nationale fait rage, les questions sont bien résumées par Guillaume Gallienne alias Jacques, ami de Mourad, lors de son exposition « artistique » sur l'identité : il y a plusieurs identités : celle d'origine et celle qu'on veut avoir, influencées par le statut social. Tout le malaise est là, combattu par les convictions de la mère de Mourad : « c'est important de savoir d'où on vient ». Cette question de l'identité soulève tout naturellement celle de l'intégration. Pour évoluer professionnellement, Mourad renie l'islam d'abord, puisqu'il se dit catholique (en témoigne le gros plan sur son pendentif représentant le Christ en croix au début du film), mais
il renie même son origine ethnique, puisqu'il se dit italien. Le concept du « délit de sale gueule » a la dent dure, à l'embauche ou dans la recherche d'un appartement. Bien que la grande majorité des employeurs ne confonde plus  « immigrés »  et « délinquants » depuis longtemps, le mythe semble indestructible. Bien sûr le film fait dire à Roland Giraud (excellent dans son rôle), qui joue le patron de Mourad, que celui-ci aurait été pris même sous sa vraie identité, mais en précisant tout de même que cela aurait été plus dur. Mourad ridiculise au passage le principe de discrimination positive en proposant ironiquement de donner la préférence du logement aux arabes... et aux juifs (puisque son ami est juif). Avec les questions d'identité et d'intégration, il s'agit bien de fustiger la « mauvaise conscience du musulman » puisqu'en définitive, toutes les craintes de Mourad s'avèrent infondées : sa femme l'accepte tout à fait une fois qu'elle sait la
vérité, sa soeur a trouvé un logement sans difficulté (même si Mourad met ça sur le compte de son statut de fonctionnaire) et son assistante, arabe, musulmane et pratiquante, n'a aucune difficulté professionnelle. Bref être musulman en France, c'est le rêve ! Le film aurait pu s'arrêter à ces considérations, mais il a choisi d'emprunter un chemin sur lequel les catholiques n'osent plus se risquer depuis longtemps : le prosélytisme religieux. Outre le fait que le spectateur soit initié à toutes les règles du ramadan (jusqu'à la liste des prières, qui s'affiche à l'écran !), le film montre très bien combien l'ascétisme religieux veut n'être que le prélude d'un changement personnel plus en profondeur. L'imam et l'assistante ont prévenu Mourad qui en fait l'expérience : le ramadan met de l'ordre dans sa vie. De plus la solidarité entre musulmans est soulignée : musulman, le policier laisse passer l'excès de vitesse comme, musulmans, les nouveaux clients de son entreprise préfèrent traiter avec
lui. Traitant de prime abord des débats de société très actuels, le film présente une nouveauté de taille : plaider ouvertement pour l'islam même si, dans la bouche de l'assistante musulmane, cette religion n'apparaît pas très catholique : «  c'est la religion, on ne se pose pas de question. »