Maryland

Film : Maryland (2015)

Réalisateur : Alice Winocour

Acteurs : Matthias Schoenaerts (Vincent), Diane Kruger (Jessie), Paul Hamy (Denis), Victor Pontecorvo (Tom)

Durée : 01:38:00


Le film est entièrement tourné du point de vue de Vincent, et Alice Winocour ne se prive pas d’utiliser tous les artifices de réalisation possibles pour signifier la paranoïa et les troubles sensoriels – hallucinations, troubles d’audition – de son héros. Il n’y a malheureusement aucune finesse dans cette pratique, ou tous les ralentis/shaky-cam/flous sont bons à prendre, sans oublier les hallucinations auditives qui flanquent une migraine carabinée avant la 10ème minute de la séance.

Autant dire que le film ne partait pas gagnant. Mais c’était sans compter sur le talent de Matthias Schoenaerts – Vincent – qui porte littéralement le film sur ses épaules, à coté d’une Diane Kruger – Jessie – au ralenti (on croirait qu’elle fait un acte de charité en participant à ce film d’une jeune réalisatrice française). C’était sans compter non-plus sur les surprises du scénario qui mêle assez astucieusement drame psychologique, polar politique, mélodrame et film d’action sans manquer de s’offrir un final lynchien qui vient sauver le film avec – chose rare dans ce métrage – beaucoup de finesse.

En mêlant les genres, Alice Winocour, s’offre de mettre sur le même plan, et donc en perspective, de nombreux sujets d’importance et nous propose des comparaisons originales et intéressantes. Sommes-nous en guerre ? Peut-on sortir indemne de la guerre ? La violence dans ce film, n’est pas simplement une pratique condamnable « parce que c’est mal ». La réalisatrice analyse avec son personnage comment la violence peut être un enfermement que toute la tendresse du monde ne peut guérir. Une horrible condamnation qui met nos sauveurs au banc de la société et ouvre le film à une problématique plus psychologique : qui est le fou ? Cette éternelle question – tellement cliché au cinéma que je vous vois déjà lever les yeux au ciel – prend ici une portée politique assez originale en comparaison du cinéma français d’aujourd’hui. Qui est le fou ? Celui qui se sent en sécurité ou celui qui se sent agressé par le moindre regard ? Cette question est la base de la relation naissante entre Jessie et Vincent. Une relation tendue par la peur et l’incertitude. Une relation tissée à cause de la violence extérieure mais toujours au bord de l’explosion à cause de la violence intérieur. Un « je t’aime – moi non plus » au goût de sang ; à l’image de la relation que peut avoir le spectateur avec le film.