Mommy

Film : Mommy (2014)

Réalisateur : Xavier Dolan

Acteurs : Antoine-Olivier Pilon (Steve O’Connor Després), Anne Dorval (Diane “Die” Després), Suzanne Clément (Kyla), Patrick Huard (Paul Béliveau)

Durée : 02:18:00


Le chouchou des médias et du milieu du cinéma revient. Xavier Dolan, celui qui s'est fait tatouer une citation de Cocteau sur la jambe ("L'œuvre est sueur"), l'homme qui voit dans la Manif pour tous une "démonstration de haine et d'intolérance" signe son dernier film, une nouvelle fois encensé par la critique.

 

On y retrouve la Dolan touch. Un cinéma très réaliste, sur le thème de la mère et de la relation filiale, dans lequel tout semble sur le point d'exploser, et explose parfois.

Comme toujours, ce jeune réalisateur de 25 ans aime se mettre en danger. Au travers de cette relation houleuse entre une mère (Diane) et son fils (Steve), c'est la violence intra-familiale qu'il traite, jusqu'à l'inceste.

Le jeune homme, complètement cintré, atteint d'une pathologie "de l'attachement," semble n'avoir aucune barrière morale. Attachant par sa sincérité et sa vulnérabilité, il mérite tellement de tartes pendant tout le film que le spectateur hésite à ouvrir une boulangerie-pâtisserie.

 

Mais ce qui saisit d'abord, c'est l'affligeante vulgarité de cette famille, dans laquelle le scénario se vautre allègrement (Xavier Dolan revendique fièrement cette verdeur de langage dans ses entretiens avec la presse), certainement pour faire "vrai". Le but, aucun doute, est de choquer, de montrer qu'on est libre et qu'on ne recule devant rien. Une sorte de crânerie d'artiste si connue qu'elle en devient ringarde.

Porté par un jeu d'acteurs d'une efficacité redoutable, le film s'aventure donc dans la fange tête haute.

 

Au travers de cette noirceur, on devine une intention de fouiller les psychologies. De ce point de vue le film est très réussi. La mère stoïque qui tente de sauver son fils, la voisine bègue qui va trouver dans cette famille sinistrée un moteur à sa vie, le fils torturé entre sa nature violente et sa lucidité...

 

--- ATTENTION : LE PASSAGE SUIVANT REVELE L'INTRIGUE ---

Le point culminant du film est, incontestablement, ce moment où la voisine, qui a noué des liens très forts avec la mère, annonce à celle-ci qu'elle va déménager loin. Derrière l'apparente bonne humeur de son interlocutrice, un monde s'écroule car, avec le départ de Kyla, s'évapore le dernier lien que Diane pouvait avoir avec son fils, qu'elle a fait interner d'office.

Kyla rappelle à Diane ce que son fils a de meilleur. C'est elle qui l'a fait progresser, qui lui a fait patiemment l'école, dans des scènes d'une très grande intensité.

--- FIN DU PASSAGE REVELANT L'INTRIGUE ---

 

Xavier Dolan signe donc un film sensible, intelligemment construit, mais qui rate le principal en laissant le spectateur sur sa faim. S'il n'a rien voulu d'autre que racheter l'accusation contre sa mère de son premier long métrage J'ai tué ma mère, comme il aime à le dire en se répandant dans la presse, alors ça n'a à peu près aucun intérêt. Montrer, comme il le claironne, que la mère a toujours le dernier mot ?

Voilà qui est certainement très beau, mais qui ne veut rien dire du tout.

Pas étonnant donc que le Festival de Cannes, amateur de beauté vide, lui ait attribué le Prix du Jury en 2014.

 

Après, c'est vous qui voyez !...