Nos futurs

Film : Nos futurs (2015)

Réalisateur : Rémi Bezançon

Acteurs : Pio Marmai (Thomas), Pierre Rochefort (Yann Kerbec), Mélanie Bernier (Estelle), Kyan Khojandi (Max)

Durée : 01:37:00


Une histoire de potes qui se retrouvent après des années. Chacun a son métier, sa vie… une histoire de potes qui se retrouvent, quoi…

L'idée est assez originale et attachante. Yann et Thomas ont des vies très différentes, mais chacun a l'impression d'avoir raté quelque chose. Yann n'a pas d'enfants, pour une raison plus ou moins révélée à la fin du film. Thomas, de son côté, est un gros gamin qui, objectivement, a beaucoup moins avancé dans la vie.

En décidant de faire une fête de lycéen comme dans le temps, les deux compères sont dans une logique régressive. On a beau nous expliquer que c'est reculer pour mieux sauter, on comprend assez facilement qu'il y a un manque de maturité évident.

Faut-il y voir le syndrome du monde contemporain ? Ce qui est sûr, c'est que la société présente aux hommes et aux femmes des idéaux faussement édifiants. Pour les hommes (puisque c'est d'eux qu'il s'agit), il faudrait être beau, sportif, avoir des enfants et s'en occuper tout en réussissant magnifiquement bien professionnellement. Le hic, évidemment, c'est qu'il s'agit d'une obligation de résultat. Sur les moyens à utiliser pour être « l'homme idéal, » les magazines, les films et la littérature ne parlent que de technicité : savoir s'organiser, travailler son cardio, lire des histoires à ses enfants le soir… Des « techniques » qui cachent un essentiel pourtant largement clamé par les grands philosophes : la vertu. La direction étant fixée, il n'est d'autre moyen de mettre du carburant dans le moteur qu'en alliant la force à la sagesse, la justice à la prudence, le tout baigné de tempérance.

Sans cela, l'idéal ne peut être atteint, et c'est là que les problèmes commencent… Yann a réussi professionnellement, mais il n'a pas d'enfant. Thomas mène une vie sans contrainte, mais n'a rien construit. Forcément, quand on regarde en arrière, ça calme. Ça déprime, même.

Il y a donc peu de chance pour qu'une fête de lycéen règle la question et, d'ailleurs, elle ne la réglera pas. Rémy Besançon (le réalisateur et scénariste) préfère miser sur le road-trip qu'ils entreprennent pour convaincre « l'aspirateur à filles » de participer à la fête.

Au cours de ce voyage, Thomas réalise qu'il est passé à côté d'un immense canon (interprété par la magnifique Roxanne Mesquida, excusez du peu) qui le lorgnait au collège parce qu'il n'avait pas osé lui parler directement alors qu'elle n'attendait que ça. Là encore, regardez le problème en carton-pâte. Même s'il lui avait effectivement parlé, que se serait-il passé ? Et s'ils étaient « sortis » ensemble, qu'est-ce que cela aurait entraîné ? Un beau divorce ? Sans vertu, je vous dis, c'est perdu d'avance.

De son côté Yann réalise qu'il va perdre sa dulcinée, et se dit prêt à avoir un enfant. Bon, ça c'est pas mal, quand même, ne soyons pas négatifs, mais saura-t-il l'éduquer ? Pris indépendamment de sa conséquence, le désir d'enfant n'est pas une solution, mais un problème. Boh allez ! Dites que je suis un rabat-joie, mais avouez tout de même que le cinéma (et particulièrement les comédies) ont le chic de se presser le citron sur la ligne de départ sans partir au coup de feu ! Ils finissent par se marier ? Et après ? Ils ont un enfant ? Et après ? Il a fini roi ? Et après ?

Divorce ? Adolescent ingérable ? Dictature ?

Disons que, comme souvent, le film pose de bonnes questions, mais peine à y répondre.

Sur le plan technique, difficile d'en parler sans révéler l'intrigue. Disons que ce qui fait l'originalité du scénario fait aussi sa faiblesse. Tout se tient plutôt bien jusqu'à la fin où le dénouement, un peu original, introduit aussi bien une surprise bienvenue qu'un certain nombre d'interrogations sur la cohérence du tout. C'est un peu dommage, d'autant que le reste est assez frais et parfois bien amusant.