Paul

Film : Paul (2010)

Réalisateur : Greg Mottola

Acteurs : Simon Pegg (Graeme Willy), Nick Frost (Clive Gollings), Jason Bateman (Agent Zoil), Sigourney Weaver (Le grand Manitou), Kristen Wiig (Ruth Bugg)… .

Durée : 01:42:00


une comédie de genre plutôt réussie, tant dans son humour britannique que dans ses effets spéciaux, en dépit d'un vide intellectuel et de quelques facilités iconoclastes.

Une aventure de geek racontée par deux geeks ! Simon Pegg et Nick Frost signent en commun leur troisième scénario après ceux des très drôles Shaun of the Dead, hommage aux films de zombies, et Hot Fuzz, hommage aux films d’action, réalisés par l’efficace Edgar Wright. C’est au tour de Greg Mottola, habitué à la comédie, de donner forme au nouvel univers des deux stars anglaises. Il faut reconnaître d'emblée que la réalisation stylisée de Wright avait un charme particulier qu’on ne retrouve pas dans celle de Mottola malgré une différence budgétaire de moins de 40 millions de dollars par rapport à Hot Fuzz. Cependant, les effets spéciaux et les scènes d’actions sont soignés, les ambiances respectent le genre et la photographie est très respectable.


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Le scénario s’inscrit dans le modèle des deux précédents en rendant hommage à un autre genre, la science-fiction, et plus particulièrement le film d’extraterrestres. Autre point commun, les deux scénaristes jouent également les rôles principaux, ce qui n’est pas pour déplaire. Ici, l’histoire place néanmoins les deux personnages au même niveau d’ « héroïsme »… ils ont en tout cas la même importance narrative. Le duo comique marche parfaitement bien dans le genre très sérieux mais maladroit avec un côté enfantin accentué par leur passion de la bande dessinée et de la science-fiction. Les dialogues d’une efficacité toute relative et assez grossiers laissent la place aux situations burlesques, à quelques bons gags et au jeu d’acteur, notamment dans les nombreuses expressions de visage. La comédie est renforcée par la présence du petit extraterrestre en image de synthèse aux antipodes des
créatures sérieuses et terrifiantes que l’on a l’habitude de rencontrer. Paul aurait davantage sa place dans Mars Attacks que dans la Rencontre du troisième type. Il ne s’agit pourtant pas de parodie à proprement parler même si certaines scènes en ont les caractéristiques. C’est pourquoi les cinéastes préfèrent parler d’hommage et multiplient à cet effet les références : de fait l’apparition de Sigourney Weaver est à la fois un ressort comique et un hommage à une icône de la trilogie Alien. Parmi tant d’autres, Spielberg, Lucas et même Alf ont également le droit à leur clin d’œil. Les fanatiques du genre auront à n’en pas douter de quoi jouer avec leur culture générale.

Les seconds rôles ne sont pas en reste. Par exemple, le duo américain de policiers stupides, dont l’un est aussi un geek, marche à merveille (Joe Lo Truglio et Bill Hader
qui apparaissent tous deux dans SuperGrave de Mottola). Tous les personnages sont bien calibrés pour la comédie et forment au fur et à mesure un petit groupe bien sympathique.

C’est là l’autre trait caractéristique du film. Les héros anglais à bord de leur camping-car font malgré eux des rencontres plus ou moins insolites au gré de leur voyage. Le road movie permettait aux scénaristes de faire voyager leurs protagonistes dans un paysage très différent de Londres, ou autre petite ville du continent (Cf. Hot Fuzz). C’est aussi l’occasion de faire de palpitantes courses poursuites, de jour comme de nuit.

L’une des manières de donner vie à Paul et de le crédibiliser est de s’attaquer aux croyances des gens en
les ridiculisant. Ainsi, Graeme et Clive font la rencontre d’une jeune femme chrétienne dont le père bourru est un fervent lecteur de la Bible. Cela donne donc lieu à un court débat animé entre Paul et Ruth sur l’existence de Dieu : l’extraterrestre grossier qui parle anglais et qui devient invisible en retenant sa respiration est la preuve irréfutable que Dieu n’existe pas. Rien de bien sérieux… Mais cette thématique trouve sa place dans le film puisque l’une des raisons du succès de la science-fiction est sa capacité à remettre en cause les fondamentaux et tout ce que l’on croit savoir, de la science à la religion. Évidemment l’humour anglais de Pegg et Frost s’est emparé du thème avec un plaisir non dissimulé pour l’iconoclasme.

Mise à part ça, le film n’est autre qu’un amusant exercice de style autour d’un mélange d’humour et des genres. Du cinéma pour le cinéma,
du divertissement pour le divertissement… Les amateurs de SF, marqués par le cinéma des années 70, ne bouderont pas leur plaisir…


Jean Losfeld