Saint Amour

Film : Saint Amour (2015)

Réalisateur : Benoît Delépine, Gustave Kervern

Acteurs : Gérard Depardieu (Jean), Benoît Poelvoorde (Bruno), Vincent Lacoste (Mike), Gustave Kervern (L'oncle)

Durée : 01:41:00


Delépine et Kervern : deux noms qui, juxtaposés, sont synonymes de bof, fruste, rustique. Leur obsession, avec des films comme Louise-Michel, Aaltra et maintenant Saint Amour, est de prendre le total contrepied du cinéma parisien de ces dernières années, plus bobo et méprisant que jamais. Quoi de plus opposé au bobo que l’agriculteur, de plus contraire au mépris que l’amour ? Saint Amour est une ode sale aux paysans. Rien de propret : tout dans ce film, jusqu’au final, cherche la subversion, le pied de nez au bourgeois, le graveleux… C’est amusant, au début, attachant même ; mais finalement écœurant.

On rit très peu devant Saint Amour, mais à chaque fois de bon cœur. L’alcoolisme de Bruno (Benoit Poelvoorde), sa misère sentimentale, sa rébellion contre le père en font un adolescent attardé très attachant. On rit avec lui et non de lui puisque c’est son autodérision qui sert de principal ressort comique au métrage. Ajoutons qu’il trouve en Gérard Depardieu, qui interprète Jean, son père, un répondant tout aussi touchant et drôle. Du reste, c’est bien Gérard Depardieu qui tient le rôle le plus touchant : veuf amoureux, honnête homme, attentif à son fils. Son combat pour sa terre et le bonheur de son fils mériterait d’ailleurs une meilleure place dans le film qui se disperse trop souvent dans les digressions du road-movie : prétexte insupportable pour faire le tour des malheurs de la France et distiller des messages moralo-politiques trop malvenus dans un film au sujet aussi simple et important que celui de l’attachement à la terre comme lien entre les générations.

Delépine et Kervern : le cinéma des damnés. Ils font honneur à la terre, à la France qu’ils filment magnifiquement, aux hommes et aux femmes qui sont indument méprisés. Mais leur aversion pour le bellâtre qui les pousse au sale, frappe d’infamie leur filmographie et finirait même, peut-être, par trahir ceux qu’ils prétendaient défendre en rebutant d’office des spectateurs qui sont prêts à entendre le message des réalisateurs, mais pas à se voir arroser du malpropre qui l’entoure.