Sanctum

Film : Sanctum (2011)

Réalisateur : Alister Grierson

Acteurs : Richard Roxburgh (Frank McGuire), Rhys Wakefield (Josh McGuire), Alice Parkinson (Victoria), Dan Wyllie (George), Ioan Gruffudd (Carl Hurley)...

Durée : 01:45:00


Un thriller d'aventure haletant qui pousse l'homme dans ses retranchements et se complaît à maquiller le meurtre et le suicide en détermination courageuse.

James Cameron confie sa caméra au très discret Alister Gierson (Kokoda, le 39ème bataillon, en 2006) pour un scénario trépidant inspiré de faits réels. Toute l'histoire relatant une expédition spéléologique, les claustrophobes éviteront absolument le genre.

Au creux des situations périlleuses, le jeu d'acteurs s'avère tout à fait convaincant, et la musique discrète laisse s'exprimer l'esthétique de la photographie afin de sublimer dans un silence religieux la magnificence des galeries souterraines. En parlant de sa chère
3D, James Cameron roule des mécaniques: « C’est un système que j’ai utilisé sur Avatar et qu’Andrew Wight a employé sur Sanctum : le Cameron/Pace Fusion 3D Camera System. Il s’agit d’une caméra HD stéréoscopique qui offre des résultats tellement incroyables qu’elle permet de faire des films 3D au format IMAX sans aucun défaut. Mais aussi étonnante que puisse être cette nouvelle technologie, faire un film n’est pas une question de matériel. Il faut avant tout avoir des idées et de l’imagination. Un film, c’est d’abord une histoire, et celle de Sanctum est passionnante. » (in Dossier de
presse
).

L'équipe étant composée de professionnels et d'amateurs, la caméra ausculte les incompréhensions qui peuvent opposer la dureté de l'homme de métier à la douce naïveté des rêveurs assoiffés de frisson.

L'accent est mis tout particulièrement sur l'attitude de l'homme face à la souffrance et à la mort. A plusieurs reprises Franck, froid calculateur des situations de survie, décide de sacrifier des personnes de son équipe. Scénariste et producteur du film, John
Garvin explique : « Nous voulions l’analyser en profondeur et voir comment se comportent les gens quand ils sont dans une situation difficile et soumis à une tension extrême. Comment survivent-ils ? Notre histoire est celle d’un groupe de personnes prises au piège durant une expédition dans une région sauvage de la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Très vite, cela devient une histoire de survie et de découverte de soi dans un environnement hostile. Face au danger, les personnages se révèlent dans ce qu’ils ont de meilleur et de pire. »

Franck sacrifie ainsi sa partenaire, lors d'une plongée où celle-ci panique en constatant que son tuyau d'oxygène est sectionné. Ceux-ci disposant d'
une seule bouteille pour deux, c'est-à-dire une quantité d'oxygène trop faible pour le binôme. Franck décide alors de la laisser mourir au lieu de se sacrifier. Cet acte était sans aucun doute le meilleur techniquement. Il est le chef de l'expédition sans lequel les autres ne peuvent rien faire, et la jeune femme avait accepté les risques qu'elle courait, choisissant d'effectuer sa plongée alors qu'elle était extrêmement fatiguée. Prendre le risque de mourir à deux quand un peut être sauvé aurait été une imprudence colossale.

Quand un deuxième équipier est cruellement blessé suite à une chute de rochers, le visage déchiqueté et tous les os broyés, Franck d&
eacute;cide d'abréger ses souffrances en le noyant. Son fils s'indigne, mais Franck est catégorique : son ami souffre, il ne peut l'accepter. L'intention (abréger une grande souffrance) est extrêmement louable et les circonstances particulièrement difficiles et désespérées doivent dissuader le critique de cinéma confortablement installé derrière son ordinateur de condamner l'homme lui-même, seul face à sa conscience. Pourtant le gravement blessé avait précisément choisi de courir ce risque (argument fréquemment invoqué par Franck pour rester de marbre devant la mort), et la question du consentement du blessé se pose réellement. Ne pouvant parler, il ne peut dire s'il souhaite être tué, et s'il le souhaitait, serait-ce acceptable pour autant ?

style="font-family: Cambo,arial,helvetica,sans-serif;">Comment être sûr que l'équipe de sauvetage serait arrivée trop tard ? Pourquoi ne pas se battre jusqu'au bout pour essayer de sauver son ami ? Le leitmotiv de Franck, « il ne faut JAMAIS abandonner », sonne creux dans de pareilles circonstances, car il s'agit bien d'un abandon et d'une désespérance.

Il en est de même pour l'homme qui décide de se cacher dans une galerie pour se laisser mourir, afin de ne pas retarder le convoi. Franck est persuadé qu'ils peuvent l'aider jusqu'au bout, ce qui doit être vrai au vu des décisions froides que celui-ci prend tout au long de l'aventure.

align="justify" style="margin-bottom: 0cm;">La deuxième meurtre qui croise également le deuxième thème exploité par le film est la relation père-fils, qui se développe sainement tout au long du film. « Nous avons vraiment axé le scénario sur l’histoire du père et de son fils. Pour ce jeune homme, c’est une sorte de rite de passage durant lequel son père et cet environnement souterrain vont lui enseigner des leçons fondamentales qui vont l’aider à devenir un homme. » (John Garvin, in Dossier de presse). Au début du film, le fils déteste considérablement son père. Pour lui, c'est un assassin, un homme sans cœur obnubilé par sa passion et entraînant beaucoup de futurs cadavres dans son sillon. Progressivement il comprend à quel
point son père est fort physiquement et psychologiquement. Il a surmonté de nombreux périls, s'investit auprès de ses équipiers et fait preuve d'un sang-froid à toute épreuve. Son exigence à l'égard de son fils n'est que la mesure de l'affection qu'il lui porte, et ce dernier finit par le comprendre.

Au moment où il l'a compris, et où il l'explique, son père s'empale sur deux stalagmites et lui demande de l'achever (décidément c'est une manie !). Sauf que les circonstances sont beaucoup moins graves : la blessure, quoique sérieuse, est nettement moins douloureuse que celle des autres ; le niveau de l'eau ne monte pas à cet endroit, ils viennent de découvrir une sortie, bref... On ne
comprend pas la nécessité de noyer son propre père (habitué à souffrir bien plus), pour lui éviter de souffrir alors que, de plus, le dénouement est proche, et si le fils ne pouvait s'en douter (quoique son père lui confie qu'il était assez confiant), c'est un argument de plus pour ne JAMAIS abandonner.


Plus facile à dire qu'à faire, d'où l'héroïsme de la vertu de force.


Raphaël Jodeau