Somewhere

Film : Somewhere (2009)

Réalisateur : Sofia Coppola

Acteurs : Stephen Dorff, Elle Fanning, Chris Pontius, Michelle Monaghan .

Durée : 01:38:00


Les pérégrinations d’une star hollywoodienne à la dérive et ses retrouvailles avec sa fille de onze ans sont souvent émouvantes mais aussi très longuettes. Elles constituent néanmoins une bonne métaphore du questionnement sur le but de l’existence humaine.
Il s’agit du quatrième film de Sofia Coppola, fille de Francis Ford Coppola, réalisateur des inoubliables Apocalypse
Now et Le parrain, et qui commence à s’imposer par elle-même. Du reste, le film fut une véritable histoire de famille puisqu’il fut produit par Francis Ford et Roman Coppola, frère de Sofia, tandis que la musique est signée du groupe Phoenix dont le leader est Thomas Mars, compagnon de la réalisatrice. Le film fut récompensé par le Lion d’or de la Mostra de Venise 2010 remis des mains de Quentin Tarantino, ancien compagnon de la cinéaste ce qui ne manqua pas de déclencher une polémique.

Avec ce film, Sofia Coppola  tourne le dos à la grosse machine Marie-Antoinette pour revenir dans la veine du cinéma intimiste de  Lost in Translation, par ailleurs seul de ses films avec Somewhere à être issu d’un scénario original. On retrouve donc ici la patte typique de la réalisatrice et son style de mise en scène bien particulier : rythme très lent, changement de scène très brute, caméra à l’épaule, plan fixe long. Roman Coppola
déclara que «  Sofia souhaitait traiter ce projet à la manière intimiste du cinéma européen tout en lui insufflant son style personnel » et que « notre priorité était de nous délester de tout ce qui peut peser sur un film ». De fait, il n’y a que très peu d’action dans ce film, l’essentiel étant focalisé sur l’attitude des personnages et leurs relations entre eux. Il n’est pas toujours facile de suivre les pérégrinations de cet acteur hollywoodien un peu paumé, incarné de manière convaincante par Stephen Dorff, plutôt habitué aux films d’action (Blade de Stephen Norrington, Riders de Gérard Pirès) et vu récemment dans World Trade Center de Oliver Stone et Public ennemies de Michael Mann. A ses côtés, le personnage de Cleo est joué par Ellen Fanning, petite sœur de Dakota Fanning, autre enfant star, que l’on a déjà vu dans Babel de Alejandro Gonzalez Inarritu, Déjà vu de Tony Scott, L’étrange histoire de Benjamin Button de David Fincher. Cette toute jeune actrice est confondante
de naturel et d’aisance dans un rôle qui semble avoir été écrit pour elle. Il faut d’ailleurs signaler qu’une bonne partie des dialogues et des situations a été improvisée, la réalisatrice préférant miser sur les relations entre ses acteurs plutôt que sur leurs répétitions. Une option qui se ressent à la vision du film tant leur complicité est évidente.

L’absence d’action se ressent également lors du déroulement du film lorsque l’on constate que le personnage principal est bien revenu au point de départ : une vie oisive, festive, faite essentiellement d’alcool et de rencontres sexuelles sans lendemain. Pourtant, le contact avec sa fille l’a bien changé dans la mesure où il a apprit à avoir d’autres centres d’intérêts et à sortir, même momentanément, de sa léthargie qui le caractérise durant tout le film. Il s’en rend d’ailleurs bien compte lorsque, après le départ de sa fille, il admet n’être rien, moins que rien. Cet homme qui est
censé avoir tout pour lui (bon métier, hôtel de luxe, succès auprès des femmes, fille aimante) est en réalité dépossédé de l’essentiel, un vrai sens à sa vie qu’il ne trouve pas. Une situation qu’il semblait avoir accepté et qui lui devient finalement insupportable lorsqu’il en prend pleinement conscience. Ainsi peut-on interpréter la dernière scène du film où l’on voit Johnny descendre de sa voiture en plein no man’s land et marcher droit devant lui. Sofia Coppola a ainsi expliqué le titre du film par « une évocation poétique d’un moment dans la vie de cet homme, et le titre reflète la conscience qu’il a de devoir aller quelque part sans savoir où exactement ». Un questionnement sur la vacuité de l’existence humaine et la finalité de la vie sur terre assez classique dans le cinéma d’auteur et traité en l’occurrence dans le cadre de la vie d’une star de cinéma. Questionnement intéressant et joliment mis en scène, mais aussi très longuet, voire ennuyeux. On appréciera néanmoins l’importance
primordiale (voire rédemptrice) accordée in fine à la famille, seul élément qui permette réellement de couper, même provisoirement, avec une existence futile et de se poser les questions qui font mal.
Francis