Sortilège

Film : Sortilège (2011)

Réalisateur : Daniel Barnz

Acteurs : Vanessa Hudgens (Lindy Taylor), Alex Pettyfer (Kyle Kingson), Mary-Kate Olsen (Kendra), Peter Krause (Rob Kingson), Lisa Gay Hamilton (Zola), Neil Patrick Harris (Will) .

Durée : 01:23:00


Un mélodrame superficiel calqué sur le conte La belle et la bête.

style="margin-bottom: 0cm" align="justify">Kyle est tellement arrogant que son personnage est peu crédible. Faire un discours en expliquant que l'on ne croit pas à ses idées et que les gens beaux auront plus de facilités que les gens moches, voilà qui, même dans un lycée, relève du suicide politique et vise de ce fait un public adolescent dépourvu de tout bon sens. L'idée de départ était pourtant intéressante : adapter le fameux conte popularisé par Disney La belle et la bête aux temps et aux moeurs, en le rendant accessible aux jeunes victimes de la puberté.

Pourtant la productrice Susan Cartsonis y croit : « Même si nous voulions faire un film pour les préadolescentes et les adolescentes, nous avions besoin d’un scénario intelligent – un scénario qui ne parle pas au public comme à des
enfants, mais qui les fasse grandir. »
(in Dossier de presse)Passons-donc sur cette invraisemblance pour s'attarder sur ce qui fait l'objet du film et méditons un instant sur ce principe de ce trouver à la place de ceux qu'on raille. Car Kyle, c'est certain, fait beaucoup moins le fier une fois que la mystérieuse sorcière, incarnée par Mary-Kate Olsen, qui devait s'ennuyer dans sa grande maison de Los Angeles, lui jette un sort sensé le rendre laid. « Dans toutes les incarnations traditionnelles du mythe, le personnage de la Bête a une apparence animale. Nous ne voulions pas suivre cette voie prévisible. Pour moi, la base de Sortilège, c’est ce beau jeune homme qui devient hideux. Je me suis donc demandé ce que Kyle considérait comme hideux, et nous avons développé son look à partir de cela. » (Daniel Barnz, scénariste) Pour le coup, Kyle devient tellement laid qu'il lui est impossible de se mettre à la place des laids ordinaires. C'était bien la peine ! Bon alors
soulignons la qualité technique du maquillage et passons une nouvelle fois sur ce fait pour considérer la situation. Un grand appartement (acheté par le père de Kyle pour la laide circonstance), contenant une bête cagoulée sur la défensive, et une frêle jeune fille prisonnière débordante d'amour pour tout ce qui l'entoure. Lindy (c'est le petit nom de la belle) est sensée rester dans cette maison pour sa survie (elle a reçu des menaces de mort de la part d'affreux méchants), mais ne rêve que de voyages exotiques. Les deux êtres vont donc devoir s'apprivoiser mutuellement, l'une en découvrant la beauté sous l'apparence peu ragoûtante de son hôte, et l'autre en apprenant à devenir quelqu'un de bien. « Nous avons tous envie de croire que nous sommes capables de changer. Il y a aussi dans cette histoire un message fort sur le fait qu’il faut aller au-delà des apparences pour voir ce que les gens ont au fond d’eux-mêmes. » (Susan Cartsonis). Là encore les
dés sont un peu pipés. Dans le conte, la bête est la cause de l'emprisonnement et Belle s'est sacrifiée, ce qui rend le défi vraiment excitant. Dans le film, Lindy est certes embêtée de devoir rester dans la maison, mais Kyle version Sith ex La menace fantôme est plus un protecteur qu'un geôlier, ce qui change considérablement la donne ! Passons derechef sur cette faiblesse de script, et profitons du spectacle. « Je t'aime, moi non plus, » et pleure le scénario ! Kyle couvre sa prisonnière de cadeaux onéreux. Rien à faire, puisqu'elle n'est pas superficielle et ne se laisse pas acheter. Alors notre génie pense à des... bonbons chimiques ! Magie : elle accepte et se met à lui parler. Petit à petit, Kyle va donc prendre l'habitude de se soucier en profondeur (non non, rien d'érotique là-dedans, il ne manquerait plus que ça !) de sa dulcinée. Il va donc lui construire une serre, pleine de roses, puisqu'elle aime les roses, lui réciter des poèmes, et c'est beau.
Bon certes, ce n'est pas très beau, mais c'est un peu beau quand même ! En tout cas les adolescentes en ont le petit coeur tout serré.

Comme on le devine, les travailleurs de la cafetière seront déçus par le manque de profondeur de la psychologie des personnages mais repartiront, à toutes fins utiles, avec cette certitude qu'il faut être gentil avec les gens et qu'il ne faut pas se fier aux apparences. Pour ceux qui l'ignoraient, la place de cinéma n'aura pas été perdue.


Reste à traiter de la question du sortilège. Alors que dans les contes, la sorcière est
souvent une cause de malheur elle est, dans le cadre de celui-ci comme dans son modèle originaire un instrument de punition pour un acte mauvais, qui est dans les deux d'avoir humilié une sorcière. Mais dans le film celle-ci est rendue somme toute assez sympathique. Elle plonge certes Kyle dans une situation pas franchement rigolote, mais finalement l'aide ainsi à devenir meilleur et, surtout, finit par aider le précepteur de Kyle en lui faisant recouvrer la vue, et sa femme de ménage en faisant obtenir la carte verte à ses enfants restés au pays. Quelle fille sympa cette Mary-Kate Olsen ! Oui, mais à un moment il faudrait choisir ! Soit on est au service des forces occultes, et on fait s'abattre le malheur sur les gens, soit on les aide et on est au service de quelque chose d'autre ! Parce qu'une sorcière gentille, ça sent l'arnaque à plein nez ! Si même les sorcières deviennent sympas, alors où sont les méchants ? Du côté de ceux qui les combattent, à tous les coups ! Hé
bien rappelons-le : qui fait l'ange fait la bête !..


Raphaël Jodeau